Nicolas De Decker

Galant, Marghem, Michel, Ducarme et une certaine idée de la vérité

Nicolas De Decker Journaliste au Vif

« J’ai menti parce que j’avais honte pour un autre J’ai menti pour ne pas faire de la peine à quelqu’un Mais j’ai aussi menti comme ça sans raison ». Nazim Hikmet, le grand poète turc, parlait de lui quand il écrivit ces vers. Il y a c’est vrai une esthétique au mensonge. Car la vérité n’est pas toujours belle, surtout pas quand le réel est triste.

« J’ai menti parce que j’avais honte pour un autre

J’ai menti pour ne pas faire de la peine à quelqu’un

Mais j’ai aussi menti comme ça sans raison »

Nazim Hikmet, le grand poète turc, parlait de lui quand il écrivit ces vers. Il y a c’est vrai une esthétique au mensonge. Car la vérité n’est pas toujours belle, surtout pas quand le réel est triste. Au gouvernement fédéral, le Mouvement réformateur fait de la politique, cet art difficile parce que transparent censé s’exposer dans une maison de verre, la démocratie. Il a fait d’une politique de la vérité, du courage et de la responsabilité un de ses plus lancinants slogans. La vérité, quand il faut imposer aux travailleurs de travailler plus longtemps. La vérité, quand il faut limiter les salaires. La vérité, quand il faut augmenter le prix de l’électricité. Vérité, vérité, vérité, partout et toujours.

Il avait déjà menti une autre fois, apparemment comme ça sans raison, Charles Michel. C’était quand il avait fait le serment de ne jamais composer de gouvernement avec ceux avec qui il a composé son gouvernement.

Et puis trois semaines après son « jobs, jobs, jobs« , à la Chambre, ce jeudi après-midi, Charles Michel a concédé « une imprudence » dans le chef de sa ministre fédérale, Jacqueline Galant. « Reconnaître une imprudence, c’est la marque de ceux qui veulent avancer droit », s’est aussitôt réjoui le chef de groupe réformateur à la Chambre, Denis Ducarme. Ils savent que leurs protestations n’ont aucun rapport avec la vérité. Ils ont lu les documents qui contredisent implacablement les arguments de la ministre. Mais ils ne peuvent pas l’admettre, car ils ne veulent pas la laisser tomber. Ils veulent qu’on leur laisse passer ça. Ils veulent qu’elle en réchappe.

Donc ils mentent, avec elle. Ils ont menti parce qu’ils avaient honte pour une autre, une des leurs, pour ne pas lui faire de la peine.

Il l’avait déjà fait, Charles Michel. Il avait couvert sa ministre de l’Energie lorsqu’elle avait sans desserrer les dents maintenu avoir commandé à son cabinet une étude rédigée par un avocat extérieur, ou lorsqu’elle avait ignoré un avis déplaisant du Conseil d’Etat. Encore plus déplaisant avait été le mot de l’écologiste Nollet : « Madame Marghem, vous mentez tellement qu’on ne peut même pas croire le contraire de ce que vous dites. » Mais on avait laissé passer. Charles Michel voulait que sa ministre en réchappe. Donc il avait menti, avec elle.

Il avait déjà menti une autre fois, apparemment comme ça sans raison, Charles Michel. C’était quand il avait fait le serment de ne jamais composer de gouvernement avec ceux avec qui il a composé son gouvernement. Il en est tellement réchappé qu’il est devenu un Premier ministre qui marquera, nécessairement, l’histoire contemporaine de la Belgique.

Comme quoi un mensonge, en politique, n’a jamais aucune raison.

Comme quoi le mensonge, en politique, est souvent plus profitable que la vérité.

Il y avait une esthétique au mensonge. Il y a désormais en Belgique, une politique du mensonge.

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