Les tracas de Dexia

LA VILLE DE GAND A DÉCIDÉ DE RETIRER L’ARGENT de ses investissements à court terme chez Dexia et la KBC, en guise de protestation contre les bonus trop royalement accordés à leurs dirigeants, quoique seuls les deniers des contribuables aient permis à ces deux banques de maintenir la tête hors de l’eau.

Ewald Pironet, Journaliste à Knack

Le total investi par la ville d’Artevelde se monte à quelque 30 millions d’euros, dont l’essentiel se trouvait sur un compte chez Dexia. Pour mémoire, le CEO de Dexia, Pierre Mariani, reçoit un salaire annuel fixe de 1 million d’euros, un bonus de 600 000 euros ainsi que quelques gratifications et autres indemnités d’une valeur de 418 000 euros. Alors que le patronat ne manque aucune occasion pour louer les bienfaits de la modération salariale ! Mais Jean-Luc Dehaene (CD&V), président de Dexia et ancien Premier ministre, prend fait et cause pour les bonus : « Je ne laisse pas dépendre la politique salariale de facteurs externes, sauf si ceux-ci ont été sanctionnés par des lois. » Si même le président de Dexia demande qu’on légifère en la matière, il ne faudra pas traîner les pieds trop longtemps.

Le fait que la Ville de Gand retire ses billes chez Dexia n’est cependant pas le souci majeur de la banque. Son problème fondamental est que la structure était mal barrée dès le départ. Le groupe financier a été créé en 1996 par la fusion du Crédit communal de Belgique et du Crédit local de France. Il est un acteur important sur le plan mondial dans le prêt de fonds à des instances publiques et, en Belgique, il fait fonction de retail bank à l’usage des particuliers. Dans notre pays, Dexia recueille donc l’argent de l’épargne et s’en sert pour accorder des prêts, mais une grosse somme – annuellement, quelque 20 milliards d’euros – est transvasée dans l’Hexagone, où le Crédit local de France finance des pouvoirs publics sur toute la planète. Or cette dernière activité est fortement défaillante depuis quelque temps et les pertes ne cessent de s’accumuler. Cela ne laisse présager rien de bon non seulement pour les actionnaires, mais aussi pour les pouvoirs publics belges, flamands, wallons et bruxellois, de même que pour les villes et communes. Ils ont tous amplement délié les cordons de leurs bourses pour sauver Dexia lors de la crise bancaire. Directement ou indirectement, ils ont injecté de l’argent frais dans Dexia : plus de 4 milliards d’euros au total. Cet investissement leur fait perdre actuellement 3 milliards d’euros. Mais les errements de Dexia n’ont rien de réjouissant non plus pour les contribuables qui, au bout du compte, devront payer les pots cassés.

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