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L’Ymagier

Guy Gilsoul Journaliste

Depuis tant et tant d’années, Jacques Lacomblez, 84 ans, écoute l’univers comme avant lui Mallarmé, Novalis ou encore Morton Feldman dont il entend les couleurs et les sons.

Comme eux, il construit patiemment avec le métier qui est le sien, tirer des lignes, poser la teinte, des ponts entre la vie de l’infiniment petit et son contraire. Et chaque jour, l’aventurier se penche sur un dessin venu du hasard et des musiques, cosses, fruits, roches ou grappes cellulaires à partir desquels d’autres, parfois en miroir vont tisser des vides et des tensions alors que, parfois l’un ou l’autre accord d’une dissonance cristalline piège la corde tendue. Là, un petit carré noir, là, un tracé en pointillé autour duquel une nuée blanchâtre parait venir du support lui-même. De ces liens entre attraction et répulsion, se construit peu à peu un cheminement singulier pour chaque spectateur. L’oeil se pose comme la pointe des pieds sur les pierres plates d’un jardin et va, en abandonnant peu à peu comme nous y invite le peintre, cet égo qui nous emprisonne. Comme chez le poète romantique allemand dont il récite parfois des poèmes entiers, il s’agit chez lui de « réaliser la représentation de l’irreprésentable, voir l’invisible, toucher et percevoir l’impalpable ». Et puisque, comme l’affirmait Mallarmé, « ce n’est pas avec des idées qu’on fait des vers, c’est avec des mots », le peintre troque le terme « artiste » contre celui de « fabricant », soucieux d’atteindre par une technique d’une immense subtilité, le souffle qui anime d’un aura puissante, les formes et les structures. Dans les tous derniers travaux sur papier, hommage au compositeur allemand Helmut Lachenman, il va encore plus loin et signe des oeuvres qui, par le traitement chromatique et les qualités graphiques, visent comme la musique du compositeur allemand à produire non plus le son de l’instrument mais le souffle qui le précède. Peut-être afin de rejoindre plus près encore le mot de Novalis : « l’extérieur est un intérieur élevé à l’état de mystère ».

Bruxelles, Galerie Quadri. Av Reine Marie Heniette 105 (1190). Ve et SA de 14h à 18h et sur rdv 026409563. www.galeriequadri.be

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