© Belga Image

Liesbeth Homans nomme Erick De Bruycker bourgmestre de Linkebeek, et créé la polémique

La ministre des Affaires intérieures flamandes Liesbeth Homans (N-VA) a annoncé dimanche avoir nommé le même jour le conseiller communal néerlandophone de l’opposition Eric De Bruycker bourgmestre de Linkebeek. Une disposition immédiatement critiquée.

Mme Homans a dit espérer que ce faisant, il serait mis fin au carrousel entourant la nomination du bourgmestre de cette commune à facilités de la périphérie, privée de maïeur depuis 2006.Selon la ministre, Eric De Bruycker prêtera serment lundi devant le gouverneur du Brabant flamand.

Il y a un peu plus de deux semaines, la ministre flamande avait nommé l’échevin francophone Yves Ghequière bourgmestre de la commune, mais ce membre de la majorité francophone, qui compte 13 élus sur 15, avait refusé cette nomination en plein accord avec son groupe et Damien Thiéry, bourgmestre faisant fonction, dont la nomination a été refusée à plusieurs reprises pour non respect de la législation linguistique.Pour Mme Homans, « cette nomination avait été faite dans le respect de la loi et des rapports de forces au niveau local.

Yves Ghequière a déclaré le 22 septembre dernier qu »il n’acceptait pas d’endosser la fonction de bourgmestre. Damien Thiéry a en outre indiqué qu’aucun membre de sa liste n’était candidat à la fonction de bourgmestre.

Ce faisant, la majorité francophone ne s’est pas seulement placée au-dessus de la Loi spéciale, elle a nié à deux reprises la jurisprudence du Conseil d’Etat – le plus haut collège de droit administratif dans le pays », a commenté dimanche la ministre, par voie de communiqué. Aux yeux de Liesbeth Homans, « notre état de droit ne fonctionne que si tous les niveaux de pouvoir dans le pays exécutent nos règles de droit démocratique et les jugements du plus haut collège du droit administratif.

A Linkebeek, la majorité outrepasse les lois et la jurisprudence depuis des années. Il faut y mettre un terme », a-t-elle encore dit.

Erick De Bruycker et Prolink

Le conseiller communal de l’opposition linkebeekoise Eric De Bruycker accepte sa nomination comme bourgmestre de Linkebeek par la ministre flamande des Affaires intérieures, mais sous conditions, a indiqué dimanche après-midi le groupe Prolink (2 conseillers communaux sur 15).

Si après un certain temps, il apparaît qu’il n’y a, au sein de la majorité francophone de Linkebeek, aucune volonté de collaborer, Eric De Bruycker remettra son mandat en jeu. « Nous ne voulons pas être responsables du non fonctionnement de notre commune, a indiqué Prolink, à l’issue d’une réunion du groupe minoritaire.

Eric De Bruycker prêtera serment dans les mains du gouverneur du Brabant flamand, lundi matin à 9h30, à Louvain. Agé de 57 ans, il était jusqu’il y a peu chargé d’affaires dans une petite entreprise d’installation de systèmes de chauffage. Il siège depuis 15 ans au conseil communal de Linkebeek, ayant obtenu 168 voix de préférence sur la liste Prolink, lors du dernier scrutin.

Ce groupe d’opposition s’était ouvert à quelques candidats francophones lors du dernier scrutin. Prolink a dit partager la vision de la ministre Homans selon laquelle l’actuel bourgmestre faisant fonction Damien Thiéry ne peut être nommé en raison d’infractions à la législation linguistique. « Alors que la pacification communautaire est devenus progressivement un fait dans d’autres communes à facilités, Damien Thiéry a continué consciemment et volontairement à outrepasser la loi. Au conseil communal, nous l’avons averti expressément et lui avons demandé d’enterrer la hache de guerre communautaire », a affirmé dimanche la formation de l’opposition. Prolink concède qu’au stade actuel, un bourgmestre de l’opposition flamande bénéficie d’un soutien démocratique insuffisant et que dans la pratique, « celui-ci sera maintenu hors du collège de fait ». Le groupe de l’opposition souligne qu’il continuera à chercher des solutions de manière constructive et dans le respect de tous, mais que le futur bourgmestre renoncera à son mandat si après un certain temps, il apparaît qu’il n’existe pas de volonté de collaborer dans la majorité francophone.

Remise en cause de l’autorité de Charles Michel en tant que Premier ministre

Pour le président des FDF Olivier Maingain, « c’est la faiblesse du MR face à la N-VA qui permet à la ministre Homans de procéder à un véritable coup de force contre la démocratie à Linkebeek en nommant comme bourgmestre un élu de l’opposition flamande, qui ne compte que 2 élus sur 15 conseillers communaux ».

Ce faisant, a poursuivi M. Maingain, réagissant à cette décision de la ministre flamande, « la N-VA relance délibérément les conflits communautaires en périphérie bruxelloise et menace la loyauté fédérale ».

« Si Charles Michel n’est pas capable de faire respecter la démocratie à Linkebeek, c’est qu’il n’a pas l’autorité d’un Premier ministre. A quoi sert-il d’aller défendre les droits de l’homme à la tribune des Nations unies si, au moment même, il laisse les mains libres à son partenaire privilégié, la N-VA, pour anéantir le suffrage universel », s’est encore demandé Olivier Maingain, annonçant qu’il interpellera Charles Michel à la Chambre « pour l’inviter à faire preuve de courage ».

Le cdH de son côté a condamné dimanche cette décision de la ministre N-VA. « Une telle manoeuvre relève du coup d’état communautaire et constitue un viol qualifié des choix démocratiquement posés par les électeurs de Linkebeek ».Dans un communiqué, le parti présidé par Benoît Lutgen a enjoint le MR « d’arrêter d’accorder sa confiance aveugle à son partenaire N-VA, au détriment systématique des intérêts et des choix des francophones ».

Le président du Parti Socialiste Elio Di Rupo a quant à lui invité le Premier ministre à inscrire le dossier de la nomination du bourgmestre de Linkebeek à l’ordre du jour du prochain comité de concertation. « Je demanderai aux ministres socialistes des gouvernements wallon, bruxellois, de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Communauté germanophone de soutenir le choix des électeurs linkebeekois », a-t-il commenté, regrettant la volonté de la ministre flamande Liesbeth Homans « d’imposer à une commune un bourgmestre issu de l’opposition et qui ne jouit pas de la confiance du conseil communal ni de la population » Pour le président du PS, « par cette nomination, les droits des francophones et le choix des électeurs de Linkebeek sont bafoués ». Par ailleurs, Elio Di Rupo a ajouté qu’en tout état de cause, il invitera ses collègues présidents de partis francophones à une concertation quant à « l’attitude commune à adopter pour permettre le respect de la démocratie ».

Pour le MR, Damien Thiéry est « le seul bourgmestre légitime de Linkebeek », a affirmé dimanche le président du MR, Olivier Chastel, disant constater que « la ministre flamande des Affaires intérieures Liesbeth Homans s’entête dans son refus de la légitimité démocratique » de celui-ci.

Aux yeux du président du MR, la décision de Liesbeth Homans de nommer un bourgmestre issu de la minorité flamande est à la fois « totalement inacceptable mais aussi dommageable », la population linkebeekoise en étant la première victime. Pour Olivier Chastel, « il est difficilement envisageable qu’un conseiller communal de la minorité, sans aucune expérience de la gestion d’une commune et sans aucun appui parmi le collège échevinal, puisse exercer correctement la fonction de bourgmestre ».

M. Chastel a rappelé que « la bonne gestion des affaires communales par Damien Thiéry n’a jamais été remise en cause ». Le président du parti libéral francophone a par ailleurs indiqué que cette décision, comme toutes celles prises précédemment dans ce dossier depuis 2007, est de la seule compétence du gouvernement flamand, comme le prévoit la réforme de l’Etat de 2001.

Olivier Chastel a enfin précisé qu’il recevrait Damien Thiéry, « qui conserve le soutien du MR dans ses démarches juridiques pour trouver une solution à ce problème communal », lundi après-midi au siège du MR.

Ecolo et Groen ont demandé dimanche au Premier ministre d' »arrêter de jouer à l’autruche et de considérer que ce qui se passe en dehors de son gouvernement ne le concerne pas ». La co-présidente d’Ecolo Zakia Khattabi et la présidente de Groen Meyrem Almaci se sont demandées si l’engagement du Premier ministre MR à la tête du gouvernement, « fait sur base de la promesse de ses partenaires nationalistes de ne pas faire de communautaire pendant cinq ans » ne viendrait pas de « voler en éclat ». « Force est de constater que l’adage ‘les promesses n’engagent que ceux qui y croient’ est plus que jamais d’actualité. Charles Michel peut-il encore y croire et donner le change? A une semaine de la rentrée fédérale, la N-VA impose seule l’agenda communautaire », ont déploré les deux cheffes de file écologistes.

Contenu partenaire