« Le harcèlement n’est pas une phase que doit traverser votre enfant »

Certaines personnes sont marquées à vie par le harcèlement subi pendant leur enfance. « Une fois que cessent les vexations, l’entourage de la victime souhaite oublier l’affaire au plus vite », écrit notre consoeur de Knack Ann Peuteman. « Même si l’intéressé ne pourra peut-être jamais oublier. »

Chaque fois qu’il en parle, les traits de son visage se durcissent. Cela le touche. Encore toujours. Une fois, il en a parlé. Tard dans la nuit, après une fête arrosée. Qu’ils l’attendaient à l’arrêt de bus. Qu’ils essayaient de lui prendre son cartable, qu’ils lui donnaient des coups de pied. Jour après jour. Qu’ils lui avaient imaginé un surnom : un mot qui le fait toujours frémir. La moitié de sa scolarité, il s’est senti angoissé et traqué. Il en a eu les épaules affaissées. Et il les a toujours. Comme s’il était littéralement marqué par le harcèlement de l’époque.

Ne pensez pas que le harcèlement n’est qu’une phase que doit traverser votre enfant

Bien entendu, il y a des victimes qui ont tout laissé derrière elles, parce que c’est dans leur nature, grâce à des années de thérapie ou parce qu’elles ont été bien aidées. Mais d’autres en souffrent toujours. Parfois, cette souffrance s’exprime sous forme de dépit et de susceptibilité, parfois par un manque de confiance en soi, d’arrogance ou de tendance à toujours vouloir se prouver. Ne pensez pas que le harcèlement n’est qu’une phase que doit traverser votre enfant. Et il ne suffit pas de punir les harceleurs ou de changer la victime de classe. Il faut un travail approfondi pour comprendre le comportement des auteurs, et pourquoi certains en sont chaque fois victimes. Pourquoi certains enfants sont-ils toujours harcelés par leurs congénères, quelle que soit la classe ou l’école où ils se trouvent ? Là aussi, il faut trouver une réponse, même si beaucoup de gens n’osent pas, de peur d’être accusés de « victim blaming ».

Une fois que cessent les vexations – grâce ou non à l’aide des professeurs, du PMS ou de la même police – l’entourage de la victime est généralement si soulagé qu’elle souhaite oublier toute l’affaire aussi vite que possible, même si l’intéressé en est incapable et ne le pourra peut-être jamais. C’est pourquoi il est primordial qu’il bénéficie de soins efficaces et de longue durée. À la maison, à l’école, et au besoin d’un thérapeute.

Comme les conséquences à long terme du harcèlement sont toujours sous-estimées, n’importe quel signal fort de l’état est le bienvenu. Y compris la nouvelle loi qui sera bientôt en vigueur : les victimes de harcèlement ne seront plus obligées de porter plainte elles-mêmes. Leurs parents, professeurs ou amis pourront également tirer la sonnette d’alarme. C’est très important étant donné que beaucoup de victimes ont honte, ont peur de leurs assaillants ou craignent que le harcèlement empire s’ils ouvrent la bouche. Et si la victime a été harcelée jusqu’à la mort, la modification de la loi facilite aussi les poursuites.

Ces dernières semaines, j’ai souvent pensé à la fille d’une amie. Elle a dix-sept ans, et dans quelques mois, elle aura fini ses études secondaires. Elle devrait être exubérante, et impatiente de l’avenir. Mais rien n’est moins vrai. Ces derniers temps, elle a été tellement harcelée par ses condisciples qu’elle ne va plus à l’école depuis des semaines. Jusqu’à ce qu’on trouve une solution. J’espère que ses épaules ne vont pas s’affaisser. J’espère qu’elle sera tellement bien soignée que dans vingt ans elle n’aura pas les traits durcis quand elle confiera à ses amis proches ce qui lui est arrivé durant cette terrible année de rhéto.

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