Gérald Papy

Le Proche-Orient au bord du gouffre

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

A force de ne plus susciter le moindre espoir de résolution, le conflit israélo-palestinien avait fini par sombrer dans la léthargie de l’indifférence. Fin avril, un xième cycle de discussions échouait lamentablement sans provoquer de sursauts des cénacles diplomatiques internationaux. Il fallait escompter des jours meilleurs et… des dirigeants plus responsables.

Suivant un engrenage trop connu, la confrontation militaire actuelle entre l’armée israélienne et le groupe islamiste Hamas ne déroge pas davantage à la macabre routine du Proche-Orient. En 2002, 2004, 2006, fin 2008-début 2009, la Bande de Gaza a été le théâtre de poussées répétées de violences. Sauf que le contexte a changé. Au point que le risque d’aggravation profonde du conflit et de contagion régionale en cascade est sensiblement plus grand aujourd’hui qu’hier.

Plus la perspective d’un règlement négocié s’éloigne, plus l’audience des extrémistes grandit. Fort de ses succès électoraux, le Hamas a pris le pouvoir à Gaza en 2007 au détriment du Fatah, organisation fondatrice de l’indépendantisme palestinien. Récemment pourtant, il a dû se résoudre à former avec lui un gouvernement d’union nationale en raison de son isolement consécutif à la rupture avec l’allié iranien et à l’éviction des Frères musulmans du pouvoir en Egypte. L’enlèvement et l’assassinat de trois jeunes Israéliens en Cisjordanie, attribués à des membres, téléguidés ou non, du mouvement islamiste, sont venus ruiner la nouvelle stratégie palestinienne. Ironie de cette histoire contemporaine marquée par l’effondrement des valeurs de modération, le Premier ministre israélien, le pourtant très radical Benjamin Netanyahou, apparaît comme le seul dirigeant en mesure d’empêcher une escalade aux conséquences incertaines. Il a dénoncé le meurtre du jeune Palestinien tué en représailles, annoncé l’arrestation de ses meurtriers présumés, des extrémistes juifs, et renoncé – provisoirement ? – à la vaste opération terrestre anti-Hamas réclamée par certains de ses ministres les plus radicaux.

Ces considérations conjoncturelles ne peuvent occulter que les Palestiniens, faute de perspectives raisonnables d’amélioration de leur quotidien, sont face à un dilemme insoluble : composer avec un statu quo de plus en plus invivable ou privilégier l’option violente en rejoignant les rangs des mouvements qui la prônent et qui, demain, seront plus extrémistes encore que le Hamas.

C’est à cette issue que ne manquerait pas de conduire une guerre totale entre Israël et islamistes palestiniens. Avec cette hypothèque nouvelle pour Israël : la mobilisation possible en faveur des « frères » palestiniens de djihadistes de l’Etat islamique depuis leur sanctuaire irako-syrien. C’est pourquoi, après la guerre des pierres (1987-1993) et celle d’al-Aqsa (2000-2003), une troisième Intifada pourrait avoir des répercussions particulièrement déstabilisatrices et dangereuses, jusqu’en Europe (exportation du conflit, hausse des prix des produits pétroliers…)

En regard de ces enjeux et de l’indolence sur le dossier du traditionnel médiateur américain, l’inaction des dirigeants de l’Union européenne est sidérante.

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