Harcèlement : « Il existe de véritables petits cons de douze ans »

Ce mardi, le Palais royal organise une table ronde sur le harcèlement. Une belle initiative, je ne dis pas le contraire, mais qui risque de se réduire à de belles paroles et à de bonnes intentions. Le harcèlement parmi les enfants et les jeunes est encore trop souvent minimisé. Aussi est-il grand temps d’instaurer une tolérance zéro.

Il y a quelque temps, le prince Gabriel est rentré avec un bracelet en plastique contre le harcèlement. Sa mère a trouvé ça magnifique et lui a dit de le garder toute la semaine. Notre reine est contre le harcèlement, et c’est louable de sa part. Mais soyons honnêtes : c’est le contraire qui serait étonnant. Toutes les écoles et associations de jeunesse sont contre le harcèlement, tout comme le ministre de la Jeunesse, le Commissaire aux Droits de l’Enfant, les syndicats, les organisations d’employeurs et le reste de la société civile panachée. Mais en quoi cela nous avance-t-il ?

La reine Mathilde et le prince Gabriel
La reine Mathilde et le prince Gabriel © BELGA

Les chansons, les posters et les bracelets contre le harcèlement ne servent strictement à rien hormis, peut-être, à stimuler encore un peu plus l’engagement d’enfants et d’adolescents déjà convaincus. Même constat pour les plaques « Écoles contre le harcèlement » qui ornent de nombreuses cours de récréation flamandes. Trop souvent, c’est la seule arme utilisée contre le harcèlement, malgré toutes les actions de sensibilisation et de formation. Si un élève est effectivement harcelé, c’est parfois ignoré pendant très longtemps. Comme ce petit garçon traité de « Chinois de merde » et poussé constamment sur le sol. Réponse de l’éducatrice: « Vous devez apprendre à résoudre vos disputes vous-mêmes ». Souvent, on n’intervient qu’au moment où les parents d’un enfant tourmenté tirent la sonnette d’alarme. Généralement, les vexations sont en cours depuis longtemps, car les enfants ont beaucoup de mal à mettre leur père ou mère au courant.

Quand les parents viennent se plaindre, la plupart des écoles interviennent, mais pas toujours de manière efficace. La plupart du temps, elles organisent un débat sur le harcèlement ou confrontent les personnes concernées entre elles. Souvent, l’enfant harcelé est appelé auprès d’un éducateur pour l’aider à mieux gérer la situation, un signal malheureux, autant pour la victime que pour ses tourmenteurs.

Les parents aussi ont encore des choses à apprendre. Beaucoup d’entre eux ne savent pas comment aider leur enfant s’il est harcelé et les parents d’élèves harceleurs ont souvent tendance à minimiser le problème. Parce qu’ils ne peuvent croire que leur bel enfant soit capable d’un tel comportement, mais aussi parce qu’ils trouvent la victime un peu faible. Leur enfant ne se plaindrait pas, il n’est pas en sucre, lui.

Si le harcèlement a toujours existé, l’impact sur la vie d’un enfant s’est très fort amplifié depuis qu’il existe un pilori numérique

Si le harcèlement a toujours existé, l’impact sur la vie d’un enfant s’est très fort amplifié depuis qu’il existe un pilori numérique. Après l’école, le harcèlement continue sur Facebook, Snapchat ou l’un ou autre jeu en ligne. Récemment encore, un petit groupe de jeunes de seize ans a réalisé une page Facebook sur un de leurs congénères dont ils se moquaient à longueur de journée. Mais Facebook n’a pas vu le problème et a refusé de supprimer la page.

À la décharge de la reine, la table ronde qu’elle organise sur le harcèlement lui permet de recevoir toute une série de spécialistes au palais. L’objectif est d’y développer un plan global contre le harcèlement. Cependant, un tel plan ne peut être efficace que si l’on y associe de véritables conséquences palpables. Il s’agit évidemment d’enfants et de jeunes et il faut donc leur donner une deuxième, troisième et quatrième chance. C’est le but de l’éducation. Mais certaines choses ne sont pas négociables. À cet égard, il faut instaurer une tolérance zéro, ne serait-ce que pour éviter que les jeunes pestes deviennent des professeurs qui poussent les élèves pénibles dans un seau de mortier, des patrons qui humilient leurs subalternes ou des employés qui rabaissent leurs collègues. Nous devons enfin voir en face qu’il existe des petits cons de douze ans environ qui – pendant que j’écris ce texte – gravent de profondes entailles dans la vie de certains de leurs congénères, entailles qui ne disparaîtront peut-être jamais.

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