Christine Laurent

Les yeux au ciel

Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

IL AVAIT QUITTÉ LA BELGIQUE EN HÉROS MAIS, À PEINE ARRIVÉ sur la scène européenne, il a perdu tout son lustre. Herman Van Rompuy n’est plus que l’ombre de lui-même. Un falot à la botte de Nicolas Sarkozy et d’Angela Merkel, un factotum, accusent ses détracteurs. Pas sûr que l’homme s’en offusque.

Il pose ses yeux ailleurs, Herman. Entre les haïkus qu’il compose lui-même et Le Bonheur (1), le gros livre (qui regroupe les témoignages de pas moins de 3 000 « bonheurologues » venus de cinquante pays) qu’il va offrir en cadeau de fin d’année à quelque deux cents chefs d’Etat, il plane. De fait, l’ouvrage ne manque pas d’intérêt, comme nous l’expliquons cette semaine, surtout quand il permet de « pencher du bon côté », celui de la pensée positive et du bien-être collectif. Un programme qui gagnerait à être lu et relu par nos élus, tant ils sont préoccupés par leurs seules querelles politiciennes.

Prenez, au hasard, Charles Michel et Olivier Maingain. « Il faut se choisir des ennemis plus grands que soi, ça tire vers le haut », conseille Nicolas Sarkozy à ses « amis » politiques. Charles et Olivier, Olivier et Charles, ce serait plutôt blanc bonnet et bonnet blanc. Et ils ne cessent de se détester. Jusqu’à la lutte finale ? Maingain, qui n’a pas son missile dans sa poche, multiplie les anathèmes à l’encontre du président du MR, accusé de tous les maux. Incapable de sortir d’une souricière dans laquelle il s’est lui-même enfermé, le « preux au combat » est reparti en croisade contre le Nord, les Flamands, le MR, et j’en passe. Bref, tous les « ennemis » qui guettent. Michel rend coup pour coup. Dans l’interview qu’il nous a accordée, il est tout aussi cinglant : « Maingain joue au valet noir, il parie sur l’échec et le chaos, il veut démontrer le caractère ingouvernable de la Belgique… » Pis : « Les programmes de la N-VA et du FDF comptent beaucoup de points communs », accuse-t-il. La pique qui fait mal.
Au passage, l’air de rien, le président du MR ne se prive pas de donner quelques coups de griffe au PS « coincé sur les positions de la FGTB, donc des allocataires sociaux, des prépensionnés » et dont « la com’ brosse une caricature mensongère de l’indépendant ». C’est pourquoi il a dû (presque malgré lui ?) « jouer le délégué syndical pour défendre les classes moyennes » lors des dernières négociations. Mais il n’a pas mouillé sa chemise en vain, le programme d’Elio Ier n’est-il pas, en effet, « clairement de centre-droit » ? Ambiance, ambiance.
Centre-droit ? Ce ne sont pas les syndicats et les travailleurs en grève ce jeudi qui prétendront le contraire. Alors que les esprits des citoyens voguaient déjà vers les cadeaux de Noël et la trêve des confiseurs, patatras, voilà Vincent Van Quickenborne qui joue le trouble-fête. La bombe, cette réforme des retraites. Tous punis ! Juste ce qu’il faut pour ajouter au bourdon de la crise. Jusqu’ici, les responsables politiques avaient murmuré le souhaitable, les voilà qui nous imposent le réel. Finis les tours de passe-passe à la Michel Daerden. Les agences de notation veillent et menacent encore. Nous devons tous payer et ça fait mal. Mais plus que le fond, c’est la forme qui heurte. A la hussarde ! Dur, dur.
Finalement, c’est donc bien Herman qui a raison. Il faut re-la-ti-vi-ser. Lever les yeux au ciel, voir au-delà de la mêlée pour trouver un brin de sagesse et de sérénité. C’est tout le bonheur que la rédaction du Vif/L’Express vous souhaite pour finir zen cette année 2011. Nos meilleurs voeux à tous pour 2012. Et merci encore pour votre fidélité.
(1) The World Book of Happiness, sous la direction de Leo Bormans, éditions Racine


Christine Laurent

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