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Le comité restreint s’accorde sur le plan de sortie du nucléaire, les Verts mécontents

Le comité ministériel restreint s’est accordé mercredi sur la fermeture des réacteurs Doel I et II en avril 2015, suivant ce qui était prévu dans la loi de sortie du nucléaire de 2003, et sur une prolongation de dix ans du réacteur Tihange I dont la fermeture est dès lors reportée à avril 2025.

Le même comité a également décidé de mettre à disposition des fournisseurs quelque 20% de la production nucléaire totale en Belgique, une mesure dont l’objectif est de faire baisser les prix à la consommation.

Se basant sur le plan Energie du secrétaire d’Etat Melchior Wathelet, les principaux ministres du gouvernement ont pris en compte une série de critères, en termes de santé, d’environnement et d’approvisionnement des consommateurs, les particuliers et les entreprises.

Alors que la loi de 2003 prévoyait de fermer en 2015 les trois plus anciens des sept réacteurs nucléaires – Doel 1 et 2 ainsi que Tihange 1 – le Comité restreint a finalement décidé mercredi de prolonger de dix ans Tihange 1 afin de « garantir la sécurité d’approvisionnement » du pays en électricité. Doel 1 et Doel 2 seront en revanche fermés en avril 2015 et pas en avril 2016, comme l’avait suggéré Melchior Wathelet.

« Tihange 1 sera prolongée de dix ans, afin d’éviter le risque que 500.000 à 1 million d’habitants ne soient plongés dans le noir à certains moments pendant l’hiver », selon un communiqué du gouvernement se basant sur un rapport d’Elia, le gestionnaire du réseau de transport de l’électricité.

Afin de faire baisser les prix de l’électricité à la consommation, le gouvernement s’attaquera au monopole d’Electrabel en mettant à disposition de l’ensemble des autres fournisseurs 20% de la production nucléaire totale du pays, une capacité qui va donc plus loin que celle de Tihange 1.

« Mille mégawattheures seront mis à la disposition du marché pour accroître la concurrence entre les fournisseurs et permettre les prix les plus bas possibles aux consommateurs et aux entreprises », selon le cabinet du Premier ministre Elio Di Rupo.

Le Comité restreint s’est également mis d’accord sur la mise en place de « mécanismes d’encadrement juridiques » afin de permettre au gouvernement d' »intervenir », voire d' »empêcher » l’arrêt éventuel des centrales thermiques existantes. Dans l’opposition, les écologistes avaient fait valoir qu’Electrabel avait décidé de fermer certaines centrales classiques afin de provoquer une pénurie ce qui amènerait le gouvernement à devoir prolonger la durée de vie des réacteurs nucléaires, une version des faits toutefois démentie par l’opérateur.

Le plan Wathelet prévoyait initialement un mécanisme d’appel d’offres visant à favoriser la création de centrales électriques au gaz. A l’issue de la réunion du « kern », le gouvernement a fait savoir qu’un « mécanisme sera développé pour inciter à l’investissement dans des capacités nouvelles permettant de garantir, après la fermeture des deux centrales nucléaires (de Doel), à la fois la sécurité d’approvisionnement et le développement des énergies renouvelables, grâce à la plus grande flexibilité de ces nouvelles capacités ».

A leur arrivée au « 16 », les vice-premiers ministres socialistes avaient indiqué vouloir s’assurer que le gouvernement s’inscrirait bien dans un schéma de sortie du nucléaire. L’accord de principe scellé mercredi annonce « la suppression de l’article 9 de la loi de 2003 », celui qui prévoyait la possibilité de déroger au calendrier de sortie par un simple arrêté royal.

Enfin, vu les nouvelles modalités découlant de la prolongation d’une centrale, la rétribution nucléaire au gouvernement sera revue. Le Conseil des ministres restreint a réaffirmé mercredi « la volonté du gouvernement de percevoir une rente durant la législature ».

Le Secrétaire d’Etat à l’Energie Melchior Wathelet a été chargé de finaliser le dossier sur base de ces décisions.

Ecolo dénonce un compromis « à la grand-papa » au seul bénéfice du secteur


Il s’agit d’un compromis « à la grand-papa » au seul bénéfice du secteur, juge Ecolo. « La nouvelle position du gouvernement fédéral manque de la plus élémentaire rigueur car absolument rien n’imposait une telle prolongation d’un des trois plus vieux réacteurs, à part le montant de la rémunération des actionnaires du secteur », affirment Muriel Gerkens, cheffe de file Ecolo à la Chambre, et Olivier Deleuze, co-président d’Ecolo.

Pour les Verts, la Belgique a laissé passer sa chance de prendre le sillon de l’Allemagne, qui a décidé de fermer l’ensemble de son parc nucléaire tout en se dotant d’objectifs trois fois plus ambitieux que la Belgique en matière de réduction de CO2 d’ici 2020 (moins 40%).

« Cette stratégie est déjà gagnante puisque l’Allemagne compte aujourd’hui plus d’emplois dans les secteurs verts que dans le secteur automobile ».

En outre, le signal envoyé aux investisseurs alternatifs au nucléaire reste totalement flou, puisque la part du marché énergétique nouvellement ouvert aux alternatives et aux renouvelables restera minime, ajoutent-ils.

Ecolo dénonce aussi les avis changeants du gouvernement fédéral, après l’accord de 2010 avec GDF-Suez pour prolonger de dix ans la durée de vie des trois plus anciens réacteurs nucléaires après 2015.

« Le secteur nucléaire ne se sert d’ailleurs même plus de sa pseudo-préoccupation visant à garantir la sécurité d’approvisionnement, puisque c’est lui-même qui organise la pénurie en décidant la fermeture d’unités non nucléaires », ajoute le parti d’opposition.

Le bourgmestre de Huy satisfait

Le bourgmestre de Huy Alexis Housiaux (PS) a réagi très positivement à l’annonce de la prolongation de l’unité 1 de la centrale nucléaire de Tihange, sur le territoire de la commune.

Chaque année, la ville de Huy va chercher un tiers de son budget dans les différentes taxations venant de l’activité nucléaire. « C’est 14 à 15 millions du budget par an. Nous sommes une ville de
22.000 habitants qui a les moyens d’une ville de taille double », souligne M. Housiaux.

C’est aussi pour la sauvegarde de l’emploi que le bourgmestre de Huy se réjouit de cette prolongation. « Mille huit cents personnes travaillent sur le site. La plupart habitent à proximité immédiate. Cette prolongation garanti l’emploi et la richesse de toute une région ».

Alexi Housiaux considère aussi que cette prolongation « permettra d’envisager la sortie du nucléaire ». Il pense qu’il faudra profiter des 10 ans à venir pour imaginer une taxe compensatoire ou un fonds de sortie au bénéfice de la ville de Huy.

Le Vif.be, avec Belga

Le communiqué de presse du 4 juillet

Fermeture des centrales nucléaires de Doel 1 et Doel 2 et prolongation de Tihange 1. Le Conseil des Ministres restreint a arrêté les décisions suivantes.

Deux centrales nucléaires seront fermées en 2015 : Doel 1 et Doel 2. Tihange 1 sera prolongée de dix ans, afin d’éviter le risque que 500.000 à 1 million d’habitants ne soient plongés dans le noir à certains moments pendant l’hiver (rapport d’Elia). 1000 mw nucléaires seront mis à la disposition du marché pour accroître la concurrence entre les fournisseurs et permettre les prix les plus bas possibles aux consommateurs et aux entreprises. Des mécanismes d’encadrement juridiques seront mis en oeuvre afin de permettre au gouvernement d’intervenir, voire d’empêcher l’arrêt éventuel des centrales thermiques existantes. Un mécanisme sera développé pour inciter à l’investissement dans des capacités nouvelles permettant de garantir, après la fermeture des deux centrales nucléaires, à la fois la sécurité d’approvisionnement et le développement des énergies renouvelables, grâce à la plus grande flexibilité de ces nouvelles capacités. La suppression de l’article 9 de la loi de 2003, c’est-à-dire la possibilité de déroger au calendrier de sortie par un simple arrêté royal. La réaffirmation de la volonté du gouvernement de percevoir une rente durant la législature.

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