Olivier Mouton

Le Flandre selon Kris Peeters : Über alles !

Olivier Mouton Journaliste

Le triomphe d’Angela Merkel en Allemagne donne des ailes au ministre-président Kris Peeters. Les chrétiens démocrates du Nord se recentrent sur la Flandre et misent sur leur bilan pour tenter de freiner la N-VA. Tout en envisageant de travailler avec elle. A droite, toute !

« La Flandre sortira de la crise comme une des régions les plus fortes. » Le ministre-président flamand Kris Peeters l’a jouée volontariste lors de sa traditionnelle « déclaration de septembre » marquant la rentrée parlementaire. En 12 pages et 1579 mots, il a souligné combien son gouvernement – qui marie CD&V, N-VA et SP.A – a tout mis en oeuvre pour préserver la « prospérité du Flamand travailleur ».

La situation est saine : le budget à nouveau en équilibre pour la quatrième année de rang, des investissements ont été consentis dans les secteurs prioritaires, 48.000 emplois ont été créés malgré des temps très difficiles… Surtout, « l’économie revit, lentement mais réellement… » : le retour de le croissance est annoncée pour 2014, la confiance des consommateurs est au plus haut depuis deux ans… Et la Flandre compte bien ne pas en rester là, investissant plus d’un milliard d’euros pour renforcer sa compétitivité tout en se préparant à profiter de nouvelles compétences issues de la sixième réforme de l’Etat.

Politiquement, les chrétiens-démocrates flamands ont pris des risques depuis la fin de la plus longue crise politique de l’histoire belge et espèrent enfin en recueillir les fruits. « Nummer één » du parti pour la campagne, Kris Peeters est la figure de proue amenée à montrer que le parti a le sens des responsabilités, qu’il maintient le pays sur les rails budgétaires tout en accomplissant ses promesses – scission de BHV en tête. Qu’il pose la Flandre en priorité absolue aussi, après avoir obtenu la « révolution copernicienne » tant attendue, refusant même de se déclarer candidat pour un « Seize rue de la Loi » devenu désuet.

Kris Peeters, ce serait un peu l’Angela Merkel du Nord du pays, ayant réussi à braver les tempêtes et à mener les réformes nécessaires pour maintenir la nation flamande au sommet de l’Europe. Le CD&V voit dans le triomphe de la CDU en Allemagne un encouragement pour l’importantissime scrutin du 25 mai prochain. S’il n’espère évidemment pas un triomphe comparable – la CDU a obtenu 41,2%, à deux doigts de la majorité absolue ¬-, il peut espérer terminer deuxième parti de Flandre au-dessus des 20% tout en freinant l’envol nationaliste. Le ministre-président a d’ailleurs détrôné le bourgmestre d’Anvers en tête de la liste des personnalités les plus populaires de Flandre. CQFD.

Pour autant, Kris Peeters n’est pas encore Angela Merkel…
Sa « déclaration de septembre » a suscité des réactions mitigées en Flandre. L’humoriste Geert Hoste, ultra-populaire au Nord, a même estimé que son slogan sur la sortie de la crise ressemblait « davantage à un petit gâteau de la chance chinois » qu’à une expression politique. Les commentateurs politiques ont mis en avant le chemin qu’il restait à faire d’ici la fin de la législature : des dossiers fondamentaux comme la réforme de l’enseignement secondaire ou l’Oosterwelverbinding censée désengorger le ring d’Anvers restent des talons d’Achille.

Mais l’expression la plus cinglante est venue de l’éditorialiste en chef du « Standaard », Bart Sturtewagen : faire « aussi bien que la Belgique n’est pas assez bien ». Le ministre-président flamand n’est pas dans la position de la chancelière allemande, il doit composer avec une N-VA qui ne cesse de rappeler que les réformes structurelles sont insuffisantes, que la Wallonie est un boulet aux pieds de la Flandre, tout en saluant précisément les recettes utilisées Outre-Rhin, tels les mini-jobs… fortement décriés par le président du PS, Paul Magnette.

Là où Angela Merkel ne devait qu’apparaître pour vaincre, Kris Peeters devra lutter jusqu’au bout et ménager son principal opposant avec lequel il gouverne la Flandre. Avec au bout de la ligne droite de 2014, peut-être, une grande coalition, non avec des socialistes affaiblis comme en Allemagne. Mais avec les nationalistes. A droite, toute ! Über alles !

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire