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Les PMS intégrés dans les écoles ?

Soraya Ghali
Soraya Ghali Journaliste au Vif

Le Pacte d’excellence se désintéresse-t-il des centres psycho-médico-sociaux ? Des agents s’inquiètent de l’avenir de leur métier, sur lequel la ministre de l’Education va se pencher dans les prochaines semaines.

Quand, en avril 2015, Joëlle Milquet, CDH et alors ministre de l’Education, rentre d’une visite d’étude au Québec, elle passe en revue ce qui l’a enthousiasmée dans cette contrée où les élèves sont à peu près les seuls au monde, avec les Finlandais, à résister au raz de marée des pays asiatiques dans les enquêtes Pisa qui évaluent, parmi une cinquantaine de pays, les compétences en lecture, en sciences et en mathématiques des élèves de 15 ans. « Là-bas, chaque établissement a, en interne, une équipe hors enseignants et hors direction composée de logopèdes, de conseillers en orientation, d’experts des troubles de l’apprentissage, souligne-t-elle. Au lieu d’avoir des équipes pluridisciplinaires en dehors de l’école, le Québec les intègre à l’intérieur des établissements, ce qui est une force fabuleuse. Quand elles détectent un problème le 30 septembre, elles lancent un plan d’intervention. » Joëlle Milquet trouve aussi que « des structures extérieures à l’école, comme aujourd’hui chez nous, débordées, travaillant avec autant d’élèves, c’est peu opérant. » A plusieurs reprises, elle va répéter ces propos, parlant de « totalement réinventer notre système de fonctionnement avec les PMS ».

Que faut-il comprendre ? C’est le grand point d’interrogation. Mais, en mal de reconnaissance et de visibilité, la profession a perçu son discours comme une provocation. « Ce qui se fait au Québec n’a rien à voir avec ce que nous faisons, considère Roseline Magnée, directrice du Centre PMS de Tamines-Gembloux (Namur). Nous ne faisons pas de logopédie. Nous ne sommes pas non plus un service thérapeutique. » Les agents s’inquiètent d’autant plus que, dans les documents préparatoires produits dans le cadre du Pacte d’excellence, ils ont été identifiés comme une « thématique », mais aucun « portefeuille d’initiatives » n’a été dégagé. « Pas un seul groupe de travail n’a abordé spécifiquement les PMS », regrette un autre directeur qui souhaite garder l’anonymat, alors que ceux-ci étaient conviés à participer aux débats. « Nous sommes un corps vieillissant et frileux. Au final, notre implication et notre participation à la réflexion se révèlent maigres. »

Beaucoup redoutent un projet tout prêt dans les cartons. Ils devinent qu’il s’agit de les intégrer dans les écoles même. Interrogé, le cabinet de Marie-Martine Schyns, la nouvelle ministre de l’Enseignement, reste flou sur la réforme, mais annonce que les centres feront très vite l’objet d’une « expertise spécifique », dont doivent sortir des « propositions concrètes ». Pratiquement, à quoi s’attendre ? Le cabinet ne veut évidemment pas « préempter le résultat de l’expertise, notamment sur le rapatriement dans les établissements scolaires ». La prudence ne doit pas être jugée comme « un recul par rapport aux propos de Joëlle Milquet », précise l’entourage de celle qui lui a succédé.

Point sensible : leur indépendance

La règle oblige déjà l’école à fournir un local aux CPMS dès qu’elle accueille plus de 500 élèves. Pour Roseline Magnée, « quand une permanence PMS est organisée quasi quotidiennement, notamment dans les gros établissements, cette situation n’est pas idéale. S’ils nous connaissent, les élèves et leurs familles nous assimilent très souvent à l’équipe éducative. Nous sommes, à leurs yeux, ses  »complices ». » Le scénario de loger les centres PMS dans l’école fait grincer les dents. Point sensible : leur indépendance. Ils craignent de devoir agir sous l’autorité des directions d’école. Même si le sujet est tabou, sur le terrain, les relations peuvent être tendues. Des témoignages rapportent la pression qu’exercent des directeurs sur des agents pour « entériner » la relégation des mauvais élèves, des cas difficiles, et soulager ainsi leur institution scolaire. En zone rurale, des chefs d’établissement s’élèvent contre l’avis d’orientation d’élèves vers l’école spécialisée, parce qu’ils craignent une fermeture par manque d’effectifs. Quand les PMS ne sont pas cantonnés dans un rôle de transmetteurs d’information.

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Le nombre de Centres PMS en Fédération Wallonie-Bruxelles. Ils emploient 1 535 agents et opèrent avec un budget de 90 millions d’euros (chiffres 2014).

Autre inconnue : les moyens pour redéployer le millier d’agents sur les sites scolaires. A Tamines-Gembloux, ils se partagent entre 48 établissements. Avec deux psychologues, deux assistants sociaux et une infirmière, le centre a la charge de 4 600 écoliers. Le centre de Wavre 3, où l’équipe compte un directeur, trois conseillers pédagogiques, une infirmière et deux assistants sociaux, est censé veiller sur plus de 5 300 élèves. « Je cours beaucoup. Je fais jusqu’à cinq écoles par jour », déplore un autre directeur de PMS, exerçant en province de Hainaut. Même topo, encore, à Charleroi, où dix agents supervisent 26 établissements, dépassant les 10 000 élèves. Ce sont les normes d’encadrement en vigueur depuis… 1962. Ils ne cachent pas devoir faire le tri parmi leurs missions. « Nous n’y parvenons plus, soupire ce directeur. Alors, nous privilégions le dépistage des difficultés d’apprentissage pour les élèves repérés par les enseignants, et l’orientation scolaire et professionnelle. »

Tout le monde a eu affaire à un agent PMS. Et l’expérience n’a pas forcément été chaque fois positive. « Avant, les PMS, c’était des tests, encore des tests et toujours des tests. Nous allions dans les écoles avec des valises de tests », raille Roseline Magnée. Selon les textes officiels, ils doivent veiller à mettre l’élève dans les conditions de réussite, favoriser les moyens qui le feront progresser, et l’aider dans son orientation scolaire. Leur mandat s’articule en huit axes : les agents sont aussi bien chargés de la prévention de la santé que du repérage des difficultés scolaire ou du soutien à la parentalité… Mais leurs missions se sont ouvertes à d’autres tâches de plus en plus complexes, à d’autres publics de plus en plus fragiles. « Régulièrement, on nous donne des missions supplémentaires, mais sans jamais fixer de priorités parmi elles, souligne ce directeur hainuyer. La lutte contre le harcèlement scolaire, par exemple, ajoutée à la prévention du radicalisme… »

Les inquiétudes des agents renvoient à un débat de fond : faut-il resserrer leurs missions et surtout, enfin, revoir leurs priorités ? Au cabinet Schyns, on explique en tout cas que l’expertise à venir « ne débouchera pas sur un  »on ne change rien » ».

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