Raphaël Enthoven

Islam : Rire ou mourir

Raphaël Enthoven Philosophe VIP

L’intolérance des fondamentalistes n’est pas la preuve d’une foi puissante.

Combien faut-il mépriser les musulmans pour les croire incapables de faire la différence entre la caricature et l’irrespect ! Et faut-il douter de Dieu pour défendre qu’on se moque de Lui ! Dans cette nouvelle affaire des caricatures du Prophète, les salafistes sont les seuls mécréants, et les vrais islamophobes sont ceux qui dénoncent une « provocation ».

Contrairement à ce que pensent les intégristes, il faut avoir une très pauvre idée de Dieu pour interdire qu’on tourne son Prophète en dérision, et on ne L’honore pas, mais on Lui tourne le dos, quand on Le défend de cette manière. Car qui aime Dieu pèche par orgueil quand il fait effort pour que Dieu l’aime en retour, et qui soutient que Dieu est irrité par un film ou un dessin parle de Dieu comme s’Il n’était qu’un homme. Lever le poing contre les caricatures de Charlie hebdo, c’est insulter deux fois le Tout-Puissant : d’abord en se prenant pour son porte-parole, ensuite en Le prenant pour un souverain susceptible et vaniteux. L’intolérance des fondamentalistes n’est pas la preuve d’une foi puissante, elle est celle d’une impiété qui se cache sous la colère. Si les salafistes croyaient en Dieu, ils ne L’imposeraient à personne.

Qui caricature l’islam ? Le dessinateur ou le fanatique ? Qui offense Dieu ? Celui qui rit ou celui qui menace ?

A l’inverse de ce que croient les indécis qui vantent la liberté d’expression tout en fustigeant les caricatures, les musulmans ne sont pas des imbéciles, ils sont d’excellents citoyens parfaitement aptes à ne pas confondre blasphème et humiliation, c’est-à-dire plaisanterie et racisme. Mais qu’importe ! « Dans le contexte actuel, disent-ils, ce n’est pas le moment de jeter de l’huile sur le feu »à Quand est-ce le moment ? Quand sera-t-il suffisamment calme pour qu’on y puisse enfin rire les uns des autres ? De quoi avez-vous peur ? De vexer des brutes qui se jettent déjà sur le premier film venu pour donner libre cours à la haine qui les anime ? De qui avez-vous peur ? Des musulmans dans leur ensemble, que, dans votre ignorance, vous tenez pour des terroristes potentiels ? Qui déteste l’islam, ici ? Les dessinateurs qui s’en amusent ou les munichois qui se couchent devant l’idée qu’ils s’en font ? Aux irresponsables assis entre deux chaises, parce qu’ils jouent sur deux tableaux, il faut inlassablement rappeler que trop de prudence est un risque supérieur à l’audace, et que ce n’est pas l’outrance de Charlie hebdo mais bien la mollesse de leur propre indécision qui alimente la confusion entre islam et islamisme. « En matière de presse, dit Tocqueville, il n’y a donc réellement pas de milieu entre la servitude et la licence. Pour recueillir les biens inestimables qu’assure la liberté de la presse, il faut savoir se soumettre aux maux inévitables qu’elle fait naître. Vouloir obtenir les uns en échappant aux autres, c’est se livrer à l’une de ces illusions dont se bercent d’ordinaire les nations malades, alors que, fatiguées de lutte et épuisées d’efforts, elles cherchent les moyens de faire coexister à la fois, sur le même sol, des opinions ennemies et des principes contraires. »

Ce n’est pas cette semaine qu’il faut se moquer des religions, c’est tout le temps, bande de lâches ! Rire ou mourir, c’est la devise des démocraties. Les indécis sont la honte de la République. Les intégristes sont la honte de l’islam. Les seconds ne sont dangereux que quand les premiers sont au pouvoir.

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