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Le chanoine Houtart rattrapé par une histoire d’abus sexuel

Le chanoine Houtart, « pape de l’altermondialisme » et figure de proue du Forum social mondial de Porto Alegre en 2001, a avoué avoir commis, il y a quarante ans, des abus sexuels sur le fils d’un de ses cousins chez qui il était hébergé. Il est accusé de viol, mais lui parle, sans minimiser la gravité des faits, seulement d’attouchements.

Le chanoine François Houtart, 85 ans, a reconnu mercredi dans les colonnes du Soir avoir abusé en 1970 de l’un de ses cousins, âgé à l’époque de huit ans. Il a démissionné de la présidence du Centre Tricontinental (Cetri) et demandé à ses partisans de suspendre la campagne en faveur de sa candidature au prix Nobel de la paix 2011.

Une plainte anonyme avait déjà été déposée à la commission Adriaenssens par une des cousines de François Houtart. Celle-ci explique qu’un chanoine qui était hébergé par ses parents dans la région de Liège s’était introduit à deux reprises dans la chambre de son frère pour le violer. Le prêtre indique de son côté qu’en traversant la chambre du garçon, il a « touché ses parties intimes à deux reprises ». M. Houtart qualifie lui-même l’acte « d’inconsidéré et irresponsable ».

Le chanoine déclare avoir proposé aux parents de la victime, avec qui il était cousin, de renoncer à l’exercice du sacerdoce et d’assumer toutes les conséquences de son acte. « Ils me proposèrent alors de consulter un professeur du grand séminaire de Liège. Celui-ci me conseilla de rester dans le sacerdoce et de me concentrer sur les tâches universitaires en sociologie des religions. »

Le prêtre admet avoir demandé l’arrêt de la campagne en faveur de sa candidature au prix Nobel à cause des pressions d’une cousine qui avait du mal à accepter ces marques de reconnaissance pour un homme coupable d’abus sexuels.

Surnommé « pape de l’altermondialisme », François Houtart a été professeur de sociologie à l’UCL de 1958 à 1990. Il avait notamment participé au Concile Vatican II en 1962, fondé l’ONG Cetri en 1976 et été l’une des chevilles ouvrières du premier Forum social mondial, à Porto Alegre, en 2001.

CETRI : « Des faits inadmissibles en contradiction avec nos valeurs »

Les faits d’abus sexuel commis il y a 40 ans par le prêtre François Houtart sur un cousin mineur sont « inadmissibles » et « en contradiction avec les valeurs du CETRI » (Centre tricontinental), a réagi mercredi le directeur de l’ONG.

« Ce sont des faits inadmissibles qui sont en contradiction évidente avec les valeurs d’émancipation et de justice sociale portées par notre organisation », a déclaré le directeur du CETRI Bernard Duterme.

Le CETRI explique avoir eu connaissance des faits, fin octobre, et avoir dans la foulée demandé la démission du chanoine, qui était resté membre du conseil d’administration de l’association, après l’avoir dirigée jusqu’en 2004.

« Une fois ces faits en partie confirmés par François Houtart, nous avons aussitôt demandé sa démission. C’était une évidence qui s’imposait à nous, comme à lui », ajoute M. Duterme.

« C’est un coup dur mais cela n’a pas d’incidence sur l’objet social du CETRI qui garde toute sa pertinence. Le travail du Centre reste très apprécié », poursuit le directeur.

Situé à Louvain-la-Neuve, le CETRI est un centre d’étude, de publication, de documentation et d’éducation permanente sur le développement et les rapports Nord-Sud. Il se fixe pour objectif « de faire entendre des points de vue du Sud et de contribuer à une réflexion critique sur les conceptions et les pratiques dominantes du développement à l’heure de la mondialisation néolibérale ».

LeVif.be, avec Belga

François Houtart, le « pape de l’altermondialisme »

Né en 1925 à Bruxelles, François Houtart est l’aîné d’une famille de 14 enfants et le petit-fils du comte Henry Carton de Wiart, homme politique appartenant au parti catholique -initiateur de la loi de 1912 sur la protection de l’enfance, il fut également premier ministre de fin 1920 à fin 1921- et écrivain.

Résistant pendant la Seconde Guerre mondiale, François Houtart est ordonné prêtre en 1949 dans le diocèse de Malines-Bruxelles.

Après des études en sciences politiques et sociales à l’Université Catholique de Louvain (UCL), il y devient docteur en sociologie et enseigne, dès 1958 et jusqu’à se retraite en 1990, la sociologie des religions. C’est en tant que professeur à l’UCL qu’il a reçu le titre de chanoine honoraire du diocèse de Malines-Bruxelles, un titre honorifique accordé par l’évêque mais qui n’est plus décerné en Belgique depuis le concile Vatican II (1962), auquel il avait par ailleurs participé en tant qu’expert.

François Houtart fonde en 1976 l’ONG Centre tricontinental (CETRI), qui se veut un centre d’étude, de publication, de documentation et d’éducation permanente sur le développement et les rapports Nord-Sud. Il dirigera le CETRI jusqu’en 2004 et en restera administrateur jusqu’à ce qu’il soit contraint à la démission, effective au 1er novembre 2010, rattrapé par son passé.

En 2009, il se voit décerner le prix UNESCO Madanjeet Singh pour la promotion de la tolérance et de la non-violence.

Proche du mouvement Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), étiquetté marxiste, tantôt surnommé le « chanoine rouge » ou le « pape de l’altermondialisme », François Houtart a apporté son aide à différentes organisations syndicales, mouvements paysans et mouvements politiques de gauche et centre-gauche à travers le monde, en particulier dans les pays du Sud. Il a également participé à la création du Forum social mondial.

Fin 2010, un comité s’est constitué pour défendre sa candidature au prix Nobel de la Paix 2011. C’est en expliquant les raisons du retrait de sa candidature que le prêtre, aujourd’hui âgé de 85 ans, a avoué « avoir touché » à deux reprises, il y a 40 ans, « les parties intimes » d’un cousin alors âgé de 8 ans. La soeur de ce cousin avait déposé auprès de la Commission Adriaenssens une plainte à l’encontre d’un chanoine dont le nom n’était pas cité.

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