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Jusqu’à 600 euros pour abandonner sa voiture de société, vraiment intéressant ?

Le Vif

Le gouvernement Michel a annoncé lors des dernières négociations budgétaires son intention de remplacer le système fiscalement attrayant des voitures de société par un budget de mobilité. Sur la table notamment; le choix laissé au travailleur entre du cash ou son véhicule de fonction. Une mesure intéressante ou une arnaque ? On fait le point.

Dans les propositions de mobilité émises par Charles Michel, on trouve non seulement un abonnement aux transports en commun ou un vélo d’entreprise en remplacement de la voiture de société, mais aussi un salaire net plus élevé si l’employé décide de se passer de son véhicule. Le montant alloué dépendra du modèle du véhicule et des conditions de leasing. Quant aux travailleurs qui n’ont pas de voiture de société, ils sont les perdants de cette nouvelle politique mise sur la table car ils ne recevront pas un centime de plus ni d’autres avantages.

Les travailleurs qui disposent d’une voiture de société en leasing – ils sont 400 000 en Belgique – seront mis face à un choix en concertation avec leur employeur : la garder ou recevoir de 300 à 600 euros nets supplémentaires (selon le modèle) sur leur salaire mensuel selon des chiffres avancés par De Standaard. Ce montant qui varie du simple au double reste encore assez flou. La règle: plus la voiture coûte cher, plus le supplément net par mois sera élevé.

Le vice-premier ministre Didier Reynders a été le premier – et le seul – à parler d’un montant de 450 euros. Or, le budget moyen de leasing auto pour les voitures de société en Belgique tourne autour de 560 euros HTVA, selon des chiffres fournis par Renta, la Fédération belge des loueurs de voitures. De Standaard avance, de son côté, le montant de 300 euros nets pour une Renault Mégane et de presque le double pour une Audi A6.Ce montant devrait être moins imposé, car il ne fera pas partie du salaire brut. L’employé devrait donc récupérer les coûts de leasing amputé de l’avantage fiscal.

Budgétairement neutre

Dans cette proposition, il est important que le budget mobilité soit une alternative budgétairement neutre aux voitures de société. Et c’est là que le bât blesse, communique la société européenne de services de ressources humaines SD Worx dans les quotidiens flamands De Standaard et De Tijd.

« Une telle augmentation de salaire n’est possible que si l’employé ne doit pas payer de cotisations sociales ou d’impôts sur le salaire supplémentaire« , ressort-il chez SD Worx. « Cela semble peu vraisemblable, car cela coûterait énormément d’argent au fisc et à la sécurité sociale. »

Si le salaire supplémentaire est imposé aux taux normaux, l’employé conservera beaucoup moins que les 450 euros avancés par Reynders. Le calcul effectué par la société de consultance en ressources humaines avance qu’une Golf VW coûte mensuellement 373 euros (taxes et impôts inclus) à une société. Quand ces frais sont convertis en salaire brut, l’employé ne reçoit, au final, que 165 euros supplémentaires en net par mois. Selon SD Worx, c’est beaucoup trop peu pour persuader un employé de ne pas opter pour une voiture de société.

L’Open Vld avait déjà mis au point une proposition en mars concernant la manière dont le salaire supplémentaire devrait être imposé pour éviter que l’avantage ne soit réduit à peau de chagrin. Selon le parlementaire Egbert Lachaert, ce salaire supplémentaire devrait figurer sous un code spécifique sur la fiche salariale et être imposé de la même manière que le montant du leasing de la voiture de société, donc via un avantage de toute nature. « Ainsi, cela ne coûtera pas un euro de plus à l’employeur et l’employé ne recevra pas un euro de moins. Car en travaillant avec un code de salaire net séparé, vous ne risquerez pas de tomber dans une tranche d’imposition plus élevée », ressort-il. Dans De Tijd, Lachaert fait savoir que sa proposition sert de base pour le débat concernant le budget mobilité.

Désavantages

Ce système présente aussi plusieurs désavantages, comme l’explique De Morgen. Les adversaires de cette mesure craignent qu’elle ne modifie pas les habitudes des navetteurs belges. La FEBIAC, la Fédération Belge de l’Automobile, craint que les travailleurs n’utilisent ce budget de mobilité en remplacement de leur voiture de société pour acquérir un modèle moins cher d’occasion, mais aussi plus polluant.

Autre facteur déterminant dans ce choix : le facteur « carburant ». La plupart du temps, les employés qui disposent d’une voiture jouissent aussi d’une carte essence, parfois sans restriction selon leur situation (indépendant, commercial,…). Un avantage financièrement intéressant pour les trajets quotidiens domicile-bureau, mais aussi pour les escapades de week-end et les grandes vacances.

Le kilométrage moyen annuel pour un véhicule de société est de 28.500 kilomètres, selon la FEBIAC qui détaille, sur le site de l’Echo, qu’en se basant sur une consommation moyenne de 7 litres/100 km, on arrive à une consommation d’environ 2.000 litres par voiture et par an. À 1,2 euro le litre, cela représente une dépense mensuelle d’environ 200 euros, un montant non négligeable à prendre en compte.

En outre, pour une voiture privée, il faut aussi faire peser dans la balance les entretiens, les réparations, les pneus hiver ou encore, les coûts de réparation en cas d’accident…des sommes qui peuvent vite grimper.

Un autre bémol pointé du doigt est le fait que les employés qui ne disposent pas de voitures de société ne profiteront pas de cette nouvelle politique de mobilité. Ils ne pourront jouir ni d’un abonnement avantageux aux transports en commun ni d’un salaire plus élevé pour modifier leur habitudes de mobilité.« Il faut plus de temps nécessaire pour offrir à tous un budget mobilité » est d’avis le parlementaire Lachaert.

Selon L’Echo, les services publics concernés doivent se mettre d’accord sur les modalités de la mesure pour avril 2017, elle ne devrait pas être mise en oeuvre avant l’automne.

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