Bart De Wever © BELGA

« La presse flamande n’est pas assez critique à l’égard de la N-VA »

Celine Bouckaert
Celine Bouckaert Journaliste au Vif

Interrogé par De Morgen sur les propos du président de la N-VA Bart De Wever à propos des juifs et des musulmans, le professeur en sciences politiques, Dave Sinardet (VUB), estime que la presse flamande n’est pas suffisamment critique à son égard.

Le week-end dernier, Bart De Wever a déclaré à De Zondag que les juifs orthodoxes évitent les conflits alors que « les musulmans revendiquent une place dans l’espace public, dans l’enseignement, avec leurs signes de croyance extérieurs ». « C’est ce qui crée des tensions », a-t-il ajouté.

Il y a deux ans, dans le cadre d’un entretien accordé à Antwerp Pride Magazine, Dave Sinardet avait déjà reproché à Bart De Wever de critiquer les valeurs de la communauté musulmane et d’épargner la communauté juive. « Nous parlions notamment de personnes qui fuient leur pays à cause de leur orientation sexuelle. Je lui avais alors expliqué qu’il était souvent très critique à l’égard de la communauté musulmane en matière de valeurs des Lumières, mais pas vis-à-vis de la communauté juive. Le problème d’homophobie est au moins aussi grand dans la communauté juive, mais c’était moins problématique pour De Wever ».

Aussi Dave Sinardet n’est guère étonné par les propos du bourgmestre d’Anvers. « Il n’est toujours pas conséquent. D’après le discours de la N-VA tous ceux qui vivent ici doivent s’intégrer et respecter nos normes et nos valeurs. Récemment, il se plaignait de la ségrégation à Anvers et il déplorait que certains musulmans forment une société parallèle. À présent, son interview accordée au Zondag révèle que pour lui les juifs ne sont pas problématiques. Ils vivent entre eux, et il trouve ça très bien », déclare-t-il au Morgen.

Il voit deux raisons à l’attitude de Bart De Wever. Premièrement, il y a une large base de gens qui partagent ses positions dures sur l’islam et les musulmans, ce qui n’est pas le cas pour la communauté juive. Par conséquent, la N-VA joue cette carte pour rester concurrentielle face au Vlaams Belang. Deuxièmement, il estime que vu les racines historiques de la N-VA, et notamment la collaboration nationaliste flamande avec le régime nazi, le parti n’a pas intérêt à nuire à son image en se mettant les juifs à dos.

Raisonnement bizarre

Sinardet revient également sur l’autre polémique récente suscitée par De Wever. La semaine dernière, le président de la N-VA a en effet déclaré au magazine Wilfried que les Romains auraient considéré la ‘snel-Belgwet’ (la loi d’acquisition rapide de la nationalité belge) comme une stupidité. C’est pour lui un raisonnement bizarre. « On ne se demande pas non plus ce que les Aztèques auraient pensé de notre politique de mobilité, non ? », s’interroge-t-il.

Pour le politologue, la presse flamande n’est pas critique à l’égard de la N-VA. Il cite l’exemple de l’explosion récente de grenades à main à Anvers. « Si cela arrivait à Bruxelles, cela ferait la une des journaux flamands pendant une semaine. (…) Quand cela se produit à Anvers, on n’en parle presque pas ».

Steve Stevaert

Il ajoute qu’il ne faut pas nécessairement blâmer les journalistes flamands, mais que c’est plutôt le système qui est en cause. « Le parti au pouvoir occupe une position forte dans sa relation à la presse. C’était également le cas de Stevaert. Il a eu le retour du bâton quand il a perdu le pouvoir. J’espère que la presse ne traitera jamais De Wever comme elle l’a fait à la fin avec Stevaert. Je ne souhaite ça à personne. »

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire