Gérald Papy

La Belgique au Mali : jusqu’où ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Entre l’opération Serval et la mission de l’Union européenne pour la formation de l’armée malienne, la Belgique devra faire des choix. Pour des raisons budgétaires et parce que l’effort européen doit être équitablement réparti.

Le gouvernement belge sera amené dans les prochains jours à définir la nature de sa participation à l’intervention militaire et civile contre les groupes terroristes au Mali. Au terme d’un voyage dans la région, le ministre des Affaires étrangères Didier Reynders a exprimé le souhait que la Belgique y reste présente. Le principe de cet effort n’est pas contesté au sein du gouvernement. Mais les avis divergeraient quelque peu sur les modalités de la contribution.
Dans l’intervention étrangère au Mali, il faut distinguer deux missions. D’un part, l’opération Serval, dirigée par l’armée française avec, en soutien, une assistance européenne et des troupes africaines, et d’autre part, la mission de l’Union européenne, EUTM Mali (European Union Training Mission Mali), destinée à la formation d’une armée malienne en déliquescence.
La Belgique participe de façon significative à l’opération Serval, par la mise à disposition de deux C-130 et de deux hélicoptères médicalisés. Les premiers ont effectué de nombreuses rotations, notamment pour le transport de troupes au départ d’Abidjan (Côte d’Ivoire). Les seconds sont intervenus pour la première fois, jeudi ; ce qui peut surprendre une quinzaine de jours après leur déploiement mais s’explique par le nombre réduit de soldats français blessés lors de la guerre-éclair dans le nord du Mali. Didier Reynders a eu raison de rappeler que la Belgique avait été parmi les premières nations à venir en aide à la France quand d’autres, et non des moindres au plan européen, tergiversaient.
Dans le cadre de la mission EUTM Mali, la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a formellement demandé jeudi le concours de la Belgique. Le déploiement européen requiert trois types de compétence : des instructeurs proprement dit, des forces qui assurent leur protection et des moyens logistiques. Le gouvernement belge est sollicité pour une participation à la force de protection. Au ministère de la Défense, le volet formation aurait la préférence, étant donné l’expérience acquise par la Belgique dans ce domaine en Afghanistan et en République démocratique du Congo.

C’est là où le débat s’anime. Didier Reynders l’a laissé entendre : la Belgique ne peut pas prendre part, avec ce niveau d’implication, aux deux missions à la fois. Le point de vue se justifie sans doute. La crise impose d’être parcimonieux dans les dépenses. La Belgique est déjà présente militairement sur plusieurs fronts internationaux (Afghanistan, Liban, Congo-Kinshasa, Océan Indien dans la lutte contre la piraterie maritime…). L’état de notre armée (singulièrement dans le transport aérien et le service médical, lire Le Vif/L’Express du 25/01) oblige à faire des choix.

A ces arguments, on pourrait en ajouter un autre : l’effort européen doit être équitablement réparti. Or si on peut difficilement demander à la Grèce de grever un peu plus encore son budget, l’Allemagne, par exemple, au vu de sa santé économique et de son poids politique, pourrait sans doute s’impliquer davantage. Nul doute que la Belgique, en tant qu’Etat pionnier de la construction européenne, remplira son rôle au Sahel. Mais mieux vaut une mission à la hauteur de nos moyens qu’une aventure irréfléchie.

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