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« Inviter une personne esseulée pour Noël ? Comme si cela faisait une différence »

À l’approche des fêtes de fin d’année, notre consoeur de Knack Ann Peuteman se sent toujours un peu nostalgique. Durant son enfance, tout était tellement plus chaleureux. Ou n’est-ce qu’une impression ? « Autrefois, c’était simple d’inviter quelqu’un d’esseulé », écrit-elle. « Aujourd’hui, il est plus difficile de détecter la solitude et de lutter contre elle. »

C’était au cours de religion. Chacun son tour, on pouvait raconter ce que nous réservait Noël. De la dinde ! Du gourmet ! Des cadeaux! Les cousins en visite! Et puis c’était le tour de Katy. « Chaque année, nous invitons une personne esseulée », a-t-elle dit crânement. Elle avait à peine 9 ans et était pleinement consciente de l’impact de ses mots. C’est à peine si l’institutrice n’a pas applaudi, et nous, avions un peu honte. Chez nous, on n’invitait jamais de personne esseulée. Pas à Noël du moins.

Plus tard non plus, je ne l’ai jamais fait. J’ai toujours fêté Noël chez ma mère et je ne peux m’imaginer débarquer avec un inconnu esseulé. Vous trouvez que c’est une excuse facile ? C’est le cas. Mais j’espère que je compense un peu en invitant des amis esseulés ou tourmentés à d’autres moments de l’année – de sorte qu’à mes moments de solitude, j’ai toujours quelque part où aller. Mais avec des connaissances plus éloignées ou des visages familiers du quartier, c’est plus difficile. Ne trouveraient-ils pas étrange ou même insultant que je les invite à Noël ou une autre fête ? Et comment savoir si quelqu’un est esseulé ou non ? Autrefois, c’était facile. On connaissait ses voisins et les personnes esseulées se reconnaissaient de loin. Généralement, c’étaient des personnes âgées qui ne s’étaient jamais mariées, ou qui avaient perdu leur conjoint et n’avaient pas d’enfants. On les invitait régulièrement, pour un café ou un Elexir d’Anvers. Y compris à Noël.

Cependant, aujourd’hui la solitude ne se limite plus aux voisins âgés. Elle est également latente parmi les étudiants obligés de passer les vacances et les jours fériés à leur kot, les veufs dont les enfants vivent loin, les parents séparés qui doivent passer des moments cruciaux sans leurs enfants, des célibataires qui travaillent tellement durement qu’ils n’ont pas investi dans un cercle d’amis, des gens trop malades pour sortir de chez eux, et surtout ceux qui ne peuvent se permettre de vie sociale. Souvent, cette solitude se cache dernière des façades en apparence normales – tout comme la pauvreté.

Ces dernières années, les médias ont régulièrement publié des articles à propos d’administrations ou d’organisations qui sortent les grands moyens pour détecter la solitude. Souvent auprès des personnes âgées. Ainsi Ostende a eu l’idée d’engager des facteurs, et Knokke-Heist investit dans un système informatique qui peut entendre à votre voix si vous êtes esseulé ou non. La ville de Bruges a même proposé un véritable plan anti-solitude. Il est vrai après qu’il a fallu des semaines pour constater le décès de quatre Brugeois isolés.

Inviter une personne esseulée pour Noël ? Comme si cela faisait une différence

Tout cela est évidemment très noble. Mais que faire si on sait où vivent toutes ces personnes esseulées ? Allons-nous leur envoyer un homme ou une dame de compagnie ? Essayer de les incorporer dans le club de bridge local ? Les inviter à Noël ? Beaucoup de gens refuseront ces invitations. La solitude n’est pas un trou qui se laisse combler facilement. Pour ça, le manque est souvent trop spécifique. Une octogénaire a du mal à se passer de sa fille et de ses petits-enfants qui vivent de l’autre côté de La Manche. Un père se sent seul parce que ses enfants sont chez leur mère le 25 décembre. Une femme aimerait beaucoup accepter l’invitation de ses meilleurs amis, mais ne peut se permettre d’acheter un cadeau. Un jour de Noël on ne peut tout de même pas arriver les mains vides ?

Récemment, j’ai parlé à Madeleine. Elle avait reçu cinq invitations pour Noël. Mais elle n’a voulu en accepter aucune. « L’année passée, j’ai fêté Noël chez une amie », dit-elle. « Tous ses enfants et petits-enfants étaient là. Très convivial. Mais cette chaleur m’a surtout rappelé les absents : ma propre famille. » Jamais encore, elle ne s’était sentie aussi seule.

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