Koen Geens. © Belga

Grève dans les prisons : les syndicats flamands et le syndicat libéral francophone ont signé l’accord

Après 35 jours de grève dans les prisons wallonnes et bruxelloises, quatre syndicats sur les six en négociation ont signé lundi l’accord proposé par le ministre de la Justice Koen Geens mercredi dernier.

Les trois syndicats néerlandophones et le syndicat libéral francophone se distancient donc de la CGSP et de la CSC, qui ont rejeté l’accord. Le ministre a souligné la bonne concertation et laisse sa porte ouverte aux deux syndicats francophones.

Le protocole d’accord comprend notamment l’engagement de 480 statutaires supplémentaires dont 386 agents pénitentiaires, soit 75 de plus que dans le protocole conclu le 6 mai dernier mais rejeté par les francophones. Ainsi, d’ici 2016, chaque agent sur le départ sera remplacé jusqu’à ce que le cadre atteigne 7.075 équivalents temps plein contre 7.241 en 2014.

L’accord, qui comprend aussi des mesures pour lutter contre la surpopulation et des travaux d’infrastructure, sera mis immédiatement à exécution, a prévenu Koen Geens. « Je commence par le recrutement des agents pénitentiaires. Dans les prisons où la grève continuerait, je ferais tout pour soulager les détenus et le personnel présent c’est-à-dire les policiers, les militaires et la protection civile ».

Dès demain/mardi, une entreprise privée sera chargée de fournir trois repas par jour aux détenus. « Cela libérera le personnel qui fait les repas habituellement pour ranger, nettoyer les prisons et leur rendre un aspect plus acceptable », a expliqué le ministre de la Justice. Ce dernier a insisté sur le fait qu’il s’agit du seul appel à une entreprise privée, « pour le reste, les services publics restent à la manoeuvre ». Le renfort des policiers et des militaires est maintenu.

Selon les statistiques du syndicat socialiste CGSP, 94,7% des agents francophones en moyenne ont rejeté l’accord parce qu’il ne supprime pas la rationalisation voulue par le ministre de la Justice, Koen Geens, mais également parce que le cadre renforcé proposé n’est valable que pour un an et demi. Les prisons notamment d’Andenne, de Dinant, de Tournai ou encore de Forest en font partie.

Recrutement, gel des économies et diminution de la surpopulation

Cet accord prévoit notamment un recrutement d’agents, le gel des économies en 2016 et la diminution de la surpopulation carcérale.

Quelque 480 agents statutaires, dont des psychologues ou des assistants sociaux, seront recrutés. La plus grande partie des engagements concerne les agents pénitentiaires: 386 agents engagés avant la fin du premier semestre 2017. Concrètement, les départs seront remplacés pour atteindre le cadre de 7.075 équivalents temps plein contre 7.241 en 2014. Toute économie en matière de personnel est donc gelée pour 2016.

L’accord comprend également une prime de flexibilité pour le personnel des établissements qui appliquent la nouvelle méthode de travail « Travailler autrement », la fameuse « rationalisation » décriée par la CGSP et la CSC. Toutes les catégories de personnel qui la mettent en oeuvre recevront trois euros à indexer de l’heure. Ceci sera activé « immédiatement et avec effet rétroactif » par un groupe de pilotage qui validera les établissements concernés. La méthode, « Travailler autrement », sera validée par le Comité de concertation de base de chaque établissement, sur base volontaire et concertée, ajoute l’accord.

Les infrastructures pénitentiaires seront améliorées. L’entretien et les investissements par la Régie des bâtiments (46 millions d’euros en 2016) seront accélérés. Un programme du SPF Justice (10 millions d’euros) sera mis en place pour les petits travaux et la sécurisation des prisons.

La surpopulation carcérale sera limitée à 10.000 détenus, promet l’accord. Ceci grâce à de nouvelles mesures, notamment en matière de détention préventive. Enfin, l’évolution du recrutement, de la surpopulation carcérale et des travaux d’amélioration sera évaluée chaque trimestre. En 2017, une évaluation globale auprès de chaque établissement sera réalisée.

« Les besoins des prisons du sud et de Bruxelles sont niés »

Laurence Clamar, secrétaire permanente de la CSC Services publics, ne cache pas son étonnement à la suite de la signature du protocole d’accord par les syndicats néerlandophones et le syndicat libéral francophone. « Cela confirme que depuis le début, ce sont les prisons du sud du pays et de Bruxelles qui font grève et que l’on répond aux besoins des prisons du nord. »

Pour la représentante syndicale, le ministre attise le feu et apporte du communautarisme dans le débat. « Depuis le début, il fait des propositions qui ne sont pas appropriées aux besoins des prisons qui font grève. » Mme Clamar considère que l’action du ministre est « violente » et affirme que les agents sont « en colère ». La grève dans les prisons francophones du pays qui dure depuis 35 jours ne s’arrêtera pas tant que Koen Geens ne répondra pas à leurs attentes, selon elle.

Le syndicat libéral francophone a toutefois décidé de signer l’accord. « Quand on voit que dans des prisons, on a voté à 98% ou 100% contre le protocole d’accord, comment peut-on décider d’accepter ? Soit ils ne sont vraiment pas représentatifs du tout, soit je ne me l’explique pas. »

Elle comprend toutefois la décision des syndicats néerlandophones. « Bien sûr, ceux qui acceptent la rationalisation donnent leur accord. Ils vont avoir des agents en plus, c’est Noël ! Mais ceux qui refusent cette rationalisation ne peuvent que rejeter les propositions du ministre. »

L’accord signé lundi, qui comprend notamment l’engagement de 480 statutaires supplémentaires dont 386 agents pénitentiaires, sera mis immédiatement à exécution, a prévenu Koen Geens. « Les prisons du sud et de la capitale existent-elles aux yeux du ministre ? », se demande Laurence Clamar. « Leurs besoins sont totalement niés. »

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