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Ford Genk: les réactions dans les journaux francophones et flamands

Drame national, choc, douche froide, cynisme, victimes,…les journaux francophones reviennent en long et en large jeudi sur la fermeture de l’usine Ford de Genk, s’interrogeant aussi sur l’avenir de l’industrie automobile en Belgique. Côté néerlandophone, les éditorialistes montrent du doigt les différents gouvenements qui préfèrent se rejeter la faute plutôt que de collaborer sur une politique concrète.

Drame national, choc, douche froide, cynisme, victimes, …les journaux francophones reviennent en long et en large jeudi sur la fermeture de l’usine Ford de Genk, évoquant les nombreux travailleurs concernés mais s’interrogeant aussi sur l’avenir de l’industrie automobile en Belgique et soulignant le manque de compétitivité de la Belgique au niveau international.

Tant L’Echo que les autres journaux estiment que la fermeture de l’usine Ford à Grenk ravive le débat sur l’avenir industriel de la Belgique et « replonge le pays dans ses problèmes de compétitivité », indique le quotidien économique.

Plusieurs quotidiens soulignent également les tensions communautaires en Belgique, l’éditorialiste de La Dernière Heure indiquant même qu' »on ne peut pas totalement reprocher à une société de ne plus vouloir s’implanter durablement dans un pays dont une partie des dirigeants annonce la fin prochaine… ». La Libre Belgique de son côté se demande même s’il n’existerait pas un « mal belge » et évoque dans son édito un pays qui est devenu « le royaume des incertitudes (…) Or, en affaires, rien n’est pire que l’incertitude ».

Or « Gouverner, c’est prévoir », comme le souligne l’éditorialiste de L’Echo, pointant du doigt tant les dirigeants de Ford que les responsables politiques belges « qui ont manqué singulièrement de vision ou de courage, ou des deux ».

« Sinistre total pour dix mille victimes », titre de son côté Le Soir, qui rappelle qu’il y a 20 ans, la Belgique était le leader mondial de l’assemblage automobile par habitant. Et de se demander si, plutôt que de chercher des boucs émissaires, il n’est pas temps d’admettre, collectivement, que « la Belgique commence à faire fuir les investisseurs les plus indéboulonnables ». Selon l’éditorialiste du quotidien, il est « grand temps que le pays et ses régions se dotent d’une vraie stratégie ».

« Le plus absurde c’est qu’une fois la catastrophe arrivée, tout le monde se mobilise: syndicats, Régions, fédéral travaillent main dans la main pour prendre en charge les victimes. Mais quand il s’agit, en amont, de doper l’économie pour éviter ce genre de drame, on ne se parle pas. »

Les éditions de L’Avenir s’inquiètent également du fait que la fermeture de Ford Genk pourrait être « le début d’une vague de restructurations », qui n’épargneraient pas la Wallonie, renvoyant aux mauvaises perspectives de l’Union wallonne des entreprises (UWE). Et de souligner les efforts déjà faits par les travailleurs de l’usine par le passé.
Une inquiétude pour les travailleurs wallons également partagée dans les journaux de Sudpresse qui parlent d’une « catastrophe sociale et nationale » et d’un « cataclysme pour 600 familles wallonnes ».

« Mais la fermeture de Ford Genk représente surtout un terrible signal d’alarme pour l’avenir de l’industrie en Belgique et pour l’emploi des jeunes.(…) Il est grand temps de se poser les bonnes questions sur la stratégie à suivre pour sauver notre économie », souligne l’éditorialiste de Sudpresse.

Pour la Dernière Heure, il s’agit ici « du plus grand drame social depuis la Sabena » et l’éditorialiste du quotidien de parler de « cynisme après le mensonge », les dirigeants de Ford, après avoir fait de fausses promesses, ne daignant même pas se déplacer à Genk pour l’annonce de la fermeture.

« Le cynisme des grandes multinationales n’a d’égal que le dédain qu’elles portent aux travailleurs, mais aussi aux politiciens, qu’ils considèrent comme quantité négligeable et qu’ils dominent ».

Un cynisme évoqué également par la plupart des journaux, l’éditorialiste de La Libre Belgique parlant même d’une « malhonnêteté infinie, d’une hypocrisie crasse » en évoquant l’annonce de la faillite.

Les quotidiens sont également nombreux à revenir sur l’histoire de l’industrie automobile en Belgique, son déclin ces dernières années et à s’interroger sur son avenir.

Les politiques se rejettent la faute, au lieu de collaborer, selon les journaux flamands

La manière dont Ford a annoncé la fermeture de son usine de Genk a été « lâche et brutale », peut-on lire jeudi dans les éditoriaux des différents journaux néerlandophones. Les éditorialistes pointent également du doigt les différents gouvernements, qui préfèrent se rejeter la faute plutôt que de collaborer sur une politique concrète. Het Belang van Limburg fait sa Une en affichant une citation de Henry Ford, le fondateur du constructeur automobile: « Une entreprise qui ne pense qu’au profit, est une mauvaise entreprise ».

Dans son billet, Eric Donckier critique vertement la direction internationale de Ford, qui a « menti » aux travailleurs de Genk. Paul Geudens, dans Gazet van Antwerpen, dépeint la direction du constructeur automobile comme « cynique et inhumaine », qui « juge la stratégie de communication plus importante que le sort d’environ 10.000 personnes ».

Pour Het Nieuwsblad, la communication de Ford a été « grossière ». « Celui qui commet une telle parjure et ne semble même pas trouver ça grave, manque de toute savoir-vivre », écrit Liesbeth Van Impe.

Steven Samyn, dans De Morgen, s’en prend pour sa part aux hommes politiques belges et aux différents gouvernements qui, « au lieu de travailler côte à côte », se rejettent la faute les uns sur les autres. « Comme si ce comportement avait déjà attiré des investissements », ajoute-t-il.

Et Bart Sturtewagen de renchérir dans De Standaard: « Les personnes sur qui nous comptons pour analyser les faits, développer une vision et mener une politique, se contentent de jouer au ni oui-ni non ». « Tant que l’énergie est consacrée à se bloquer les uns les autres, il ne se passe rien et tout le monde est perdant. »

Une conclusion à laquelle arrive aussi Luc Van der Kelen dans Het Laatste Nieuws. « Est-ce que le fait d’agir ensemble aurait pu permettre d’éviter le drame? Ce n’est pas certain, vu la réalité économique, mais si un pays agit en ordre dispersé, tout est plus difficile. »

Enfin, Stefaan Michielsen du De Tijd plaide dans son billet pour davantage d’implication dans l’activité industrielle. « La désindustrialisation n’est pas inéluctable. Cette tendance peut être inversée. Cela suppose toutefois que les décideurs de notre pays, à tous les niveaux, mettent en place urgemment un plan d’action cohérent pour un renouveau durable de l’industrie. »


Avec Belga

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