Gérald Papy

Hollande-Sarkozy : sursaut salvateur ou passation de pouvoir

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Emerger sans avoir été mis k.o. d’un pugilat tel que celui que nous ont proposé François Hollande et Nicolas Sarkozy révèle incontestablement une aptitude à l’exercice du pouvoir. On savait que Nicolas Sarkozy était une « bête politique ». François Hollande s’est révélé en être une autre, mercredi soir, à l’issue d’un débat tendu comme jamais dans l’histoire de la Ve République et où il s’en est fallu de peu que des noms d’oiseaux soient lancés.

Le Président sortant partait en position de challenger dans cette joute, le résultat du premier tour de la présidentielle et les sondages récents continuant à donner l’ascendant au candidat socialiste pour la confrontation finale de dimanche. Nicolas Sarkozy devait donc privilégier l’attaque. C’est ce qu’il a fait, tantôt pugnace, tantôt agressif sur plusieurs dossiers et en variant les méthodes.

Sur la méthode, il a repris à son compte des critiques formulées à l’encontre de François Hollande par les rivaux de son camp lors des primaires socialistes. Et il a surtout tenté de faire accréditer l’idée que son adversaire soit mentait, soit changeait d’opinion comme une girouette. Sur le fond, il a exploité deux dossiers sensibles, la politique nucléaire et le vote des étrangers non-Européens aux élections municipales, pour mettre en difficulté François Hollande. Sur le premier, le candidat socialiste s’est défendu en minimisant le programme de fermeture de centrales nucléaires (une seule pendant son éventuel premier quinquennat). Sur le second, il a renvoyé la balle dans le camp de Nicolas Sarkozy en affirmant que celui-ci s’était montré favorable sur le principe, en 2008 encore, à cette option.

Dans une démarche plus classique, un François Hollande en apparence plus serein, a dénoncé le bilan de son adversaire. A plusieurs reprises, il a cruellement rappelé que le Nicolas Sarkozy de 2007 avait promis de réduire le taux de chômage en France à 5% , les derniers chiffres le fixent à 10 % de la population active. Et comme un leitmotiv, le candidat socialiste a tenté d’accréditer l’idée que Nicolas Sarkozy, malgré ses dénégations virulentes, avait été le « président des riches » et des privilèges : « Je protège les enfants de la République. Vous protégez les riches », a été jusqu’à dégainer François Hollande. Nicolas Sarkozy n’a pas été en reste en termes de phrases assassines en décochant à son rival un « Vous êtes un petit calomniateur » ou en le traitant de « Ponce Pilate », dans une peu heureuse allusion à l’affaire DSK.

Les échanges de cet unique débat des finalistes de la présidentielle 2012 ont donc été musclés et, malgré quelques moments confus d’inutile hypertension, à la hauteur de l’enjeu de l’élection. Difficile cependant de jauger l’impact du débat sur le vote de dimanche. Apparu tout de même un peu usé, Nicolas Sarkozy a conforté son image de battant et de dirigeant compétent et responsable. Plus pragmatique que son adversaire, il n’a pas hésité en fin de débat à draguer ouvertement les électeurs de Marine Le Pen et de François Bayrou.

A cette aune, François Hollande a sans doute créé la surprise en présentant in fine un profil plus présidentiel. La longue tirade où il a entamé chaque énoncé de ses propositions par la formule « Moi, Président de la République, je… » a dû irriter au plus haut point Nicolas Sarkozy et ses supporters et a dû doper au maximum les partisans du candidat socialiste, qui ont pu imaginer que le succès était à portée de main. Les Français en décideront dimanche. Que l’un ou l’autre l’emporte, il faudra que l’heureux élu fasse montre d’une grande virtuosité pour être le Président du rassemblement que les deux candidats ont promis d’être, chacun à leur manière.

Gérald Papy


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