Kris Peeters © BELGA

Le CD&V réinvente la « participopposition »

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Un pied dans la majorité fédérale, un pied en dehors: le vice-Premier social-chrétien Kris Peeters a mené une curieuse fronde, cet été. Avec lui, le CD&V semble s’inspirer de la stratégie d’Ecolo au début des années 2000. Qui avait engendré une catastrophique défaite électorale…

Mais à quoi joue donc le CD&V? Un pied dans la majorité fédérale, un pied en dehors : le parti social-chrétien flamand semble réinventer la « participopposition », ce concept créé au début des années 1990 par le secrétaire fédéral d’Ecolo, Jacques Bauduin. A l’époque, les écologistes francophones minaient le gouvernement Verhofstadt depuis leur quartier général à coups de communiqués tranchés et d’assemblées générales sans fin.

Mal à l’aise au sein de la suédoise, ruminant ses états d’âme, le vice-Premier ministre CD&V, Kris Peeters irrite de plus en plus ses partenaires avec ses sorties médiatiques et ses injonctions erratiques. Tout en projetant une image floue dans l’opinion publique. « Honnêtement, cet été, la stratégie de Kris Peeters a été incompréhensible, pour ne pas dire carrément débile », grince une source libérale au sein de la majorité. La mini crise qu’il a provoquée en parlant d’une « rupture de confiance » après l’accord sur le tax-shift laissera des traces, d’autant qu’elle puise ses racines dans des relations humaines fortement dégradées entre les trois vice-Premiers flamands du gouvernement. Seule la relation étroite entre le Premier ministre, Charles Michel, et le président du CD&V, Wouter Beke, a permis de sauver la mise. « De toute façon, il n’y a guère d’alternative », souffle-t-on, fataliste, au sein du CD&V.

« Kris Peeters est un émotionnel, dont les réactions sont souvent épidermiques, commente une source très bien informée au sein de la suédoise. Il est certes charismatique, son passé de ministre-président flamand et sa notoriété servent au CD&V. Mais il est beaucoup moins bon stratège que son président de parti. En soutenant le tax-shift, Wouter Beke souligne, lui, que cette réforme correspond à 80% au programme du CD&V. Il sort de cette logique idiote qui consistait à insister sur les 10 ou 20% de points non obtenus. Beke sait que ses électeurs vont finir par croire Kris Peeters s’il insiste en permanence sur le fait que le verre à moitié vide… Or, le CD&V doit montrer qu’il est un parti qui compte. »

Depuis le début de la législature, le CD&V se positionne à la gauche de la coalition: quête inlassable de concertation sociale, désir de justice fiscale, emportement contre la politique sécuritaire et les militaires dans les rues… Dave Sinardet, politologue à la VUB, l’a qualifié de « nouveau PS ». Une tactique digne de cette « participopposition » inventée par les écologistes sous Verhofstadt? « La situation actuelle est précisément l’inverse de celle qui prévalait alors, souligne Jean Faniel, directeur du Centre de recherche et d’information politique (Crisp). A l’époque, le parti Ecolo exprimait son malaise avec la politique gouvernementale après l’élection d’une nouvelle équipe de secrétaires fédéraux (NDLR : Philippe Defeyt, Jacques Bauduin et Brigitte Ernst), tandis que ses ministres, Isabelle Durant et Olivier Deleuze, essayaient de jouer le jeu au sein de la coalition. Ici, c’est visiblement Kris Peeters qui a un problème. Ce ne doit pas être évident pour lui: il est le premier ministre de l’Emploi issu du monde patronal et doit en même temps être le relais principal de la

CSC, qui met la pression. Cela ne veut certes pas dire qu’il n’y a pas aussi des tensions au sein du parti. »

Le dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine

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