Julie Artus

« Monsieur Francken, ayez la décence de descendre de la scène politique »

Julie Artus Psychologue

Monsieur Francken, il est malheureux qu’il n’y ait pas de « contrôle à l’entrée » en politique, comme la Croix-Rouge en pratique. Cela nous aurait évité de passer à côté d’un humoriste hors pair. Cela nous aurait aussi évité un homme politique sans valeur(s).

Cher Monsieur Francken,

A la lecture de l’article Le parc Maximilien, un moyen de déstabiliser le gouvernement pour Francken (LeVif du 20/09/2015), je me dis que vous vous êtes trompé de carrière. L’humour noir vous sied si bien qu’une reconversion en humoriste serait du plus bel effet. Vos déclarations, sur scène, nous mèneraient tout droit à l’hilarité tant elles sont désopilantes.

« Je peux difficilement me départir de l’impression que le parc Maximilien a été conçu par des gens qui abusent de la situation afin de pouvoir fulminer contre le gouvernement et surtout contre ma propre personne. Mais évidemment, cela peut naturellement n’être qu’une impression, hein »

Quel humour ! Heureusement que vous êtes là pour détendre l’atmosphère et égayer un peu ceux qui travaillent sans relâche à monter des tentes, nourrir, soigner, habiller, équiper, occuper les enfants, tenir propre un camping improvisé en plein coeur de l’Europe pour…800 personnes au bas mot.

Vous avez raison de leur rappeler qu’abuser de la détresse des gens en leur portant secours pour « fulminer contre le gouvernement », ou pire, « contre votre propre personne », n’est pas un comportement digne d’un électorat moutonnant. N’ont-ils rien de mieux à faire de leurs journées et de leurs congés que de faire le travail à votre place ? C’est un scandale, ils vous volent la vedette, pire, ils vous ôtent le pain de la bouche.

Parlons-en de pain. Je n’ai pu retenir un fou rire en vous lisant.

« Ils se sont plaints « de ne pas recevoir à manger », la Croix-Rouge a donné « une tasse de soupe le soir et un sandwich au fromage » le matin »

Un bol de soupe et un sandwich au fromage ! Il fallait y penser ! Mais vous ne vous en tenez pas là. Fort heureusement pour mes zygomatiques.

« Ils ne connaissaient pas le chemin du WTC III », l’Office des étrangers a distribué des petits plans »

« Il n’y avait pas de sanitaires », la Défense et la Croix-Rouge ont prévu 16 douches »

« C’était pas assez « attrayant » car pas ouvert 24h sur 24, on élargit le pré-accueil à la nuit »

Votre talent est sans égal ! La façon que vous avez de relever l’exigence de ces gens qui après quelques malheureux milliers de kilomètres à pieds (je suis certaine que vous en faites au moins l’équivalent en avion chaque été), après avoir perdu quelques membres plus ou moins proches de leur famille (qui sous les balles, qui sous les bombes, qui en mer, qui d’épuisement, qui égorgé ou violé), après avoir perdu travail, maison, souvenirs, terre, ont l’audace de réclamer. Encore une fois, merci d’être là pour nous ouvrir les yeux sur la scandaleuse réalité de leurs demandes. Une douche, de quoi se nourrir, un abri.

« Et maintenant, il y a des contrôles à l’entrée, « mais est-ce que la Croix-Rouge doit vraiment laisser entrer tout le monde comme cela? »

Monsieur Francken, il est malheureux qu’il n’y ait pas de « contrôle à l’entrée » en politique, comme la Croix-Rouge en pratique. Cela nous aurait évité de passer à côté d’un humoriste hors pair. Cela nous aurait aussi évité un homme politique sans valeur(s). Car si vos propos, sur scène, seraient hilarants, ils deviennent boueux dans la bouche d’un représentant de l’état belge.

Montez sur les planches si cela vous chante, Monsieur Francken, mais ayez la décence de descendre de la scène politique

Représentant qui plutôt que de soutenir sa population dans un admirable combat pour la dignité, la vilipende sous prétexte qu’elle atteint à son image.

Représentant qui salit l’état Belge par son immobilisme et son manque de volonté à créer une réponse qui respecte les droits fondamentaux que sont les Droits de l’Homme. A l’heure actuelle, alors que 800 personnes dorment sous tente dans la capitale de l’Europe, je me demande qui « déstabilise le gouvernement ».

Montez sur les planches si cela vous chante, Monsieur Francken, mais ayez la décence de descendre de la scène politique. J’ai honte de ce que serait la Belgique sans ces citoyens qui oeuvrent à votre place au parc/camp Maximilien.

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