Karel De Gucht © BELGA

Karel De Gucht : « Je constate que la N-VA est devenue plus modérée »

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Âgé de 61 ans, Karel De Gucht (Open VLD) ne s’ennuie pas. On sent pourtant que la politique de pouvoir lui manque. De Zondag s’est entretenu avec lui.

Comment allez-vous?

Karel De Gucht: « Bien. J’ai clôturé l’époque de la politique active. Mentalement aussi. Il ne faut pas s’éterniser. Je suis en train de me réorienter. Cet adieu est définitif, mais je n’exclus pas une fonction internationale ».

Récemment, vous êtes allé trois mois à Harvard. Ils vous connaissent là-bas ?

De Gucht: « Ils savent qu’un Commissaire européen au Commerce (une fonction qu’il a remplie de 2010 à 2014, ndlr) joue un rôle à un niveau mondial. Mais ce qui frappe, c’est le manque d’intérêt pour l’Europe. À Harvard, il n’y a même pas de chaire consacrée à l’UE. À cet égard, les Américains se trompent, car ce n’est pas avec les Chinois qu’ils vont maintenir le monde libre ».

Vous désirez également être nommé administrateur de Belgacom. Pourquoi ?

De Gucht: « Belgacom est une entreprise cotée en Bourse, il ne serait pas professionnel de ma part d’en parler maintenant. C’est au gouvernement à prendre cette décision. J’ai reçu l’autorisation de la Commission européenne ».

Les politiques qui acceptent des mandats bien payés dans des entreprises se heurtent souvent aux critiques, pensez à Jean-Luc Dehaene. Craignez-vous ces critiques ?

De Gucht: « Évidemment que c’est critiqué. C’est caractéristique de la société de jalousie. En Flandre, on ne peut rien faire sans être critiqué. D’ailleurs, je ne comprends pas pourquoi un ex-politique ne pourrait rien faire dans le monde de l’entreprise. Je ne vais faire que des choses qui me passionnent, et pas pour des raisons financières ».

Avez-vous été très déçu que le gouvernement choisisse Marianne Thyssen (CD&V) au lieu de vous comme nouveau commissaire européen ?

De Gucht: « Je ne trouve pas qu’il s’agisse de la bonne description. Le commissariat européen a été mis dans le même sac que les postes de gouvernement. Un parti a fourni le premier ministre alors que l’autre a choisi le commissaire, ce qui, à mon humble avis, n’est pas une bonne idée. On n’a jamais discuté de mes résultats au poste de commissaire. On ne peut pas s’attendre à ce que je sois content. Mais bon, je n’en veux pas à Marianne Thyssen. Je n’aurais d’ailleurs jamais accepté son portefeuille. Je caressais d’autres ambitions. Si le gouvernement avait joué le jeu intelligemment, j’avais une chance réelle d’être nommé Haut-Représentant de l’Union pour les affaires étrangères. Et il ne s’agit pas d’une invention de ma part ».

Avant les élections, vous vous êtes montré très dur à l’égard de la N-VA. Pourriez-vous gouverner avec eux ?

De Gucht: « Si l’accord gouvernemental me plaît, oui. L’ambition de ce gouvernement est de mener une politique économique de centre droit, ce qui n’est pas possible avec les socialistes. Ces derniers n’ont pas de remèdes pour sortir de pays de la crise. Tout ce qu’ils proposent coûte plus cher, ce qui signifie par définition qu’il faut prendre la N-VA dans un gouvernement. En revanche, il ne faut pas laisser tomber ses principes pour autant, ce que le VLD ne fait pas. Nous restons fidèles à nos valeurs dans les questions éthiques, à la société ouverte, etc. Par exemple, la Belgique ne s’oppose pas au plan de répartition européen pour les réfugiés « .

Je n’ai pas l’impression que le Secrétaire d’État Theo Francken (N-VA) soit très enthousiaste à ce sujet.

De Gucht: « Il faut comparer notre attitude à celle du Royaume-Uni. Là-bas, tous les partis mènent une politique contre la migration. Chez nous, personne ne le fait, hormis le Vlaams Belang et une partie de la N-VA. Theo Francken ne décidera pas tout seul. Si cette répartition est raisonnable, il faut y adhérer. Ce sera également le point de vue de mon parti ».

Vous êtes devenu gentil à l’égard de la N-VA.

De Gucht: « Non, mais je constate que la N-VA désire vraiment fonctionner dans ce gouvernement. Elle s’est modérée. Sinon, elle n’y arriverait pas. Bart De Wever le sait très bien ».

Êtes-vous satisfait de votre carrière?

De Gucht: « Toutes les fonctions que j’ai exercées m’ont plu. Parlementaire européen. Président de parti, même si ce n’était pas une période facile. Nous avions fourni le premier ministre, ce qui complique le fonctionnement autonome d’un parti . J’ai vécu une période fantastique quand j’étais ministre des Affaires étrangères. J’ai appris à connaître le monde. Et en tant que commissaire européen, j’exerçais même un impact sur la politique mondiale. Je peux donc être content, oui ».

Auriez-vous souhaité être premier ministre?

De Gucht: « J’aurais aimé faire ça, oui. Je suis aussi suffisamment sûr de moi pour dire que j’en aurais été capable. Mais bon, on ne peut pas tout avoir. C’est la vie.

(De Zondag/Paul Cobbaert)

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