Un rocher très prisé par les hommes d'affaires belges. © JEAN FRANÇOIS OTTONELLO/BELGAIMAGE

Fiscalité: enquête mollo sur les Belges qui résident fictivement à Monaco

Thierry Denoël
Thierry Denoël Journaliste au Vif

Combien de Belges résident fictivement à Monaco pour des raisons fiscales ? 130 ont attiré l’attention de l’Inspection spéciale des impôts (ISI). Suffisant ? Pas sûr. Voici pourquoi.

L’enquête du quotidien De Tijd avait fait du bruit, fin 2016. Celle-ci concluait que 530 hommes d’affaires belges avaient établi leur résidence dans la principauté de Monaco, bien connue pour sa fiscalité attractive. Un chiffre qui aurait doublé en trois ans. Ces domiciliations semblaient fictives : 21 des Belges repérés, par exemple, habitaient à la même adresse. Le ministre des Finances avait alors promis d’enjoindre l’ISI à enquêter. Qu’en est-il neuf mois plus tard ?

Récemment interrogé par Ecolo à la Chambre, Johan Van Overtveldt (N-VA) a dévoilé que, concernant le contrôle fiscal de ces contribuables, une sélection restreinte avait été faite, début septembre dernier.  » Sur cette base, 130 départs vers Monaco font l’objet d’analyses complémentaires « , a-t-il-ajouté, avant de préciser :  » Les autres cas douteux seront également communiqués aux directions régionales de l’ISI.  » Combien ? Mystère.

C’est mieux que rien, mais lent et faible comme réaction par rapport aux révélations du Tijd et encore plus lorsqu’on consulte le dernier recensement de la population monégasque. En 2016, le nombre de Belges y résidant officiellement était de 1 073. Un chiffre en augmentation depuis quinze ans. Il s’agit majoritairement d’hommes de plus de 40 ans, actifs et non pas retraités. La proportion de ces expatriés belges, qui doivent déposer au moins 500 000 euros sur un compte bancaire pour se voir ouvrir les portes du Rocher, y est beaucoup plus importante que celle de nos nationaux résidant dans les communes voisines du Var, en France.

Johan Van Overtveldt a également exposé ce qu’il en était des accords d’échange de renseignements en matière fiscale entre la Belgique et Monaco. On a ainsi appris que l’accord signé en juillet 2009 entre les deux Etats n’avait toujours pas fait l’objet, à ce jour, d’une publication au Journal de Monaco, le bulletin officiel de la principauté. Huit ans plus tard, le texte n’est toujours pas entré en vigueur. C’est d’autant plus curieux que, vérifications faites, les accords bilatéraux du même type signés avec trente autres Etats ont, eux, été publiés. Pourquoi pas la Belgique ? Aucune explication n’a été fournie par le ministre. Et rien sur les éventuelles démarches de l’administration afin que le traité soit effectif.

Le grand argentier N-VA a juste glissé que l’accord en question n’était plus nécessaire, car le protocole d’échange de renseignements fiscaux entre l’Union européenne et Monaco est entré en vigueur le 1er janvier 2017. Ce protocole prévoit un échange automatique, dont des experts ont déjà démontré le caractère contournable, et des échanges sur demande (article 5), en l’occurrence, plus efficaces. L’ISI est donc légalement parée…

Les limiers de cette administration spéciale seraient aussi bien inspirés de voir du côté des sociétés de gestion de fortune établies à Monaco, créées et dirigées par des Belges, ayant pignon sur le Web, se vantant de gérer des centaines de millions d’euros de capitaux, proposant de régler les formalités de domiciliation, assurances ou yacht registration, et dont les newsletters parlent beaucoup de fiscalité belge. A priori rien d’illégal. Sauf si les résidents-clients ne sont pas de vrais résidents ou pas de manière permanente.

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