Walter Pauli

« Les garages aussi ont un plafond de verre »

Walter Pauli Walter Pauli est journaliste au Knack.

Si beaucoup d’entreprises et d’organisations ne discriminent pas les femmes à dessein, le préjudice qu’elles subissent n’en est pas moins réel. Ainsi, seule une voiture de société sur quatre est conduite par une femme.

Ces dernières décennies, les femmes ont rattrapé une bonne partie de leur retard sur les hommes. Dans certains cas, elles ont même inversé les rôles. Il y a plus de filles que de garçons qui étudient à l’université et plus de femmes que d’hommes obtiennent un doctorat.

Si beaucoup d’entreprises et d’organisations ne discriminent pas les femmes à dessein, le préjudice qu’elles subissent n’en est pas moins réel.

Malheureusement, il existe toujours des contrexemples. Une enquête de la société de ressources humaines SD Worx auprès d’employés et de cadres démontre noir sur blanc que l’écart salarial entre les hommes et les femmes demeure très important : pas moins de 20%. Cet écart se creuse encore quand on tient compte d’avantages extra-légaux, tels que les défraiements forfaitaires et les voitures de société. Dans ce cas, les femmes gagnent même 28% de moins que les hommes.

Si beaucoup d’entreprises et d’organisations ne discriminent pas les femmes à dessein, le préjudice qu’elles subissent n’en est pas moins réel. Généralement, un employé bénéficie d’avantages extra-légaux après une négociation individuelle. Au cours d’un entretien de ce genre, il faut se montrer assertif : un employé doit oser demander ce qu’il ou elle souhaite, et rendre cette demande acceptable auprès de la partie adverse. Les personnes qui ont souvent changé d’emploi ou de fonction sont mieux entraînées à ce jeu de persuasion et obtiennent de meilleurs résultats, et ce surtout en matière de voitures de société. Seule une voiture de société sur quatre est conduite par une femme. Il faut croire que le garage a un plafond en verre.

Le tax shift est un terme trompeur

Les maudites voitures de société sont à nouveau vivement critiquées. On en débat depuis quelques années, et entre-temps chacun a une opinion sur le sujet. Le nouveau président du sp.a, John Crombez, souhaite les supprimer alors que le président de la N-VA Bart De Wever veut les garder. Les employés qui bénéficient d’une voiture de société préfèrent la conserver, car acheter une voiture soi-même coûte toujours plus cher. Depuis longtemps, les désavantages – les embouteillages et la pollution – pèsent pourtant plus lourd que leur seul avantage, à savoir que les voitures de société sont une forme bon marché de salaire, surtout pour ceux qui gagnent déjà assez bien leur vie.

Cependant, cette situation ne changera pas. La voiture de société ne fera pas partie du tax shift. Il s’agit là d’un terme trompeur, car il apparait petit à petit qu’il y aura très peu de shifts. Tous les partis et les partenaires sociaux freinent le processus: évidemment que le tax shift devait déplacer toutes sortes de taxes, mais pas au prix de ne serait-ce qu’un centime de leurs militants. Et certains employeurs estiment qu’en premier lieu le tax shift doit faire baisser les charges des entreprises.

Le week-end dernier, l’Open VLD a même réussi à faire passer les propriétaires de biens mis en location pour la « classe moyenne » si pas comme « revenus moyens ». Gwendolyn Rutten sait très bien que si elle défend les bailleurs, elle protège des personnes à l’aise financièrement. Mais elle s’en moque. Les gouvernements Michel et Bourgeois permettent non seulement aux bailleurs d’indexer les loyers et d’échapper au tax shift, il se pourrait également que les locataires paient plus de garantie qu’aujourd’hui. Pourquoi ? Que se cache derrière « ce projet » ? Le souci de créer de l’emploi ? D’une fiscalité plus juste ?

11 millions de socialistes potentiels

La gauche déploie le même genre d’astuces. Le tout nouveau président du sp.a, John Crombez, dépasse le PTB à gauche quand il prétend que le saut d’index n’est pas nécessaire si on prend l’argent où il est : aux dix (10!) familles les plus riches de Belgique. D’un seul coup, il a créé onze millions de socialistes potentiels : tous les Belges moins dix compatriotes.

Le tax shift a été lancé comme un projet ambitieux aux objectifs justes partagé par la majorité et l’opposition. Le débat a dégénéré en affaire de défense d’intérêts particuliers et de politique politicienne. C’est une mauvaise nouvelle aussi bien pour les finances de l’état que pour le contribuable, la circulation et l’environnement. Et par-dessus le marché pour les femmes.

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