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Les grandes marques foulent l’astro

Les clubs belges de hockey sur gazon parviennent à débusquer les partenaires financiers nécessaires à leur développement. Qu’est-ce qui motive ces derniers à (s’)investir dans ce sport en pleine évolution et qui, sans conteste, « a le vent en poupe », comme le susurrent avec délectation les présidents de clubs ?

La petite entreprise du hockey ne connaîtrait-elle pas la crise ? Alors que celle-ci pousse les marques à rogner dans leur budget spon-soring, ce sport est en plein boom. Un simple exemple : « Le Léopold Club affiche une croissance de 5 à 10 % par an », se réjouit son président, Bruno Lescot. Ses confrères abondent dans le même sens. Et mesurent tous l’importance de désigner en interne des responsables marketing pour attirer des par-tenaires institutionnels.

Petercam, CBC, Puilaetco Dewaay, Belfius, BMW, Mitsubishi, etc. Les marques prestigieuses s’intéressent au hockey. Banques, assurances, téléphonie, con- cessionnaires automobiles cherchent à marquer de leur empreinte un sport en pleine mutation. « Il y a quelques an-nées, nous n’étions pas pris au sérieux, remarque Xavier Caytan, président du Waterloo Ducks. Aujourd’hui, le hockey a pris du corps et a convaincu les sponsors. » Pourquoi, de naïfs, les dirigeants de clubs sont-ils devenus convoités ? Il y a sans conteste l’effet JO 2008, amplifié par l’édition de 2012. Mais pas seulement. Tour de Belgique, non ex-haustif mais révélateur, des clubs et de leurs (plus ou moins) nouveaux partenaires et de leurs motivations : du « win-win », assure-t-on d’un côté comme de l’autre.

Nouveaux venus et révision à la hausse Qu’ils démarchent ou qu’ils soient démarchés, les clubs voient depuis quelques années la liste de leurs sponsors s’allonger. A l’image du Daring (Molenbeek) qui a ramené dans son escarcelle pas moins de cinq nouveaux sponsors, en plus des 50 déjà présents, dont Belfius pour l’école des jeunes et BMW pour les équipes premières. Quelque 250.000 euros ont ainsi été rassemblés par le club pour la saison 2012-2013.

Dans le Brabant wallon, Petercam, jusque-là partenaire exclusif de La Gantoise a rejoint le club du Waterloo Ducks après une analyse fine du marché. C’était en février dernier. Le groupe financier, devenu depuis lors le sponsor principal des équipes premières, y investit de 20.000 à 30.000 euros par saison. Il faut dire que le « Watducks », champion de Belgique, attise les convoitises ; pour cette nouvelle saison, VOO et Mitsubishi se sont joints aux partenaires. « Ils cherchaient un ancrage et de la visibilité dans le Brabant wallon », justifie Xavier Caytan, président.

Dans les clubs ucclois du Racing et du Léopold, pas de nouveaux venus mais une offre revue à la hausse de la part des sponsors principaux. Au Léopold, CBC, partenaire historique et omniprésent dans ses projets de développement, a revu à la hausse le contrat qui le lie au club le plus titré du pays. « CBC a répondu à nos ambitions », se réjouit Bruno Lescot. Cela étant, l’investissement paraît encore dérisoire : 30.000 euros sur les 300.000 euros de sponsoring amassés par le club. La banque a par ailleurs plus d’un orteil dans le hockey puisqu’elle sponsorise aussi, depuis peu, l’Orée, club nouvellement promu au sein de l’élite, et l’Ombrage, pour des montants inférieurs.

Même son de cloche au Racing pour qui Puilaetco Dewaay (aussi sponsor de La Raquette de Wavre) a… quadruplé son budget, qui atteint désormais la somme de 50.000 euros. « Les contrats qui nous lient vont croissant », déclare Amaury de Laet Derache, administrateur délégué de la banque privée. Au total, le montant du sponsoring des « Rats » se chiffre à 150.000 euros par année. Le club a toutes les raisons de voir l’avenir en rose : il a été « démarché par une société intermédiaire qui cherchait à placer des sponsors désireux de reprendre la main », se réjouit le président Thomas François.

Engagé à l’échelle nationale dans le sponsoring du hockey, BMW entend « aller au-delà » du financement. La marque automobile est active dans le recrutement et la formation des jeunes talents dans tout le pays, au travers de la BMW hockey school notamment, organisée depuis deux ans et qui regroupe les talents récemment découverts. « Nous voulons nous impliquer dans le hockey et ne pas nous limiter à un partenariat financier », explique Christophe Weerts, corporate communications manager. Telle semble être la motivation de nombreux sponsors, désireux de faire partie de « la grande famille du hockey belge ».

Vecteur de valeurs

L’association au label « hockey » est revendiquée par les partenaires financiers. Et pour cause, il porte les valeurs d’un sport familial, respectueux de l’autre, de fair-play, de solidarité, à taille humaine, éducatif et social, dynamique, combatif, mixte et jeune.

Chaque partenaire met en exergue le caractère auquel il entend associer sa marque. Ainsi Puilaetco, qui gère la « transmission harmonieuse de pa-trimoines de génération en génération », se retrouve principalement dans le caractère familial de ce sport . « Son public est encore à taille humaine, comme CBC » (300.000 clients), assure-t-on du côté de la filiale francophone de la banque. Famille, confiance et fidélité sont en effet les leitmotiv de CBC, une « banque refuge lors d’une crise qu’elle a traversée sans trop de difficulté ». Notons à cet égard que CBC et KBC ont une politique de sponsoring indépendante. KBC ne sponsorise, pour le moment, aucun club de hockey.

« Le hockey correspond à la philosophie de l’entreprise, à l’image qu’on veut en donner et au message que nous souhaitons faire passer auprès de nos clients mais aussi de nos actionnaires et autres parties prenantes », explique Oriane della Faille, chef du service marketing de la gestion privée de Petercam. La banque privée loue l’esprit d’équipe et le sens de l’effort pour atteindre l’excellence. « Les analogies avec le monde du travail sont pertinentes », ajoute-t-elle. « Nous louons des valeurs communes : la performance et le dynamisme », poursuit Christophe Weerts.

Même s’il se démocratise à grande vitesse, le hockey reste un sport confidentiel, ce qui permet à ses sponsors de se positionner localement. CBC comme Belfius revendiquent toutes deux cet ancrage proche du client. C’est par ce biais que Belfius compte redorer son blason. « Nous avons la volonté d’améliorer notre présence auprès d’un public jeune », explique la banque. Le projet global Belfius local team spirit a été lancé à cet effet : 60 clubs – tous sports confondus – bénéficient aujourd’hui de leur apport financier.

Chez BMW, l’ancrage régional, à l’initiative de concessionnaires locaux, s’ajoute à l’implication nationale de la marque. « Nous revendiquons une association étroite, un rapprochement global qui nous permet d’associer notre marque à l’image que le hockey véhicule. En échange, nous lui donnons de la visibilité par divers événements, explique Christophe Weerts. Exemple : chaque été à Knokke, BMW organise un tournoi de beach hockey avec des joueurs confirmés de nations différentes.

Retour sur investissement ? Les budgets de fonctionnement sont encore relativement bas et les enjeux financiers incomparables avec ceux du football ou du basket. C’est loin d’être un inconvénient pour les dirigeants qui tirent profit de la modestie d’un sport encore fortement amateur et jugé « accessible » par ses partenaires. « On n’est plus dans un geste de mécénat ou de philanthropie. Les entreprises ont des ambitions de retour », fait valoir Xavier Caytan. « Le retour sur investissement est difficile à mesurer », assure-t-on prudemment chez Puilaetco Dewaay. Christophe Weerts se veut plus modéré : « Le retour sur investissement est ce que l’on en fait, tempère-t-il. Il ne suffit pas d’investir quelques dizaines de milliers d’euros. Il faut accompagner un sport ambitieux dans une évolution commune. »

« La visibilité dont jouit le hockey en général et le Watducks en particulier permet un retour rapide sur investissement », affirme Xavier Caytan. Une analyse confirmée par Oriane della Faille : « Les enjeux financiers ne sont pas colossaux, ce qui convient à la grosse PME qu’est Petercam. » Selon eux, le retour sur investissement est rapide et important. Sandra Circhillo, responsable marketing chez CBC, l’estime « excellent ».

Visibilité matérielle, médiatique et culture de la performance

Le hockey grandit et c’est prouvé par l’augmentation exponentielle de ses membres. La fédération en compte 30.000 à ce jour alors qu’ils n’étaient que 13.000 il y a 12 ans ! « La popularité grandissante a été primordiale dans notre décision de nous engager », soutient Oriane della Faille. Plus le nombre de membres augmente, « plus le public cible devient intéressant », analyse Jacques Lechat, président du club de Louvain. « Plus le club grandit, plus il est attractif », confirme Gérald Cosyns, président du Daring.

Les logos sur les tee-shirts, les panneaux publicitaires et les fanions sont d’autant plus efficaces qu’ils s’adressent à un large public. Le retentissement des JO a d’ailleurs dopé les affiliations ainsi que l’attention des médias pour un sport fort peu présent dans la presse. La visibilité médiatique est « un argument de vente », soutient Jacques Lechat. Les résultats sportifs font donc aussi partie de l’équation. Ces investissements, garantissant infrastructures, encadrement et professionnalisation, sont indispensables pour que les clubs atteignent l’excellence sportive.

Le public « haut de gamme »

Les nombreux membres et parents de membres, patrons de PME, chefs d’entreprises et indépendants, constituent un public particulièrement séduisant. Si certaines enseignes l’avouent du bout des lèvres, d’autres n’en font guère mystère : les amoureux du hockey sont « une clientèle potentielle ». « Ce partenariat nous permet d’avoir une très belle visibilité et des contacts suivis auprès d’un public haut de gamme », explique Sandra Circhillo. « Nous vendons l’image du public huppé que constituent nos 2.000 membres », admet Bernard Lescot. CBC, présent dans les communes bruxelloises de Uccle et de Woluwe, convoite « les zones de chalandise que sont ces viviers », selon Didier Flahaut, responsable sponsoring à l’Ombrage. « Petercam ne vient pas chercher Monsieur Tout-le-Monde.

Notre positionnement géographique, entre Lasne et Waterloo, joue certainement », admet Xavier Caytan. La banque privée confirme d’ailleurs vouloir toucher un « public aux revenus élevés, susceptible d’avoir recours à (leurs) services ».

Le « sport-business »

Si les motivations sont pertinentes, de nombreux partenariats naissent de rencontres au bord des terrains. « Nombre de nos collaborateurs et clients sont déjà investis dans le hockey, ce qui nous permet d’opérer aisément des synergies », explique Oriane della Faille. Petercam organise ainsi des journées de rencontre entre membres des entreprises sponsors et leurs familles et les équipes premières soutenues.

A côté des événements ponctuels organisés par les sponsors, les grands clubs ont développé des « business clubs ». Ils rassemblent régulièrement les membres désireux de développer leur networking. Les sponsors y bénéficient d’une belle tribune puisqu’ils y interviennent selon leurs thématiques d’expertise. « C’est un lieu d’échange de cartes de visites et de business en B to B », motive Gérald Cosyns.

Certes, le hockey a besoin de partenaires financiers pour assurer son développement. Tout semble mis en place, dans les clubs, pour attirer les investisseurs po-tentiels qui y trouvent leur compte. « Nous sommes en pourparlers avec d’autres clubs pour la saison prochaine », dévoile-t-on d’ailleurs chez CBC.

Valentine Van Vyve

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