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Fin du roaming en Europe: les pièges à éviter

Caroline Lallemand
Caroline Lallemand Journaliste

La fin du « roaming » prévue pour le 15 juin prochain est une excellente nouvelle pour le portefeuille des consommateurs. Mais attention, il subsiste quelques pièges, sans parler des opérateurs qui modifient leurs tarifs, souvent à la hausse.

La date butoir du 15 juin marquera la fin du « roaming » en Europe, une bonne nouvelle pour la facture téléphonique des vacanciers et des personnes souvent en déplacement. Que vous téléphoniez d’une plage de la Côte d’Azur ou lors d’un déplacement professionnel à Berlin, les coûts téléphoniques seront moindres, selon le principe du ‘Roam like at Home’ (en « roaming » comme à la maison, NDLR). Orange prendra un peu d’avance en appliquant la mesure le 11 juin et Proximus le 12 juin. Cette mesure concerne les 27 autres pays de l’Union Européenne ainsi que l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein (communément dénommé « la Zone Europe »).

Concrètement, cela signifie que vous payerez, lors d’un appel émis au sein de l’Union européenne, le même tarif que si l’appel était émis à partir de la Belgique. En cas de plan forfaitaire comprenant des minutes, des SMS ou des data mobile gratuites, vous pourrez aussi en profiter en dehors des frontières belges. Les opérateurs ne pourront plus appliquer, comme ils en avaient pris l’habitude, des frais supplémentaires pour l’utilisation d’un forfait mobile en itinérance. Les clients qui ont un forfait leur permettant d’utiliser une application de leur choix de façon illimitée (WhatsApp, Instagram, etc.) pourront aussi le faire indistinctement en Belgique et en Europe.

Avec la fin du « roaming », sujet ardemment débattu au sein de l’UE depuis 2012, les opérateurs télécom verront leurs rentrées diminuer. Ces derniers ont déjà des plans pour récupérer ces pertes, par d’autres canaux.

L’année passée, la diminution progressive des tarifs de « roaming » a en effet valu à Proximus un manque à gagner de 36 millions d’euros. Pour l’année 2017, les pertes sont évaluées à 61 millions (dont 11 millions au Luxembourg). Chez Telenet, on les estime à 50 millions pour cette année. De là à se diriger vers une catastrophe financière pour les opérateurs mobiles ? Ce serait sans doute aller trop loin. « La disparition des frais de roaming a largement été anticipée par les opérateurs, a rappelé dans le magazine Trends Tendances Stefaan Genoe, analyste télécoms chez Degroof-Petercam. L’impact net sera moins élevé que l’impact brut annoncé, en raison d’une certaine élasticité des prix et d’une hausse de la consommation en itinérance ».

Tarifs en augmentation

Pour compenser ces pertes de revenus, les opérateurs télécom sont tentés d’augmenter leurs plans tarifaires. Ce n’est pas un hasard si en ce début d’année, Telenet a augmenté ses tarifs. L’opérateur déclare que d’autres adaptations de prix ne sont pas prévues. «  Nous évaluons en continu notre politique des prix, mais nous n’envisageons pas d’adapter nos tarifs après la suppression des tarifs de roaming », déclare au Morgen la porte-parole de l’entreprise Isabelle Geeraerts.

Chez Proximus aussi, les tarifs seront revus à la hausse dès le mois de juin. Certains forfaits (packs internet, téléphone et internet mobile) seront ainsi augmentés de 2 euros.

Pour les personnes qui ont contracté des formules « business », les frais seront plus élevés lorsqu’elles dépasseront leur forfait, de l’ordre de 0,03 euro à 0,06 euro. « La suppression des frais de roaming et l’adaptation d’une partir de nos formules est du pur hasard« , se défend le porte-parole de Proximus Jan Margot. « Cela ne concerne qu’une fraction de nos clients professionnels. Et encore, seulement s’ils dépassent leur forfait, ce qui est exceptionnel ».

Mais chez Test-Achats, l’association de défense des consommateurs, on ne voit pas ces modifications tarifaires d’un bon oeil. Le porte-parole Simon November: « Les opérateurs doivent bel et bien comptabiliser les tarifs du commerce de gros pour l’utilisation qui dépasse le forfait à l’étranger. C’est défini au niveau européen. Mais en cas de dépassement du forfait en Belgique, le montant est aussi compté. Rien d’illégal, mais c’est clairement plus cher et une façon de faire participer tous les utilisateurs au roaming gratuit. Pour ceux qui resteront dans leur forfait, rien ne change évidemment », fait encore remarquer le porte-parole de l’association.

Le ministre des Télécoms Alexander De Croo (Open Vld) a déjà réagi aux pratiques des opérateurs et a déclaré que les prix des forfaits devaient être diminués. Il a critiqué les adaptations de tarifs. « La Belgique a encore un grand retard par rapport à ses voisins concernant l’utilisation de l’internet mobile et de la 4G. une augmentation des prix en dehors des forfaits ne va pas aider à rattraper ce retard. »

Explosion de la consommation de données mobiles en itinérance

A ce sujet, le Parlement européen avait anticipé la manoeuvre. Il a défini des tarifs maximum pour les grandes entreprises que les opérateurs peuvent prendre en compte si leurs clients utilisent leur téléphone à l’étranger. Ces nouveaux plans tarifaires sont 90% plus bas que ceux appliqués à l’heure actuelle. Cela signifie aussi que les coûts des téléopérateurs liés au roaming diminuent. Le but est de ne plus pouvoir faire de bénéfices sur le roaming à partir de cette année.

Comme l’avance encore Trends-Tendances, la suppression des frais de « roaming » devrait pousser les consommateurs, autrefois frileux, à débloquer leur forfait à l’étranger. La consommation, notamment de données mobiles, devrait donc mécaniquement augmenter. Chez Orange, on s’attend pour l’été prochain à une  » forte augmentation  » de l’utilisation en itinérance, qui compensera  » partiellement  » la disparition des frais de « roaming ». L’opérateur avait déjà réalisé un premier test l’été dernier, en permettant à ses clients d’utiliser leur mobile à l’étranger sans frais supplémentaires. Résultat : le volume total de données utilisées en « roaming » avait été multiplié par 15. Orange s’attend à une augmentation encore plus forte lors de l’été 2017.

Proximus, de son côté, a choisi de faire un test grandeur nature via sa filiale low cost Scarlet, qui propose depuis avril 2016 des forfaits intégrant anticipativement la suppression des frais de roaming. Conclusion de ce test ? La consommation de données mobiles en itinérance a explosé : «  Les clients utilisent l’Internet mobile en roaming comme s’ils étaient chez eux. Sur les appels vocaux et les SMS, l’augmentation est moindre « , confie Lode Cloosen, en charge du roaming chez Proximus à nos confrères de Trends-Tendances.

Les pièges à éviter

Le consommateur a tout intérêt à bien lire les conditions générales applicables à son forfait mobile après la suppression du « roaming » en Europe. Voici quelques astuces à prendre en compte pour ne pas avoir de surprises en découvrant sa facture au retour d’un déplacement professionnel ou des vacances:

  • Le plus grand piège est de croire que les tous les Européens pourront s’appeler mutuellement sans surcoût à partir du 15 juin de n’importe quel endroit où il se trouve. Or, un appel depuis la Belgique vers un pays européen coûtera plus cher que dans le sens inverse. La raison est simple: appeler depuis son propre pays ne relève pas de l’itinérance. Dans le cas où une personne résidant à Bruxelles appelle un contact à Paris, les tarifs internationaux restent d’application. Une surfacturation sera ainsi toujours comptée si l’appel est émis d’un appareil belge vers un numéro français, ou italien, ou anglais, ou un contact résidant en dehors de l’Europe…car il s’agit d’un appel vers l’étranger. Par contre, un Belge qui téléphone depuis Paris vers Bruxelles ne paiera aucun supplément. En résumé, un Belge en Europe (en dehors de la Belgique) peut donc téléphoner vers n’importe quel numéro étranger de l’UE sans surcoût. Recevoir un appel sera aussi gratuit dans toute l’Europe.
  • Attention au cas de la Suisse et d’autres petits états européens tel que Andorre où les frais de roaming sont toujours en vigueur. Les appels émis et facturés dans ces pays spécifiques seront donc facturés hors forfait, rien ne change.
  • La vigilance est aussi de mise si vous passez vos vacances en dehors de l’UE. La mesure ne concerne en effet pas les appels sortants et entrants dans le monde, hors-Europe. Par exemple, pour un appel passé à partir du Maroc ou des USA sur un GSM belge, il sera facturé 1,65 euros la minute. Pour un appel à partir de la Tunisie ou d’un pays d’Amérique du Sud, ce coût peut grimper à plus de 5 euros la minute sans parler des frais aussi facturés pour les appels reçus (de 0,75 centimes à parfois près de 2 euros).
  • L’envoi de MMS reste lui payant et ne profite pas de la suppression des frais de roaming.
  • Un conseil: pour éviter de faire exploser son forfait à l’étranger, il est prudent de télécharger l’application mobile de son opérateur. Elle permet de garder un oeil sur sa consommation et sur d’éventuels dépassements de forfaits.

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