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Made in Charles Michel

Thierry Denoël
Thierry Denoël Journaliste au Vif

Lors du précédent drame social chez Caterpillar, l’idée d’un label européen, incitant au patriotisme économique, avait été lancée par le président du MR, aujourd’hui Premier ministre. Qu’en est-il trois ans plus tard ?

Nos politiques sont bien rodés. Le scénario est le même à chaque drame social. Discours compassionnels, sévères réprimandes à l’égard des patrons licencieurs et promesses d’actions pour l’avenir. Souvenez-vous : en 2013, alors que 1 400 emplois venaient d’être supprimés chez Caterpillar Gosselies et plus de 4 000 chez Ford Genk, Charles Michel, alors président du MR, se faisait le chantre du « patriotisme économique ». Dans les colonnes du Vif/L’Express, il lançait un appel au « made in Europe » pour contrer la logique des multinationales américaines.

« C’est un sujet sur lequel je veux que le MR se positionne dans les semaines à venir : nous devons forcer la création d’un label « made in Europe » », déclarait-il dans le numéro du 8 mars 2013. Et d’ajouter : « Ce label permettrait de sensibiliser les citoyens au thème du patriotisme économique. Pour qu’au moment de l’acte d’achat, il y ait une réflexion qui prend en compte cette notion de made in Europe. En consommant européen, on accepte parfois de payer un peu plus cher, mais on soutient une activité qui crée de l’emploi en Europe. » Cette promesse intéressante et ferme avait été relayée dans plusieurs médias, reprise sur le site Web du MR et répétée par le député MR Denis Ducarme, sur les ondes de Bel RTL. En réalité, à l’époque, il existait déjà un projet de mention d’origine européenne. En 2010, le Parlement européen s’est prononcé en faveur d’un tel label obligatoire, harmonisé et contrôlé. On sait qu’en Europe, on est toujours incapable de localiser l’origine de 10 % des biens de consommation. L’idée était donc moins de susciter le patriotisme économique que de garantir une traçabilité des produits. Cela dit, si la traçabilité peut servir le patriotisme, tant mieux.

A petits pas

A cause du lobbying de certains producteurs européens qui jugent le label trop contraignant, ce projet fait son chemin à une vitesse de limace. Début 2013, il semblait bloqué, entre autres, par le Royaume-Uni. En avril 2014, vers la fin de la législature précédente, les députés européens ont tout de même obtenu qu’il soit approuvé en première lecture. Ensuite, conformément à la procédure législative européenne qui prévoit une seconde lecture, le texte est retourné au Conseil, où il prend toujours la poussière, car certains Etats restent réticents. En attendant, un label made in UE peut être appliqué sur une base volontaire par les producteurs. Cela se fait donc de manière disparate sur un nombre limité de produits.

Quant au MR et à Charles Michel, devenu chef du gouvernement fédéral, qu’ont-ils obtenu de concret de leur côté, depuis l’appel de 2013 ? A notre connaissance, rien. Néanmoins, Frédéric Cauderlier, le porte-parole du Premier ministre nuance : « Le MR agit par l’action de ses ministres en place, au 16 ou aux Affaires étrangères, qui sont des interlocuteurs importants au niveau européen. A chaque Conseil de l’UE, nous redemandons que l’Europe mette en place une vraie stratégie industrielle commune performante. Les décisions et actions du gouvernement visent aussi à maintenir la production en Belgique et donc en Europe, que ce soit le tax-shift qui réduit l’écart de compétitivité ou les négociations des exécutifs fédéral et bruxellois avec Audi, qui ont permis que l’usine de Forest assemble la Q6 électrique en 2018. »

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