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Fermeture Caterpillar : Gouvernements wallon et fédéral unis avec les syndicats avant de voir la direction

Les gouvernements wallon et fédéral ont affiché vendredi midi à l’Elysette (Namur) leur union avec les syndicats du site de Gosselies de Caterpillar, avant une rencontre qui s’annonce tendue à 15 heures entre les deux exécutifs et cette même direction.

Un groupe de travail (taskforce) sera mis sur pied dans le cadre de la procédure Renault pour trouver des solutions pour les travailleurs touchés, a indiqué le ministre fédéral de l’Emploi Kris Peeters, à l’issue de la réunion avec les syndicats.

Quelque 2.200 emplois directs et 6.000 emplois indirects, en Wallonie, à Bruxelles, en Flandre et en France, seront touchés par la fermeture, a souligné le ministre-président wallon Paul Magnette. Il en appelle aussi à une action de l’Europe, « qui doit comprendre qu’elle doit renforcer les droits des travailleurs par rapport à des multinationales qui se comportent parfois comme des voyous ».

L’administration wallonne est en train d’examiner quels subsides ont été accordés et si ils peuvent être récupérés au cas où des conditions n’auraient pas été respectées. La légalité et la conformité des décisions prises par Caterpillar seront en outre vérifiés par la Sogepa (Société wallonne de gestion et de participations) et des avocats spécialisés, a fait savoir sur Twitter le ministre wallon de l’Économie Jean-Claude Marcourt, depuis l’étranger.

« On va tout faire pour aider les travailleurs et leurs familles, et travailler à la reconversion du site. C’est un site très important pour la Wallonie, on ne va pas le laisser partir à vau-l’eau », a ajouté Paul Magnette, qui est aussi le bourgmestre en titre de Charleroi, dont dépend Gosselies. Il dit espérer pouvoir utiliser cet immense site proche de l’aéroport pour du redéploiement industriel.

« Pied à pied, nous mènerons la bataille aux côtés des travailleurs et de leurs familles, via des équipes de coordination avec le gouvernement wallon et les forces syndicales », a affirmé le Premier ministre Charles Michel, qui faisait pour l’occasion son premier déplacement à l’Elysette en tant que Premier ministre.

M. Michel s’est dit choqué par cette décision alors que l’usine est bénéficiaire, qu’elle avait pris des engagements il y a trois ans, mais aussi par la manière dont la fermeture a été annoncée. Sa présence inédite à Namur est destinée à démontrer cette volonté de rassemblement, a-t-il ajouté.

La direction de l’entreprise est attendue à 15 heures au siège du gouvernement wallon par les deux exécutifs.

La classe politique sous le choc

L’ensemble de la classe politique francophone a été choquée par l’annonce du géant américain Caterpillar de fermer son usine de Gosselies, ce qui entraînera la suppression de plus de 2.000 emplois.

Le Premier ministre Charles Michel a évoqué « une décision brutale et un drame social », appelant à « une union sacrée politique avec le gouvernement wallon pour soutenir les travailleurs et leur famille ». « C’est un vendredi noir pour Charleroi », ajoute le président du MR, Olivier Chastel. Le ministre de l’Emploi, Kris Peeters (CD&V), a parlé de « tragédie ».

En 2006, lorsque la fermeture de VW Forest a été annoncée, l’exécutif de Guy Verhofstadt s’était mobilisé pour sauver le site. « Il y a toujours des marges de manoeuvre, on l’a vu dans d’autres domaines. Je pense par exemple à Audi Forest. Il y a eu toute une série de mesures à l’époque. A chaque fois que des restructurations ont été envisagées, on a pu entrer en discussion avec la direction de l’entreprise. J’espère ici que la Région wallonne et le gouvernement fédéral pourront entrer en contact avec la direction et voir ce qu’il est possible de faire », a expliqué le vice-premier ministre MR, Didier Reynders.

Côté socialiste, le ministre-président wallon Paul Magnette est « scandalisé » et souligne les efforts consentis par le personnel, tandis qu’Elio Di Rupo déplore le « mépris insupportable pour les travailleurs » qui ont été « incroyablement flexibles », ce qui rend la décision « d’autant plus violente ».

Le ministre wallon de l’Economie, Jean-Claude Marcourt, insiste lui sur le « cynisme, (la) brutalité, (la) cruauté » de l’entreprise et rappelle que « plus de 1.400 emplois avaient déjà été perdus depuis 2013 ». Il a annulé sa participation à la mission économique wallonne prévue au Canada du 6 au 9 septembre et a annoncé que « la légalité et la conformité des décisions prises par Caterpillar » allaient être vérifiées via la Sogepa et des avocats spécialisés. Le ministre-président bruxellois Rudi Vervoort a tenu à manifester sa « solidarité » et assure que sa région « répondra présente pour apporter son concours à la recherche de solutions pour les travailleurs du site ».

La co-présidente d’Ecolo, Zakia Khattabi, fustige elle un « modèle économique qui épuise, qui exploite puis qui jette ». Elle a également une pensée pour les nombreux sous-traitants, qui subiront des « effets en cascades ». Le chef de groupe à la Chambre, Jean-Marc Nollet, parle de « scandale révoltant » et doute des difficultés de l’entreprise, en rappelant le bénéfice avant impôt engrangé par Caterpillar lors des deux derniers exercices.

Pour le cdH, la fermeture est « inacceptable ». La chef de groupe à la Chambre Catherine Fonck demande au ministre de l’Economie Kris Peeters de « s’investir personnellement avec le gouvernement wallon pour sauver des emplois ».

Le PTB juge, par la voix du député Raoul Hedebouw, « inacceptable qu’une fois encore, les profits d’une multinationale passent avant la vie de milliers de gens ». « Qu’on arrête de nous rabâcher que le problème, c’est le coût du travail. A Caterpillar, le problème, c’est le coût du capital! « , ajoute-t-il. Son président, Peter Mertens, rappelle lui que l’entreprise a bénéficié de 61 millions d’euros de réduction d’impôts grâce aux intérêts notionnels et qu’elle réalise d’énormes profits au niveau mondial. « La politique cadeau ne fournit pas d’emplois », constate-t-il.

Côté flamand, le ministre de l’Economie Kris Peeters a témoigné ses encouragements aux travailleurs, parlant de nouvelles « fort regrettables » puis de « tragédie ». Il a pris la direction de Namur en fin de matinée avec le Premier ministre, pour une rencontre avec les représentants syndicaux d’une part et la direction d’autre part, en compagnie de membres de l’exécutif wallon.

Le président du sp.a, John Crombez, a lui évoqué une « terrible nouvelle » qui plonge à nouveau des milliers de familles dans l’incertitude.

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