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La N-VA dit une chose et fait son contraire, ou presque

Le Vif

« Nos chefs de file doivent apprendre à se taire » clame Jan Peumans. La N-VA semble de plus en plus faire le grand écart entre ses paroles et ses actes. Analyse.

Tout le monde à la N-VA n’est pas heureux des récentes sorties des cadres du parti. Le président du parlement flamand, Jan Peumans (N-VA), fait partie de ceux-là. Il a appelé les chefs de file de son parti à « apprendre à se taire » dans le dossier des demandeurs d’asile. Pour lui, les propos sans nuances « font plus de tort que de bien ». « Réfléchissez-y à deux fois avant de parler », leur a-t-il dit mercredi via les colonnes du quotidien De Standaard.

Peumans est connu pour faire partie de l’aile la plus à gauche du parti et a régulièrement du mal avec les sorties musclées des membres les plus à droite de la N-VA. Le président du parlement flamand vise le secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration, Theo Francken, dont les propos au vinaigre au sujet du faible taux d’occupation par les réfugiés de l’immeuble WTC mis à leur disposition depuis lundi par les autorités fédérales ont suscité la polémique. Mais Jan Peumans n’épargne pas plus son président de parti, Bart De Wever: « J’entends le président dire qu’il souhaite réfléchir à un statut social à part pour les réfugiés. Eh bien, cela n’est pas possible en regard de la Convention de Genève. Nous n’allons tout de même pas nous en moquer. Il a heureusement dit ‘y réfléchir’, mais tu ne dois tout simplement pas dire ce genre de chose », a encore précisé le président du parlement flamand. Et quand on lui demande pourquoi De Wever se lance dans ce genre de sortie, il avoue qu’il n’en sait rien.

Jan Peumans nie pourtant que ce discours musclé est destiné à s’attirer les bonnes grâces de l’électeur d’extrême droite, comme le suggérait mardi l’ex-commissaire européen Open VLD Karel De Gucht. » « Vous savez, il y a deux personnes dont les dires m’importent peu et ces personnes sont Karel De Gucht et Mark Eiskens » précise-t-il dans De Staandaard. « Je ne vois pas ce que cela a à voir avec l’extrême droite. La situation est déjà bien assez complexe, le focus doit être mis sur l’humanitaire. C’est une tragédie qui se passe en ce moment. Ceci dit je trouve que les ministres N-VA gèrent bien le dossier sur le plan politique. On n’a pas à rougir de notre politique d’immigration. Après tout ce n’est pas pour rien que les gens viennent avec plaisir dans notre pays. On ferait mieux de voir la situation depuis cet axe positif. »

Panique d’être vu comme trop à gauche

Toujours selon De Standaard, la N-VA craindrait d’être perçue comme trop à gauche et c’est donc dans un élan de panique qu’elle tire à boulets rouges et sans sommation sur les élans de solidarité qui fleurissent à travers le pays. Particulièrement visé par les critiques: Bart De Wever qui parle d’un statut privilégié pour les réfugiés, ou Liesbeth Homans qui veut refuser un logement social aux réfugiés qui ont un logement dans leur pays, ou encore Sander Loones, le parlementaire européen, qui veut qu’on renvoie les demandeurs d’asile par la mer en Turquie. Ce n’est ici que quelques récents exemples. Le plus tonitruant est, sans conteste, les différents tweets et déclarations de ce lundi de Theo Francken qui, malgré le tollé, ne nuance, ni ne regrette rien. Du coup, de plus en plus de politiques demandent que Charles Michel siffle la fin de la récréation et recadre ses troupes gouvernementales.

Et pourtant…

Si les déclarations sont tonitruantes, il n’en va pas de même dans les faits puisqu’à la table du gouvernement, les nationalistes flamands se tiennent cois. Ou en tous cas ne font pas de vagues. En effet, lorsque le gouvernement accepte d’accueillir 250 réfugiés de guerre qui viennent d’Allemagne, la N-VA ne dit rien selon De Standaard. Et c’est même plutôt le contraire puisque Theo Francken « aurait tendance à se plier en quatre pour assurer l’accueil même si cela nécessite des trésors de logistique » toujours selon De Standaard.

Trop mou et à gauche

Cette dichotomie entre action et discours viendrait du fait que Théo Francken serait sous le feu des critiques de l’aile la plus à droite du parti qui lui reproche d’être le nouveau Bert Anciaux (l’ancien président de la Volksuni- un parti nationaliste flamand- qui a rejoint la Sp.a en 2009 NDLR). Soit bien trop mou et à gauche. Le parti semble pourtant jouer un jeu dangereux puisqu’une telle différence entre les actes et les mots risque d’avoir un effet boomerang au niveau de la crédibilité.

Ce qui ne semble pas émouvoir le parti qui se contente de nier qu’il existe un tel écart. D’autant plus que les membres de la coalition ont, pour l’instant, visiblement choisi de ne tenir compte que de ce qui se dit autour de la table du gouvernement.

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