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Le modèle N-VA n’a pas eu raison du modèle PS

Pierre Havaux
Pierre Havaux Journaliste au Vif

Le parti de Bart de Wever triomphe et atteint des sommets électoraux. Mais il ne réussit pas à faire mordre la poussière aux partis flamands traditionnels : CD&V, SP.A, Open VLD ont résisté. Et il échoue à détourner clairement les Wallons du modèle PS.

Fiesta à la N-VA. Les nationalistes flamands pavoisent, exultent, et ils ont raison : le parti de Bart De Wever n’est plus une formule qui gagne, mais qui cartonne en Flandre. Il capte 33% des voix à l’échelle fédérale, 32% en Flandre. Décrocherait 44 sièges au Parlement flamand, 34 élus fédéraux, soit sept de plus à la Chambre. Mission accomplie, pari réussi: la barre des 30% de voix est franchie.

Y a pas photo. Le raz-de-marée est là, plus formidable encore qu’en 2010. Que demander de plus ? D’être mathématiquement incontournable, à l’heure d’entrer en négociations pour former le gouvernement en Flandre et de prendre langue avec les francophones pour tenter de constituer une équipe au niveau fédéral.

C’est là qu’un caillou s’est glissé dans la chaussure de Bart de Wever : les autres partis traditionnels flamands ont aussi globalement réussi leur mission. Sans gloire ni panache certes, mais ils ont sauvé les meubles. Chrétiens-démocrates, socialistes et libéraux ne s’effondrent pas au nord du pays. Ils résistent. C’est certainement le cas du CD&V de Kris Peeters : il tient le coup et atteindrait même la barre des 20% qu’il visait. Le SP.A n’est pas balayé, l’Open VLD n’est pas réduit à néant, n’en déplaise au parti de De Wever qui rêvait de siphonner la droite flamande.

La N-VA doit même partager la palme de la victoire, certes nettement plus modeste celle-là, avec Groen : les écologistes flamands, à l’inverse de leurs camarades francophones, retrouvent des couleurs. Crédité de 9%, Groen fait ainsi démentir la réputation d’un nord du pays qui aurait définitivement basculé à droite. Un signe.
C’est une autre formation séparatiste que le tsunami N-VA a englouti : le Vlaams Belang, porteur de l’extrémisme nationaliste, n’est plus que l’ombre de lui-même, brutalement ramené à 6% des suffrages après avoir capté jusqu’à 24% de l’électorat flamand. Au passage, le parti de Bart de Wever s’est offert le scalp de la Lijst Dedecker déclarée en état de mort clinique avant même le scrutin.

Si la N-VA décroche la timbale, c’est avant tout aux dépens de la mouvance nationaliste flamande. Non au détriment de l’aile flamande de l’ex- coalition fédérale Di Rupo. CD&V, SP.A et Open VLD réussiraient même un véritable petit exploit, dans le climat ambiant : ils retrouveraient à eux trois la majorité, même minime, qui faisait cruellement défaut à Di Rupo Ier dans le groupe linguistique néerlandophone à la Chambre. Voilà Bart De Wever privé d’un argument de poids qu’il ne cessait de marteler pour entretenir la frustration des Flamands.

Cette performance n’échappe évidemment pas aux francophones. Qui cherchent à se rassurer comme ils peuvent : « Un flamand sur trois a voté N-VA ? Fort bien. Deux Flamands sur trois n’ont pas voté N-VA : c’est encore mieux. »

Paul Magnette, président d’un PS malmené mais qui reste numéro un en Wallonie, n’a pas boudé son plaisir de la souligner lors de sa première intervention : « les partis séparatistes accusent un certain recul en Flandre, les partis de la majorité gouvernementale sortante résistent, la famille socialiste resterait la première du pays. »
Trois sujets de contrariété sur le bulletin de victoire d’un Bart De Wever conforté dans son leitmotiv : « jamais il n’y a eu un tel fossé entre la démocratie flamande et la démocratie francophone », assène le président de la N-VA. L’aveu d’un échec : son ultime appel aux électeurs francophones à jeter aux orties le modèle PS n’a pas eu l’effet escompté. Le modèle N-VA se casse les dents en Wallonie.

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