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Les prix à la caisse vont-ils continuer à baisser?

Stagiaire Le Vif

C’est du jamais-vu depuis vingt ans en Belgique : les prix à la caisse sont à la baisse depuis le mois de mars. Une baisse des prix qui pourrait perdurer et osciller entre 5% et 10% d’ici 5 ans. Des chiffres qui laissent néanmoins perplexes ceux qui estiment que toute prédiction dans ce domaine est hasardeuse. Explications.

Peter Vanderberghe, responsable de la communication de Comeos, la fédération du commerce et des services en Belgique, qualifie de préoccupante la baisse des prix. Déjà en 2013, l’évolution des prix des produits vendus dans le commerce était plus lente que l’évolution générale des prix, mais, d’après le shop index de Comeos, les prix à la caisse n’étaient pas encore dans le rouge comme à présent. Même en 2009, durant la précédente crise, la diminution ne s’était pas répétée sur une aussi longue durée. Selon Comeos, une inflation presque nulle et une très forte concurrence dans le secteur de la distribution sont à la base de cette dépréciation.

Le futur des prix du caddy

Certains analystes signalent que la baisse des prix va même s’accentuer dans les prochaines années. Pour Nielsen, les prix de votre caddy pourraient diminuer en moyenne de 5% dans les années à venir, surtout à cause de la forte concurrence dans le secteur de la distribution. D’autres pensent que cette dévaluation va être encore plus importante. Dans des propos recueillis par Het Laatste Nieuws et De Tijd, l’expert en bourse Patrick Roquas de Rabo Securities, estime que dans les cinq prochaines années, il y aura une réduction générale des prix de 5% à 10%.

Cependant, pour Peter Vanderberghe, avancer de tels chiffres avec certitude est tout simplement impossible puisqu’il y a plusieurs facteurs qui peuvent changer la donne, comme l’inflation ou les prix des fournisseurs. L’inflation de 2014 serait de 0.7% et de 1.3% pour 2015, contre 1.5% en 2013, d’après les prévisions.

Les prix à la caisse vont-ils continuer à baisser?

Les supermarchés hard discount prennent de plus en plus de place dans le secteur et augmentent chaque année de manière significative leurs bénéfices. Au point que leur part dans le chiffre d’affaires du segment de l’alimentation – 24.5 milliards d’euros en 2013- a atteint un chiffre record de 15.5%, selon le site Retail detail. De leur côté, crise oblige, les consommateurs cherchent les prix les plus bas.

Ces différents facteurs poussent le secteur à se livrer à une forte concurrence. L’installation progressive de l’enseigne hollandaise Albert Heijn ne fera que renforcer cette tendance en Belgique, selon Nielsen. L’ouverture d’une succursale de cette entreprise fait en effet baisser de 2% en moyenne les prix dans l’entourage immédiat du magasin.

Peter Vanderberghe a pour sa part un avis plus mitigé. Car si la présence de l’entreprise hollandaise pousse les autres acteurs à être plus concurrentiels, elle ne s’en est pas moins adaptée à la réalité belge et ses prix ne sont pas nécessairement les plus avantageux.

Selon un document du SPF Économie, les prix dans les grandes surfaces belges seraient en moyenne 10,6% plus chers qu’en Allemagne et 7,0% de plus qu’en France. L’écart grimpe à 12,5% par rapport aux Pays-Bas, 7,5% de plus qu’en Allemagne et 8,6% de plus qu’en France pour les produits alimentaires.

« Si dans certains cas les prix sont plus élevés qu’ailleurs pour le consommateur, les coûts le sont aussi ! », précise Thierry Van der Haeghen, directeur général de l’Association belgo-luxembourgeoise des fabricants de produits de marque, dans une analyse de Retail Detail.

L’angoisse des commerçants

Les commerçants montent au créneau et craignent pour leurs marges et une certaine précarisation du marché. Ils demandent des mesures qui leur permettraient d’être plus concurrentiels. Ils souhaitent, par exemple, que le nouveau gouvernement réduise les coûts salariaux. Dans le livre blanc du commerce, publié par Comeos, on peut lire que les coûts de travail sont entre 10% et 25% plus élevés que dans les pays voisins. Cependant, selon le Conseil central de l’économie:  » le prix de vente aux consommateurs ne doit pas être surestimé. La masse salariale, qui représente au maximum 15% du prix de vente, ne peut pas expliquer à elle seule une différence de prix de 2 ou 3% entre la Belgique et les Pays-Bas ». D’autres facteurs comme des normes plus exigeantes en matière de sécurité alimentaire et environnementale, des politiques tarifaires différenciées appliquées par certains fournisseurs internationaux, ainsi qu’un taux de TVA standard plus élevé que les pays voisins expliqueraient aussi cet écart.

« Même si à court terme le consommateur bénéficiera de prix plus bas, les effets négatifs à long terme seront substantiels », estime l’Association belgo-luxembourgeoise des fabricants de produits de marque dans une publication de Retail Detail. L’organisation craint qu’une baisse des prix déclenche une diminution de l’offre des produits, un manque d’innovation et de dynamisme sur le marché, de même qu’un impact sur les revenus de l’État et sur l’emploi.

Selon Myriam Delmée, vice-présidente de la SETca à la FGTB, la forte concurrence se répercute déjà dans les conditions de travail. Dans des propos recueillis par Le Soir, elle explique que les entreprises du secteur font des économies en augmentant le nombre de scanning à la place de caissières chez Aldi ou Lidl ou en favorisant les jobs étudiants plutôt que les contrats de plus longue durée.

De leur côté, Peter Vanderberghe explique qu’entre 2009 et 2012 les commerçants ont perdu 25% de leur marge par rapport à la période 2005-2008. Des marges qui ne sont pourtant pas si différentes par rapport aux pays voisins selon le SPF Economie. De quoi nourrir encore davantage les inquiétudes des commerçants.

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