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Lutgen – Michel : histoire d’une rupture

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

L’animosité personnelle entre les présidents du MR et du CDH a joué un grand rôle dans la composition de majorités différentes au fédéral et dans les Régions. Genèse d’une méfiance devenue maladive.

« Si Benoît Lutgen a refusé de participer au fédéral, au-delà de sa peur de la N-VA, c’est avant tout en raison de très mauvaises relations interpersonnelles, insiste un membre du top du CDH. Il n’a jamais fait confiance à Bart De Wever mais surtout, il ne supporte plus Charles Michel. » Entre les deux hommes, les rouages sont grippés depuis le début. Leurs premiers contacts sont laborieux. En 2011, soucieux de « dédiaboliser » son parti dont il vient de prendre la tête, Michel veut longuement rencontrer tous ses collègues. Lutgen, plus solitaire, concentré sur la dynamique interne du CDH, se fait désirer, et ne répond pas tout de suite aux sollicitations. Pas de lune de miel, donc. Pire : lors de la négociation de la sixième réforme de l’Etat, ils s’irritent mutuellement. Le MR raille un Lutgen surmené, qui arrive en retard aux réunions, ne parle pas néerlandais et ne maîtrise pas ses dossiers.

« Le seul moment où Benoît et Charles ont noué une complicité, c’est au lendemain des communales de 2012 », rappelle un CDH de la capitale. Dans le Luxembourg et le Namurois, ils s’allient à plus d’une reprise pour mettre le PS dans l’opposition. A Bruxelles, après l’éjection de Joëlle Milquet, tous deux soutiennent le coup de force molenbeekois : MR, CDH et Ecolo mettent fin au règne de Philippe Moureaux. « Mais il ne faut pas se tromper : c’est surtout une dynamique propre à Bruxelles qui a joué. »

D’autant que pour le triple scrutin de mai dernier, le MR envoie son vice-président, Willy Borsus, chasser en terres luxembourgeoises pour tenter de grappiller un siège. « Benoît est un susceptible, il a pris cela comme une agression personnelle, confie un proche. Le rapprochement entre le MR et son frère Jean-Pierre, patron d’Ice Watch avec lequel Benoît est en conflit ouvert, a transformé la tension en affaire personnelle. »

Quelques jours après les élections, Lutgen et Michel explorent ensemble les coalitions possibles au domicile de ce dernier, à Wavre. « Nous avons proposé des majorités sans le PS partout, mais Michel préconisait une tripartite du côté francophone et n’a plus répondu aux appels de Benoît », dénonce-t-on au CDH. « C’est Lutgen qui était fuyant, il ne répondait plus à son GSM, on sentait qu’il se tramait quelque chose », rétorque-t-on au MR.

La rupture est définitive lorsque le président du CDH refuse à deux reprises de rallier le centre-droit au fédéral. Charles Michel encaisse, mais prépare déjà le coup suivant. Avec la « suédoise », il espère faire une OPA sur le centre-droit du CDH. Et pourrait proposer l’un ou l’autre poste ministériel à des personnalités proche des milieux chrétiens pour siphonner son électorat.

L’intégralité de l’article dans Le Vif/L’Express de cette semaine.

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