Jacqueline Galant © Belga

Les très intrigants avocats du cabinet Galant

Laurence Van Ruymbeke
Laurence Van Ruymbeke Journaliste au Vif

Le cabinet Galant recourt abondamment aux services du bureau Clifford-Chance, choisi en dehors de toute procédure légale. Quelque 500 000 euros ont été budgétés pour couvrir ses honoraires en 2015.

Le cabinet de Jacqueline Galant (MR), ministre des Transports, s’apprête à consacrer entre 400 000 et 600 000 euros au paiement des honoraires du cabinet d’avocats Clifford-Chance pour les prestations accomplies entre octobre 2014 et décembre 2015. Ces avocats ont été choisis par la ministre sans appel d’offres ni procédure négociée comme la loi l’impose pourtant. Ils conseillent notamment son équipe dans ses discussions avec les compagnies aériennes, pour la rédaction de la nouvelle loi de procédures aériennes (dite Vliegwet) et dans ses contacts avec les autorités européennes.

La hauteur des honoraires de ce bureau d’avocats et son choix suscitent quelques réactions parmi leurs confrères et dans les syndicats, a appris Le Vif/L’Express. « L’attribution du marché pouvait se faire sans appel d’offres, au terme d’une procédure négociée, mais après consultation de trois cabinets au moins », détaille un avocat. Or, indique la porte-parole du cabinet Galant, « il n’y a pas eu de procédure négociée. Le bureau Clifford a été choisi pour ses compétences en matière européenne et pour le regard vierge qu’il pouvait poser sur le dossier. Nous avons demandé au SPF Mobilité de vérifier si les honoraires du bureau Clifford se situaient dans une fourchette acceptable. » On sait par ailleurs que Clifford-Chance a collaboré avec Dominique Offergeld, cheffe de cabinet de la ministre Galand, lorsqu’elle travaillait chez l’opérateur énergétique wallon Ores.

« Clifford-Chance n’est spécialisé ni en logistique, ni en aéronautique, rétorque Karimeddine Mosbah, président de la CGSP Amio, sous-secteur mobilité et transport, par ailleurs employé par le SPF Mobilité. Nous nous interrogeons donc sur les critères qui ont dicté ce choix. » Le syndicat a d’ailleurs publié une lettre ouverte à Jacqueline Galant, lui demandant entre autres des explications sur ce point (voir ci-dessous).

En avril dernier, le conseil des ministres avait attribué une enveloppe de 3 millions d’euros au département des Transports, dont 1 à 1,5 million devaient servir spécifiquement à la problématique des nuisances sonores : financement d’études, appel à des experts, règlement de litiges, etc. « Sur l’enveloppe initiale de 3 millions d’euros, moins de 800 000 ont été dépensés à ce jour, précise la porte-parole de la ministre Galant. Et sur ce total, la moitié environ concerne le secteur aérien. »

Selon les informations obtenues par Le Vif/L’Express, le cabinet Galant serait déjà redevable de quelque 150 000 euros à Clifford-Chance pour des prestations effectuées entre la fin du mois d’octobre 2014 et mars 2015. La première facture de ces hommes de loi, dont le tarif horaire est de 385 euros hors TVA, ne serait tombée qu’en avril dernier. Le tarif demandé par Clifford-Chance, même s’il semble consentir d’importantes réductions au cabinet Galant, est sensiblement supérieur à celui des autres avocats qui travaillent régulièrement pour le SPF et qui ont été choisis, eux, à l’issue de procédures négociées. Le cabinet Galant ne souhaite ni infirmer ni confirmer les chiffres dévoilés par Le Vif/L’Express.

D’après diverses projections, le budget à prévoir pour ces prestations juridiques tout au long de la seule année 2015 s’élèverait à quelque 500 000 euros, TVA comprise. Or le budget total du service juridique du SPF Mobilité (y compris pour les autres modes de transports) ne serait que d’environ 600 000 euros pour cette année.

A titre de comparaison, le cabinet d’avocats Stibbe, qui collabore avec le département des Transports depuis plusieurs années et qui s’occupe des dossiers sans cesse plus nombreux de litiges sur les nuisances sonores portés en justice, a perçu des honoraires de quelque 170 000 euros (soit un taux horaire moyen de 205 euros) pour les prestations qu’il a effectuées entre le début janvier et la fin septembre 2015. Le cabinet Stibbe n’a pas souhaité répondre aux questions du Vif/L’Express.

Les dépenses consenties au profit de Clifford-Chance empêcheront-elles la réalisation des études prévues ? On assure que non au cabinet Galant. « Ces études ont été effectuées, sont en cours ou vont l’être », y affirme-t-on, sans souhaiter en dire plus. Leurs résultats seront communiqués en même temps que les mesures structurelles promises par la ministre pour résoudre la problématique du survol. Avant la fin de l’année, espère-t-elle.

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