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Jean-Luc Crucke (MR) : « Di Rupo devra nous rendre la pareille »

Les libéraux ont pris de gros risques en approuvant l’accord sur BHV. Ils attendent maintenant d’être payés en retour. C’est le message lancé par le député wallon Jean-Luc Crucke.

Le Vif/L’Express : Entre MR et FDF, a-t-on atteint le point de non-retour ?

Jean-Luc Crucke : J’aimerais que ce ne soit pas irréversible. Rien que sur le plan humain, cela m’attriste. Pendant dix ans, on a siégé côte-à-côte au Parlement. Des liens se sont noués. Moi, je n’oublie pas notre histoire commune. Je reste convaincu qu’avec le FDF, les choses qui nous rassemblaient étaient plus nombreuses que celles qui nous divisaient.

Vous parlez à l’imparfait. Cela en dit long.

La situation est très clivée. Je ne vois pas comment en sortir. Des paroles blessantes ont été prononcées. Certains propos ont été trop loin. Malheureusement, je ne me fais aucune illusion sur le vote qui interviendra dimanche au conseil général du FDF.

Comment en est-on arrivé là ? Qui est responsable ? Charles Michel, Olivier Maingain ?

Il y a effectivement eu des problèmes relationnels. On voit aussi que nous sommes dans une phase critique de l’évolution de la Belgique. Nous, au MR, on a pris nos responsabilités. On a décidé d’appuyer ce compromis pour résoudre enfin le problème de BHV, qui empoisonne le pays depuis quarante ans. Ce n’est pas la meilleure des solutions, je le sais. Mais il y avait urgence à travailler sur le socio-économique – c’est notre core-business au MR -, et le FDF ne peut pas nous demander d’y renoncer. La crise est là. On n’a plus le choix. Il faut prendre à bras- le-corps les problèmes qui touchent le portefeuille des gens.

Vous avez déclaré par le passé que vous vouliez renforcer les droits des francophones de Flandre, au-delà même de la périphérie bruxelloise. L’accord sur BHV prévoit tout le contraire : les droits des francophones du Brabant flamand sont partout rabotés, sauf dans les six communes à facilités.

J’en suis parfaitement conscient. Je ne suis pas enthousiaste par rapport au compromis trouvé. Nous sommes nombreux à vivre cet accord comme un déchirement. Qu’il ne rendra pas la vie des francophones de Flandre plus facile, ça me paraît clair. Qu’il la rendra plus difficile encore, ça me paraît clair aussi. Un peuple intelligent et moderne respecte ses minorités. J’aimerais que les Flamands comprennent ça un jour. Sur cette question des minorités, croyez-en mes longues discussions informelles avec des élus flamands, la N-VA est plus ouverte que le CD&V. La N-VA veut une rupture plus radicale, mais elle est aussi prête à des concessions symboliques plus fortes. Le CD&V, lui, reste empêtré dans ses contradictions par rapport à la Belgique.

Charles Michel a pris des risques en approuvant l’accord sur BHV. Il est possible que le MR le paye électoralement. Vous attendez une forme de reconnaissance de la part du formateur Elio Di Rupo ?

Alors, ça, c’est une très bonne question. Pour moi, ce n’est pas terminé. Les négociations sur le volet socio-économique s’annoncent très périlleuses. Et là, c’est sûr qu’il faudra nous respecter. Il faudra voir la trace des libéraux dans le texte final ! Par son sens des responsabilités, Charles Michel a permis au formateur d’aboutir. Maintenant, Elio Di Rupo va devoir nous rendre la pareille.

Les événements de ces derniers jours pourraient favoriser la mise en place d’une majorité socialiste-libérale en Wallonie après 2014 ?

En tout cas, ils ne compliquent pas la concrétisation de cette hypothèse. Je pense que dans les moments de crise et de difficulté, comme ceux que nous vivons, les grands partis doivent travailler ensemble. Je ne suis pas socialiste, mais pour le bien de la Wallonie, on aura besoin de passer par cette phase-là. l

ENTRETIEN : FRANÇOIS BRABANT

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