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Les Red Flames servies bleues à Montpellier. J’y étais, tout est vrai

Rosanne Mathot
Rosanne Mathot Journaliste

Quelle cuisson, pour vos Red Flames ? Bleue, merci. Avec une défaite de 2-0, face aux Françaises, l’équipe féminine belge de football a poussé l’amitié à l’excès, ce vendredi. Les convenances réclament-elles vraiment que l’on s’écrase, quand on est invité à un match amical à l’extérieur ? Non. Sauf quand il y a un fantôme dans le stade. Là, ça change tout.

« Only Youuuuuuuuuuuuu, can make all this change in me. For it’s truuuuuuuuuuue, you are my destinyyyyyy… » 20h30. Vendredi. Au son des Platters, la présence du fantôme de « Loulou« , aka Louis Nicollin, le graveleux président du club de foot de Montpellier, décédé le 29 juin dernier, est palpable. Loulou, feu la terreur du sud, l’homme le plus macho de l’année 2010, le pionnier français du foot féminin, la grande gueule du ballon frenchy, le gars qui n’avait que « bite, con, cul » à la bouche, danse peut-être lascivement avec « ses filles », au son anabolisé des Platters. Ces derniers chantent l’amour fou, sur la pelouse récemment endeuillée. Le volume est à fond. La température aussi. La plage n’est pas loin. Il fait encore presque 30 degrés, ce vendredi soir, à Montpellier. C’est caliente. C’est chaud cacao. C’est le sud.

Les touristes belges, venus chercher bonheur au stade, ignorent – pour la plupart – absolument tout de la spectrale présence de Loulou, qui flotte pourtant bel et bien dans les tribunes, qui se love dans les courbes sportives du maillot des joueuses en bleu et qui trône même – en noir et blanc – sur un écran géant.

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« Loulou ? Connais pas ! « . Comment ça, « connais pas  » ?! L’homme qui traitait pêle-mêle les joueurs adverses de « tafioles », les journalistes de « grosses bites », le Loulou du grand sud, qui a fait fortune dans le ramassage des ordures et qui a étendu son empire de poubelles (l’empire Nicollin) jusque chez nous, les supporters belges ne le connaissent pas ?!

Faut dire qu’ils ont d’autres chats à fouetter. Peu habitués à la touffeur méditerranéenne, ils suent sang et eau, comme des fontaines. Certains gémissent même en flamand : « Amaï, amaï, amaï zeg ! T’is veel te warm, godverdomme !  » (Ohlala, ohlala, ohlala, dis ! ‘Fait beaucoup trop chaud, nom de tcheu ! ). Le maquillage noir, doré et rouge dégueule sur les joues fiévreuses. On a une pensée émue pour les Diablesses d’Ives Serneels qui semblent déboussolées par toute cette chaleur moite. Come OOOOOOOON, BELGIUM !

A la 15e minute, la Belgique y va. Décidée. Motivée. Sauf qu’elle se trompe de goal. C’est con, l’étourderie. Ou est-ce de la politesse ? On ne sait pas. Mais, Heleen Jacques marque contre son camp. Les Bleues exultent. Font une rapide prière à Saint-Loulou. Les supporters belges, par petites grappes flamandes de ci, petites grappes francophones de là, se prennent la tête sous le seul drapeau national piteusement épinglé contre un banc, comme un grand papillon crevé.

Pendant un bon moment, toutes les joueuses, les deux équipes confondues, ont l’air perdues. Elles restent quasi immobiles sur la pelouse, comme des figurines dans un album Panini. La gardienne Sarah Bouhaddi s’emmerde un peu. On le voit bien. Elle n’a qu’un arrêt à faire, à la demi-heure de jeu, face à l’étoile belge, Tessa Wullaert. C’est peu.

Seulement 10 000 spectateurs, dans un stade prévu pour en accueillir 32 900.
Seulement 10 000 spectateurs, dans un stade prévu pour en accueillir 32 900.© R.M.

En 2e période, les Françaises semblent remontées. Mais elles frappent trop haut, trop à gauche, trop à gauche encore. C’est la cata. Pitoyable. Par un inouï miracle, pendant le temps additionnel, les Bleues trouvent quand même le chemin du but. Elles doublent la mise, en toute fin de match, sur un but opportuniste de Catala. Mais personne n’est dupe. Dévotement, dans le camp français, tout en faisant la ola, on murmure fébrilement : « Loulou, merci pour tout ! » .

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