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Le châtelain et la secte mystérieuse

En Flandre, la disparition de l’agent immobilier Stijn Saelens a braqué les projecteurs sur une éco-secte venue de Russie. Des adeptes de Ringing Cedars (« les cèdres qui tintent ») tentent de s’implanter en Belgique, jusqu’ici en vain.

L’affaire du « châtelain de Wingene » fascinerait un scénariste de polar. L’histoire commence le 30 janvier avec la disparition de Stijn Saelens, un agent immobilier de 34 ans. L’homme vivait avec sa femme et ses quatre enfants dans le château Carpentier de Wingene, près de Bruges. Un domaine de 90 ha acheté en 2004 pour 2 millions d’euros, puis rénové à grands frais. Le jour de sa disparition, sa femme, une médecin, découvre dans le château une flaque de sang, ainsi qu’une douille de 9 mm. Le sang était celui de son mari. Depuis, Saelens n’a plus donné signe de vie. Même si depuis il y a eu quelques rebondissements, sa disparition reste un mystère.

Les relations entre le disparu et sa belle-famille étaient tendues. Stijn Saelens envisageait de refaire sa vie en Australie, où il comptait fonder une ferme bio. Le vendredi qui suivait sa disparition, la famille devait d’ailleurs se rendre en Australie. De « simples vacances » qui ne posaient aucun problème au beau-père, affirme l’avocat de ce dernier, Jef Vermassen.

Anastasia et les cèdres qui tintent

On sait que Stijn Saelens jouait en bourse et avait perdu récemment des sommes importantes. Mais le parquet de Bruges a aussi découvert qu’il entretenait des relations avec la secte d’origine russe Ringing Cedars (« les cèdres qui tintent »), un mouvement prônant le retour à la nature. Selon Le Parisien, des chasseurs l’auraient déjà aperçu nu dans la forêt, en train d’embrasser des arbres. Un comportement qui rappelle étrangement celui d’Anastasia, l’icône des adeptes de Ringing Cedars.

A l’origine de ce mouvement se trouve Vladimir Megré, un entrepreneur russe devenu écrivain à succès. En 1994, le désormais sexagénaire aurait rencontré dans la taïga sibérienne une chamane vivant à demi-nue dans une forêt de cèdres. Anastasia, car c’était elle, lui aurait confié sa vision du monde parfait dans une palette de domaines : relation à la nature, éducation, spiritualité, alimentation… Dès 1996, Megré tirera de cette rencontre une série de dix livres d’une mièvrerie et d’un kitsch admirables. Ce qui ne les a pas empêchés d’être traduits en vingt langues (dont le français et le néerlandais) et diffusés à plus de 10 millions d’exemplaires.

La série a inspiré la création de dizaines d’éco-villages dont les habitants tentent de vivre en harmonie avec la nature. Ces communautés « Anastasia » fleurissent essentiellement en Russie et dans les anciens pays soviétiques, mais certaines se sont aussi installées aux Etats-Unis, en Australie et dans plusieurs pays d’Europe, dont les Pays-Bas. En Flandre, quelques lecteurs de Megré tentent de créer leur propre éco-village, jusqu’ici en vain. Le Centre d’information et d’avis sur les organisations sectaires nuisibles (Ciaosn) reconnaît n’avoir jamais entendu parler du mouvement avant l’affaire de Wingene. La disparition de Stijn Saelens est-elle liée de près ou de loin à son projet australien ? Le polar du « château de Wingene » reste à élucider.

ETTORE RIZZA

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