Michel Delwiche

Mittal tient ses promesses

Michel Delwiche Journaliste

La menace de nationalisation de la sidérurgie liégeoise, c’est du pipeau. Le gouvernement wallon le sait. Il serait même disposé à prêter de l’argent à ArcelorMittal pour lui permettre d’honorer (enfin) ses promesses.

Ah, ça, on allait voir ce qu’on allait voir. Ce Monsieur Mittal n’allait tout de même pas faire la loi en Wallonie, il fallait réagir et l’obliger désormais à tenir ses engagements, après tant de promesses non tenues. Fini de courber l’échine. Au printemps dernier, le Gouvernement wallon a ainsi brandi l’arme ultime, la menace de nationalisation (régionalisation en l’occurrence) de la sidérurgie liégeoise. Mais l’avant-projet de « décret d’appropriation d’outils économiques pour cause d’intérêt public » présenté par Jean-Claude Marcourt (PS), ministre wallon de l’Economie, censé démontrer la détermination des autorités wallonnes, ne pouvait toutefois guère émouvoir le magnat de l’acier.

-D’abord parce que ce n’est pas demain que le texte pourra être adopté par le Parlement wallon. Il est en effet toujours en discussion au sein du gouvernement, qui espère en finir avant la fin de cette année. Ensuite son parcours parlementaire risque d’être un peu chahuté en offrant un thème de discussion idéologique sensible en pleine campagne électorale: collectivisme contre libre entreprise.

-Ensuite parce que toute expropriation a un prix, et que la Région ne dispose sans doute pas actuellement des moyens financiers nécessaires au rachat des usines liégeoises. Elle pourrait, a-t-on entendu, ramener son intervention à un portage limité, le temps d’essayer d’attirer de nouveaux investisseurs. Mais on n’a pas vu de repreneur quand on en a cherché. Et la perspective d’être à son tour nationalisé a de quoi faire réfléchir tout candidat.

Le volet social

On sait maintenant ce qu’il va rester de la sidérurgie liégeoises. Le chaud, c’est fini, et le froid est lui aussi laminé. Quelques outils seront mis sous cocon, officiellement en perspective d’une éventuelle reprise des marchés. En réalité pour amortir le choc de la perte de plus de 2.000 emplois. Seules six lignes du froid seront conservées, les plus modernes, qui bénéficieront -foi de Mittal!- d’un investissement de 138 millions pour leur permettre d’être encore plus performantes. ArcelorMittal promet en outre de ne plus faire de restructuration au cours des cinq prochaines années. Sur le plan social, cela représente le maintien de moins de 850 emplois.

Chères prépensions

Le plan social d’accompagnement des fermetures d’outils est toujours en cours de discussion. La procédure vient d’ailleurs d’être prolongée d’un mois. Côté syndical, on tente d’atténuer la catastrophe, en essayant par exemple d’obtenir des prépensions pour les quelques centaines de travailleurs les plus âgés. C’est une discussion difficile et ArcelorMittal n’est manifestement pas enclin à délier les cordons de sa bourse. Du moins pas sans contrepartie. Le Gouvernement wallon, après ses prises de position matamoresques, semble de plus en plus résigné. Selon Sudpresse (éditions de jeudi dernier), il serait même disposé à prêter à ArcelorMittal les 138 millions qui permettrait au groupe de tenir sa promesse d’investissement. Cette éventualité a en tout cas été mise sur la table, même si rien n’est décidé, et s’il ne s’agit que d’un point parmi 32, nous assure-t-on.

Politiquement, Jean-Claude Marcourt, tête de liste PS pour les prochaines élections régionales, a évidemment intérêt à limiter la casse dans son fief liégeois, qui semble prêter une oreille de plus en plus attentive aux positions plus radicales. Mais sans donner l’impression qu’il favorise outrageusement les terres principautaires dans une Wallonie qu’il se verrait bien diriger. Car là, ils sont plus d’un à l’attendre au tournant.

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