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L’homme politique, cette superstar

Muriel Lefevre

Le culte de la personnalité atteint des sommets en Allemagne avec une affiche d’Angela Merkel de 70 mètres sur 20 dans les rues de Berlin. C’est qu’au-delà d’un programme, les gens votent aussi pour une personnalité, même en Belgique.

Qu’Angela Merkel soit une superstar en Allemagne, c’est un euphémisme. Selon les sondages son score monte jusqu’à 60 % alors que son parti, le CDU, stagne à 40 %. Du coup, rien de surprenant à ce que le parti utilise « Mutti » comme égérie. Sauf que depuis lundi, le CDU a vu les choses en grand. Et même en excessivement grand puisque les mains d’Angela Merkel s’affichent sur un poster de 70 mètres sur 20 à côté de la gare de Berlin. Composé de 2150 photos d’Allemands imitant la pose si typique de la chancelière, l’affiche électorale fait grincer de nombreuses dents au sein des partis de l’opposition qui dénoncent une glorification excessive de la personne au détriment du programme. Si l’argument est louable et trouve un écho auprès de nombreux observateurs, c’est pourtant une réalité politique: au-delà d’un programme, les gens votent aussi pour des personnalités.

Le culte de la personnalité comme argument électoral ?

À l’heure où les électeurs sont de plus en plus volatiles, les partis ne peuvent plus se permettre de se cantonner uniquement à leur programme. « Si les partis misent davantage sur certaines personnalités politiques, c’est aussi par manque de choix. Les gens ne votent plus pour un seul et même parti toute leur vie. Il faut donc aller « chercher » l’électeur en lui proposant des personnes facilement identifiables et qui sortent du lot » explique le politologue Nicolas Bouteca, de l’université de Gand.

Au-delà du programme, l’électeur se focalise donc aussi sur une personne. Et il n’y a rien de plus normal là-dedans. « La plupart des gens connaissent le programme dans les grandes lignes et ça leur suffit. Car, à moins d’être un spécialiste, il est tout simplement impossible de connaître les moindres détails de chaque programme. La personnalité des hommes politiques joue donc un rôle non négligeable. C’est ce qu’on appelle les arguments non politiques qui sont par exemple le charisme, l’expérience, les talents d’orateurs, bref ! ce que la personne dégage » précise encore le politologue.

Un politique doit se « vendre » et façonner une image pour attirer l’attention. « Si on ne peut pas à proprement parler de marketing, certains politiques belges ont joué sur ce tableau. Par exemple, la vraie percée de Bart De Wever en politique s’est produite après son apparition à l’émission télé « De Slimste mens » où il est apparu brillant et drôle. Mais, parfait cas de contre-exemple, le manque de clinquant et le sérieux affiché par Herman Van Rompuy vont au contraire rassurer l’électeur qui pense que ce dernier travaille bien et avec sérieux ».

Bart De wever s’était lui aussi affiché en grand

En 2012, Bart De Wever s’était lui aussi exposé en grand sur deux affiches de 77 mètres carrés au centre d’Anvers. Loin de passer inaperçues, elles avaient provoqué quelques remous et bisbilles autour des différentes interprétations autour de la loi réglant l’affichage électoral. Or celle-ci est pourtant claire puisqu’elle interdit à partir de trois mois avant l’élection de faire de la propagande pour des partis, des listes ou des candidats sur des panneaux ou affiches à caractère commercial. Les panneaux de plus de 4 m2 étant également proscrits.

Ceci étant dit – et même si certains étaient tentés de ne pas respecter la loi – il n’y a pourtant peu de chances de voir fleurir de gigantesques posters lors des prochaines élections. Pour Nicolas Bouteca, nos politiques restent encore et toujours fidèles aux médias traditionnels pour se faire voir et entendre.

ML

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