© Capture d'écran Soirmag.be

Le Soir Magazine riposte à la censure de son édition papier

Le Vif

L’hebdomadaire Le Soir Magazine ne sera pas distribué dans les kiosques, mercredi, à la suite d’une décision judiciaire, a indiqué Daniel Van Wylick, directeur éditorial du groupe Rossel à l’agence Belga.

Une ordonnance du tribunal des référés a interdit la publication d’une enquête réalisée par l’hebdomadaire sur le jugement d’un procès dans lequel un membre de la famille d’une personnalité publique a été cité en tant que victime. La direction du Soir Magazine a décidé de proposer à ses lecteurs une version adaptée de son magazine en format PDF et distribuera une édition papier dès vendredi. « Cette interdiction de publication concerne une page sur le jugement d’un procès qui touche à la vie privée d’un membre de la famille d’une personnalité publique cité dans ce procès en qualité de victime », a précisé le directeur éditorial du groupe Rossel à l’agence Belga.

« Nous avons fait l’objet, mardi soir, d’une ordonnance du tribunal des référés exigeant, par voie de huissier et de manière unilatérale, l’interdiction de publication. Cela signifie que nous n’avons pas pu être entendus et que cette ordonnance se base sur d’éventuelles fuites ou sur base d’éléments qui n’ont pu être vérifiés. »

Le groupe Rossel a déjà organisé la riposte en proposant une version adaptée en format PDF de son hebdomadaire sur internet ou sur le site internet du magazine.

« Nous avons entrepris comme réaction principale de mettre la version adaptée à disposition de nos lecteurs sur internet », a confirmé Daniel Van Wylick. « Par ailleurs, nous avons décidé de réimprimer dans la nuit de mardi à mercredi, une nouvelle édition de notre magazine sur papier. Cette version sera distribuée dans toutes les librairies dès vendredi. »

Les libraires qui avaient déjà reçu un stock de magazines contestés par la justice, ont été informés de la situation, a encore indiqué le directeur éditorial du groupe Rossel. Toute vente de la version censurée du magazine fera l’objet d’une astreinte financière très importante.

« Contre toute forme de censure pour tout travail journalistique et tout support »

L’Association des Journalistes Professionnels (AJP) a réagi : « Nous avons toujours défendu l’interdiction de toute forme de censure pour tout travail journalistique et tout support », a rappelé Jean-François Dumont, secrétaire général adjoint de l’AJP.

Comme le rappelait l’AJP lors d’une autre affaire de censure préalable, opposant la SA Moulinsart à la RTBF, l’article 25 de la Constitution belge garantit la liberté de la presse. Il se termine en mentionnant explicitement : « la censure ne pourra jamais être établie ». L’interdiction de censure a donc une base constitutionnelle.

Dans cette affaire, la Belgique avait finalement été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme car l’ordonnance rendue à l’époque en extrême urgence manquait de base légale pour appliquer la censure. « Le principe a donc été renforcé par la décision de la Cour et pas uniquement pour les médias audio-visuels », précise l’AJP. « En Belgique, le système s’appuie sur la ‘répression’ a posteriori des délits (de presse). Tout contrôle a priori de l’information, avant diffusion ou publication, qu’il s’agisse d’un contrôle gouvernemental ou judiciaire, est interdit », peut-on encore lire dans un dossier consacré par l’AJP sur le sujet. « Nous n’exigeons certainement pas l’immunité pour les journalistes. La principe de responsabilité pour ceux-ci existe quant à leur travail. Ils peuvent faire l’objet d’action en justice, mais à posteriori », commente M. Dumont.

Mais, remarque encore l’AJP, il existe dans la jurisprudence un courant minoritaire récent qui « fait fi de l’interdiction constitutionnelle et réinstaure des mesures de contrôle préalable de l’information ». Un courant qui considère notamment que les dispositions de la Constitution s’inscrivent dans un contexte historique totalement différent de celui d’aujourd’hui. « Nous rejetons cet argument. L’absence de censure est un principe de base qui doit suivre l’évolution récente des médias », conclut l’Association des journalistes.

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