© Frédéric Pauwels

« La N-VA ne brade pas ses principes »

Professeur au collège universitaire Lessius d’Anvers, Dirk Rochtus fait son entrée au conseil de la N-VA. De Wever et sa formation gardent la cote parce que « les Flamands découvrent un parti qui ne transige pas sur ses principes pour accéder au pouvoir ».

Le Vif/L’Express : Après dix mois de blocage politique, la N-VA caracole toujours dans les sondages. L’impasse, c’est la clé du succès ?

Dirk Rochtus : Les Flamands ont découvert un parti qui reste sur ses positions, des hommes politiques qui ne cèdent pas immédiatement sur leurs principes pour une question de formation de gouvernement ou des postes ministériels à décrocher. Beaucoup apprécient cette posture : elle tranche à leurs yeux avec des décennies de compromis et de concessions faites aux francophones.

Cela suffit aux Flamands pour croire que la N-VA est un parti pas comme les autres ?

Elle a déjà prouvé sa détermination. En mars 2008, la N-VA décide de soutenir le gouvernement Leterme Ier mais de l’extérieur, sans vouloir de ministres. En septembre 2008, le ministre régional flamand Geert Bourgeois n’hésite pas à démissionner pour marquer le désaccord de la N-VA avec les conditions mises au dialogue communautaire. Après le succès aux élections régionales de juin 2009, Bart De Wever aurait pu devenir ministre dans le gouvernement flamand : il a décliné pour rester président de parti. Cette façon d’agir est perçue comme une forme d’intégrité. Les gens disent : chapeau.

La N-VA, parti de principes, peut-il être aussi un parti de compromis ?

Oui, mais pas à tout prix. La note du clarificateur Bart De Wever, en octobre 2010, était perçue dans les milieux nationalistes flamands comme pleine de concessions, et les francophones la balaient en une heure de temps : énorme faute psychologique !

La VU d’Hugo Schiltz a déjà incarné ce genre de combat. Cela ne l’a pas empêché de disparaître…

A l’inverse de Bart De Wever, Hugo Schiltz a trop donné l’impression de vouloir devenir ministre fédéral, aux yeux des nationalistes flamands.

Bart De Wever, l’homme de la situation ?

Les Flamands ont trouvé en lui l’homme politique qui se bat pour des principes et refuse de les brader. Il suscite l’admiration au-delà des nationalistes. Il est perçu comme quelqu’un aux côtés des Flamands ordinaires, pas au-dessus d’eux. Un grand intellectuel qui adopte le style de vie du Flamand moyen : il mange des frites, boit de la bière.

Si De Wever disparaissait brusquement, la N-VA n’y survivrait pas ?

Je ne peux pas imaginer qu’un parti qui atteint les 30 % des voix retombe brutalement à 10 %. Le succès attire le succès. De Wever sait aussi qu’il ne peut incarner le parti d’un seul homme. Il met d’autres noms de la N-VA en avant : Jan Jambon, Ben Weyts…

Les francophones s’arrachent les cheveux. Le ministre PS Magnette parle de la N-VA comme d’un « paradoxe flamand »…

Du côté flamand, on n’a pas l’impression que les partis francophones, notamment le PS, bougent dans le bon sens.

Le PS accuse le coup dans les sondages. Pourquoi résisterait-il moins que la N-VA à la longueur de la crise ?

Deux lectures existent. Côté flamand, on se dit que le PS est puni parce qu’il ne cède pas assez et que cela pourrait amener le parti à mettre de l’eau dans son vin. Côté francophone, on se dit que le PS est puni parce qu’il a trop cédé.

Vous siégez désormais au conseil de la N-VA, aux côtés d’autres personnalités « extérieures » : qu’attend de vous De Wever ?

Du sang neuf, issu du monde académique ou des affaires. J’ai été chef de cabinet adjoint du ministre Bourgeois, sans être membre du parti. J’aime combiner la théorie et la pratique.

Si De Wever prône le confédéralisme, pourquoi ne pas revoir l’article 1er des statuts de la N-VA qui réclame l’indépendance de la Flandre ? Le geste à l’adresse des francophones serait politiquement fort…

[Hésitations.] La question est délicate. Peut-être mériterait-elle de mûrir.

ENTRETIEN : P. HX

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