Grexit: « La comparaison avec Kafka n’est pas tirée par les cheveux »

La situation est kafkaïenne. À tel point que le magazine d’affaires The Economist a comparé le dialogue de sourds entre le gouvernement grec de gauche et les leaders politiques et financiers européens à « La Métamorphose ».

Un matin, Gregor Samsa se réveille et constate que son corps s’est métamorphosé en un insecte monstrueux. Quoi qu’il essaie, il ne peut plus communiquer avec ses parents et sa soeur abasourdis. Ils ne comprennent pas ce qu’il veut dire. Progressivement, sa famille ne le voit plus comme un fils ou un frère mais comme un parasite qui les empêche de vivre leur vie. Sa mort intervient comme une délivrance. De la même façon, la Grèce dirigée par Alexis Tsipras et son Syriza est poussée en marge de l’Europe, ce qui ne rend service ni aux Grecs, ni à l’Europe. Comme on le sait, la Grèce doit rembourser plus d’un milliard et demi d’euros au Fonds Monétaire International (FMI), ce qu’elle ne pourra faire que si elle reçoit une autre aide d’urgence de l’Europe. Celle-ci est liée à des conditions que Tsipras ne peut ou ne veut accepter. Il a en effet remporté les élections en promettant qu’il ne baisserait pas les pensions et qu’il n’augmenterait pas la TVA, ce qui est justement ce que l’Europe et le FMI attendent de lui.

En supposant que le parlement grec accepte un tel accord de l’Europe, le premier ministre se trouve toujours face à un choix déchirant. Tsipras a besoin de cet argent pour empêcher une faillite et éviter que son pays quitte la zone euro. Mais s’il le fait, cela signifie que les Grecs s’appauvriraient encore. Entre-temps, l’Europe se rassure en se disant qu’aujourd’hui un éventuel Grexit n’exercerait pratiquement aucune influence sur le développement économique d’autres pays de la zone euro. Même si l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ne partage pas cet avis.

Un mandat clair

Cette semaine, Angela Merkel et François Hollande s’entretiennent à nouveau avec Alexis Tsipras pour chercher une issue. On sait que Merkel souhaite éviter une sortie grecque de la zone euro. Pourtant, il est injuste que Tsipras paie pour la pagaille laissée par ses prédécesseurs avec qui Bruxelles s’entendait beaucoup mieux. Et il n’est pas dénué d’importance que Tsipras ait reçu un mandat clair de l’électeur grec.

Un Grexit serait une défaite absolue pour toute la pensée de coopération et d’intégration européennes.

La comparaison avec Kafka n’est pas tirée par les cheveux. Ce qu’on décide maintenant n’aura pas que des conséquences financières. Un Grexit serait en même temps une défaite absolue pour toute la pensée de coopération et d’intégration européennes. L’économiste français Thomas Piketty plaide depuis longtemps en faveur d’une approche différente et d’un rééchelonnement de la dette grecque. Il craint que les yeux de Bruxelles ne s’ouvrent que lorsque des eurosceptiques comme Marine Le Pen imposeront leur hégémonie et bouleverseront l’Europe.

Pour Angela Merkel, la Grèce est chefsache depuis quelque temps : un problème qui doit être résolu au niveau politique le plus élevé. Dans l’ombre de ces discussions, les ministres de l’Économie français et allemand étaient d’accord sur la nécessité d’une intégration plus poussée des pays de la zone euro. Si l’euro survit à la crise grecque, c’est la seule option possible.

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