Jonathan Holslag

« Les politiciens de ce pays ont un avis sur tout, mais il y a peu de sujets sur lesquels ils ont une véritable vision »

Jonathan Holslag Jonathan Holslag est professeur en relations internationales à la VUB.

En matière d’énergie, de mobilité ou de climat, de nombreux politiciens ne ratent pas une occasion de présenter des points de vue forts. Mais proposer une politique cohérente : attention!

Au parlement, on entend Raoul Hedebouw faire l’éloge des brosseurs pour le climat, tandis que le PTB monte au créneau pour le maintien des places de parking gratuites devant les gares. Parce que le réchauffement de la planète, souligne Hedebouw, est causé par « les multinationales » et non par « les travailleurs en voiture ». Quel raisonnement étrange. Et cela pour un parti qui se targue d’être intègre.

C’est la maladie de la politique dans ce pays : on a un avis sur tout, mais une vision réelle sur peu de sujets, et encore moins une stratégie.

Il en va de même de l’autre côté du spectre politique, où l’on trouve bravache de minimiser la contribution humaine au réchauffement climatique. On n’hésite pas à taper sur les soixante-huitards vu que de toute manière le politiquement incorrect se vend bien de nos jours.

Quelles qu’en soient les causes, le réchauffement climatique est un fait. Notre société doit aussi apprendre à y faire face : sur le littoral, par exemple, mais aussi ailleurs, avec des fleuves qui deviennent plus capricieux, la sécheresse qui frappe plus souvent et l’agriculture qui souffre. Mais dès que les choses se concrétisent et qu’il faut parler d’argent, les braillards sont aux abonnés absents.

Il en va de même pour notre énergie. Combien de fois ai-je entendu le président de la N-VA lancer des idées sur l’énergie nucléaire : ne faudrait-il pas de nouvelles centrales nucléaires ? C’est bien pour énerver les autres partis et souligner la différence avec Groen, mais le plus grand parti flamand pourrait-il faire preuve d’un peu de fermeté? Mener une véritable politique énergétique? Quelqu’un ?

Personnellement, je ne sais pas du tout si nous pouvons nous passer de l’énergie nucléaire dans notre pays, mais ce que fait la N-VA, c’est tourner autour du pot. Au cours de la législature précédente, aucune décision n’a été prise. Les choix et les investissements sont reportés et nous paierons la facture plus tard.

Et puis il y a la mobilité. Tandis que le PTB défend les parkings gratuits devant les gares, un bourgmestre de Lijst De Decker plaide en faveur de parkings subventionnés à Tirlemont. Ce parti se qualifie de libertaire, jusqu’à ce que la réalité prenne le dessus.

Ces plaidoiries de gauche et de droite sont symptomatiques d’un manque de courage pour confronter la population à des questions douloureuses. Si les gens continuent d’opter pour les boutiques en ligne et les grandes chaînes et contribuent ainsi à l’agonie de l’économie locale dans les villes, ont-ils le droit de réclamer des places de parking gratuites dans les gares parce qu’il n’y a plus de travail en ville ?

N’est-ce pas faire preuve de perversité que de vouloir continuer à vivre « à la campagne », mais d’exiger de la société qu’elle utilise l’argent des impôts pour financer des places de parking gratuites près des gares, ainsi que les équipements d’utilité publique beaucoup plus coûteux pour les maisons de lotissement ?

Qu’attendent les libéraux et les libertaires pour lutter contre cette inefficacité incroyable, cette défaillance du marché ? Où sont les vrais socialistes qui, au lieu de se résigner à l’exode économique des petites villes, se battent ? Qui ne blâment pas les multinationales, comme s’il s’agissait d’engins extraterrestres propulsés au krypton, mais qui indiquent au « travailleur » dépensier les vrais choix à faire ?

Voilà qui serait courageux : des politiciens qui disent qu’il n’y a pas de gratuité

Voilà qui serait courageux : des politiciens qui disent qu’il n’y a pas de gratuité et qu’on pourrait peut-être faire un peu plus d’efforts pour stimuler l’activité locale au lieu de créer des stationnements subventionnés dans les gares. Ils feraient alors ce qu’ils sont censés faire : montrer le chemin au troupeau, au lieu de le suivre en bêlant.

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