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La Flandre nationaliste se porte à merveille

Ce coup-ci, la N-VA a rassemblé les nationalistes flamands: ceux de la Lijst Dedecker et du Vlaams Belang se sont tournés vers elle, qui incarne des promesses et une méthode nouvelles. Les autres partis font bien pâle figure: le CD&V devra s’adapter, ce qui pourrait être dangereux, l’OpenVLD paie sa démission du gouvernement précédent, et la gauche ne parvient pas à décoller.

On pressentait que ce scrutin se jouerait en Flandre. Il en a bien été ainsi. Le paysage politique fragmenté de la Flandre renoue avec un parti qui réalise un score monstre. Et qui se détache nettement du lot. Le nord du pays ne connaît finalement qu’un vainqueur: la N-VA.

La Nieuw- Vlaamse Alliantie ne remporte pas une victoire, mais un triomphe. Il se traduit par un résultat devenu inhabituel en Flandre: il faut remonter aux élections nationales de 1987 pour retrouver un parti flamand capable, seul, de tourner autour des 30% des voix: le puissant CVP, déjà sur le déclin, avait alors capté 31,57% des suffrages flamands. Aux régionales de 2009, le CD&V décrochait la première place avec 22,95% des voix.

C’est dire la puissance du raz-de-marée de la N-VA qui a balayé le nord du pays le 13 juin. Il confirme avant tout la vigueur et la vitalité du nationalisme flamand qui était pointé, tous partis confondus (Vlaams Belang, N-VA, Lijst Dedecker) à 37,1% lors du scrutin régional de 2009 en Flandre. Cette fois, la N-VA fait largement le plein à elle seule et atteint ainsi des sommets inégalés dans cette mouvance nationaliste. La Volksunie, dont le parti de Bart De Wever est un des héritiers, n’a jamais connu de pic électoral plus élevé que les 18,8% de voix glanées en 1971. Le Vlaams Belang et ses 24,1% de voix décrochées aux élections régionales de 2004, sont dépassés. Le nationalisme flamand se porte toujours à merveille et devrait peser de tout son poids dans la partie flamande de l’hémicycle de la Chambre.

Mais sous un visage fort différent. Car il subit un sacré chambardement interne: il se recadre autour de la N-VA dont le carton s’accompagne d’un net recul du Vlaams Belang, encore deuxième parti de Flandre au scrutin de 2007, et d’une bérézina électorale de la Lijst Dedecker pratiquement rayée de la carte politique après avoir déboulé de façon remarquée au Parlement à l’issue des élections de 2007. C’est dire si la progression fulgurante de la N-VA (4% des voix en 2003, avant le cartel avec le CD&V), est alimentée par un glissement de voix au sein de la planète nationaliste flamande. Et pourrait de ce fait se révéler aussi fragile. On peut y voir une nouvelle manifestation du côté capricieux de l’électeur flamand mais qui néanmoins continue d’opérer dans sa sphère idéologique habituelle.

Les autres partis suivent loin, très loin

Les autres partis en lice n’ont guère fait le poids devant la N-VA. Certains s’exposent à des lendemains douloureux. Qui pourraient être synonymes de radicalisation.

Le CD&V en particulier se prépare à une pénible introspection après sa défaite qui le prive de sa position de premier parti de Flandre. Les démocrates-chrétiens paient au prix fort prix un bilan gouvernemental désastreux, au regard des promesses insensées lancées en 2007 sur le terrain communautaire par son ancienne figure de proue Yves Leterme. Le CD&V a mal tourné la page de la N-VA et le divorce avec le parti de Bart De Wever a tourné à sa confusion. Gare: un CD&V meurtri et dans les cordes pourrait chercher à se refaire une santé par une radicalisation sur le terrain communautaire. Il vient peut-être de brûler son dernier vaisseau disposé à jouer résolument la carte du dialogue avec les francophones: Marianne Thyssen. Mauvais augure pour la stabilité politique du pays. Et risque de surenchère communautaire autour de la table des négociations.

L’Open VLD n’en mène pas large non plus, mais il l’a cherché. Son revers confirme bel et bien la règle qui veut qu’un parti à l’origine d’une crise gouvernementale ne soit pas pardonné par l’électeur. Son jeune président, Alexander De Croo, et la jeune génération de libéraux flamands aux commandes, ne s’attendaient guère à autre chose: il parie sur la refondation de l’Open VLD, recadré sur le plan idéologique. Résolu à tourner définitivement la page Verhofstatdt, même si c’est au prix d’une cure d’opposition bénéfique à moyen terme.

La Flandre conserve son penchant pour la droite. La gauche flamande ne sort pas laminée du scrutin mais pas requinquée non plus. Le SP.A, son profil ouvertement social et sa posture raisonnable sur le plan communautaire, retrouve même quelques couleurs sans réellement sortir de sa léthargie. Il a tenté de jouer la carte du rempart face à la crise, sans grand succès. Pas plus que Groen!, logé à la même enseigne. De quoi envier l’insolente santé du PS et la bonne performance durable d’Ecolo.

Pierre Havaux

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