« Les commentateurs sportifs peuvent dire des bêtises sans rendre de comptes »

« Les grands perdants de la semaine de foot écoulée, ce sont les commentateurs sportifs professionnels, écrit notre confrère de Knack, Dirk Draulans, au sujet des critiques à l’égard de Marc Wilmots.

C’était quoi tous ces commentaires après la perte sans gloire des Diables Rouges contre l’Italie ? Tout à coup, Marc Wilmots était la risée du monde du foot belge : tactiquement trop limité pour composer une équipe efficace avec le talent du contingent actuel. Incapable de sortir le meilleur de son équipe. Soudain, tout le monde savait quoi faire. C’est parfaitement admis au café et à la maison, mais la semaine dernière même les médias sérieux ont mis un point d’honneur à sauver le football belge de la ruine.

La VRT a demandé à ses commentateurs sportifs de composer un onze type pour les Diables Rouges. Ces derniers n’ont pas hésité à reléguer le milieu du terrain Axel Witsel sur le banc, alors qu’il a marqué contre l’Irlande et qu’il a été élu homme du match ! Dans les autres médias aussi, on a radoté pendant des jours à propos de la tactique de Wilmots. L’attaquant Romelu Lukaku n’était pas assez vif et devait être remplacé par Michy Batshuayi, alors qu’il a marqué deux beaux buts contre l’Eire. Quant à l’ailier Yannick Carrasco, il fallait absolument le faire jouer dès le coup d’envoi grâce à sa campagne magnifique avec l’Atletico Madrid. C’est pourtant le Diable qui a le moins bien joué contre l’Irlande et il a d’ailleurs été remplacé après la mi-temps.

La défense était un point faible depuis quelque temps, depuis le forfait du coryphée Vincent Kompany (qui ne joue pas toujours sans fautes non plus). Thomas Vermaelen aurait trop peu joué à Barcelone et manquerait de rythme. Comparé à ses coéquipiers, Thomas Meunier joue dans un petit club faible (le champion de Belgique, le club de Bruges) et ne pèse pas assez lourd. Vermaelen et Meunier ont très bien joué contre les Irlandais – l’assist du deuxième a même entraîné le but de Witsel.

La semaine dernière, on a écrit des pages et des pages pour savoir si Kevin De Bruyne, pour beaucoup le meilleur joueur belge de sa génération, devait rester sur le côté. Si le sélectionneur français Didier Deschamps osait laisser des vedettes comme Paul Pogba sur le banc, Wilmots aussi devait en être capable. Une prétendue fuite du camp belge a lancé l’option « Debruyne sur le banc ». Si c’est vrai, ce qui n’est pas dit, car certains journalistes citent une fuite pour donner plus de poids à leur position, on peut aussi voir une blague du camp belge : « Comment va-t-on distraire et occuper les médias ? Debruyne sur le côté ? Excellente idée !!! »

On part du principe que les auditeurs et les lecteurs suivront, balivernes ou pas. Finalement, il y a aussi des gens qui lisent des articles à propos d’enlèvements par les extraterrestres et de pieuvres géantes à deux têtes et seize pattes qui entraînent des voiliers vers le fond de la mer. Tout cela n’a aucun rapport avec l’info, c’est de la thérapie occupationnelle – la norme de plus en plus de médias, même de journaux et chaînés censés informer sérieusement.

Les commentateurs sportifs peuvent sortir toutes les bêtises qu’ils veulent sans devoir rendre de comptes, car après coup, on peut toujours inventer une explication

Les commentateurs sportifs peuvent sortir toutes les bêtises qu’ils veulent sans devoir rendre de comptes, car après coup, on peut toujours inventer une explication. Et il y en a certainement qui pensent (et qui avancent) que leurs interventions journalistiques ont influencé le choix de Wilmots d’adapter son système tactique. Beaucoup de gens, et certainement dans les médias, aiment se rendre plus intéressants qu’ils ne le sont.

Et maintenant en route vers la Suède. Je suis curieux de voir ce que les médias vont inventer pour se rendre intéressants et occuper leur public. Un conseil : insinuer que Marc Wilmots a planifié la piètre prestation contre les Italiens, qu’il a demandé à ses joueurs de freiner leurs ardeurs pour ambitionner une meilleure position pour le deuxième tour. De quoi écrire des pages entières.

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