Des étudiants en médecine © Belga

Etudes de médecine : un « filtre » dès l’année académique prochaine

La Fédération Wallonie-Bruxelles disposera bel et bien d’un filtre aux études de médecine dès l’année académique prochaine, a confirmé jeudi le ministre de l’Enseignement supérieur, Jean-Claude Marcourt. Cette sélection devrait se faire sur base d’un concours organisé à l’issue de la 1re année d’études.

M. Marcourt a rencontré ces derniers jours les doyens et recteurs des universités, ainsi que les représentants des étudiants en médecine. « Globalement, il est apparu qu’un consensus pouvait se dégager autour de l’organisation d’un concours à partir de l’année académique 2015-2016. Celui-ci ne sera pas organisé à l’entrée des études, mais à l’issue du 1er baccalauréat (première année du cursus, ndlr) », a indiqué le ministre lors d’une conférence de presse jeudi après-midi.

Ce concours, organisé selon les modalités du « numerus fixus », laissera chaque année un nombre bien déterminé d’étudiants passer en 2e bac. Les questions ne seront pas les mêmes pour tous les étudiants, mais élaborées par les différentes facultés de médecine francophones, qui disposeront chacune d’un nombre limité d’étudiants pouvant passer en seconde année. Selon l’accord en voie de conclusion, ce concours devrait porter « a priori sur les matières enseignées au 2e quadri, à savoir les matières dites « médicales » », plutôt que sur les sciences pures (physique, chimie, etc.), selon M. Marcourt.

Ce filtrage au début des études de médecine doit permettre de faire correspondre le nombre de médecins diplômés au quota de praticiens défini par le niveau fédéral, qui délivre les numéros Inami permettant aux médecins de prodiguer des soins remboursés par la Sécu. L’introduction de ce filtre aux études de médecine en Fédération Wallonie-Bruxelles était la condition posée l’automne dernier par la ministre fédérale de la Santé, Maggie De Block, pour débloquer la crise des numéros Inami, dont la moitié des jeunes médecins francophones étaient menacés d’être privés en juin prochain.

En contrepartie, la ministre De Block s’est engagée à mettre sur pied un cadastre complet de l’activité des médecins en Belgique, afin de déterminer de manière plus juste le nombre de praticiens nécessaires jusqu’en 2037. Fin 2014, Jean-Claude Marcourt avait clairement lié toute avancée sur le filtre à l’élaboration effective par la ministre De Block d’un « cadastre solide et dynamique » de l’activité médicale, dont la publication se fait toujours attendre.

Le Liégeois a reconnu jeudi avoir changé son fusil d’épaule et dissocié les deux processus. « Nous allons avancer indépendamment de Mme De Block, mais elle doit prendre ses responsabilités, car notre système (de contingentement des praticiens, ndlr) n’est pas cohérent ». En confirmant dès à présent l’application d’un filtre aux études de médecine dès l’an prochain, le ministre de l’Enseignement supérieur souhaite absolument éviter pour tous les jeunes qui se lanceront dans cette filière en septembre toute incertitude quant à leurs chances d’obtenir à terme un numéro Inami et donc de pouvoir effectivement exercer la médecine curative, justifie-t-il.

Avant de finaliser le projet, le ministre Marcourt rencontrera encore un dernier interlocuteur demain/vendredi, à savoir la Fédération des étudiants francophones (FEF). Le dépôt d’un texte légal devrait intervenir dans les mois à venir, pour permettre son adoption par le Parlement avant l’été. « Il reste encore énormément de choses à déterminer, beaucoup de points à résoudre… », a toutefois reconnu le ministre Marcourt.

L’un des plus délicats sera sans conteste le sort à réserver aux étudiants de médecine qui réussiront leur première année, mais qui échoueront à se classer en ordre utile lors du concours. Ces ‘reçus collés’ ne pourront en effet pas passer en théorie en 2e bac médecine…

Le Comité interuniversitaire des étudiants en médecine propose de laisser ces étudiants-là poursuivre néanmoins leur cursus en médecine, mais de limiter leurs débouchés aux activités médicales non contingentées par l’Inami, comme la médecine légale, la recherche, la médecine du travail, etc.

Interrogé sur cette piste, M. Marcourt ne s’est pas montré fort enthousiaste à cette idée. « Il existe d’autres mécanismes… », a-t-il fait valoir, mais sans en dire davantage. Conséquence du filtrage à venir: la possibilité qui existe depuis peu pour les étudiants en difficultés d’étaler leur première année d’études sur deux ans pourrait être supprimée. « Cette capacité d’étalement pose un problème par rapport au concours », a reconnu M. Marcourt.

En revanche, le test indicatif mais non-contraignant organisé depuis deux ans au début des études de médecine sera, lui quoi qu’il advienne, maintenu. Devant la presse jeudi, M. Marcourt a exhorté la ministre fédérale de la Santé à avancer à présent dans l’élaboration du cadastre solide et dynamique de l’activité médicale, lequel, a-t-il rappelé, devra prendre efficacement en compte les projections démographiques du pays, l’évolution de la charge de travail des médecins, mais aussi la pyramide des âges des praticiens qui diffère d’une Communauté à l’autre, et le volume différent de tâches qu’ils exercent au nord et au sud du pays. « Que Mme De Block montre qu’elle est la ministre de la Santé des 10,6 millions de Belgique, et pas seulement des 6 millions de Flamands! « , a-t-il conclu.

La FEF taxe Marcourt de « petit joueur »

La Fédération des étudiants francophones (FEF) a déploré jeudi l’annonce d’un compromis sur l’organisation, dès l’année académique prochaine, d’un filtre aux études de médecine à l’issue du 1er bac sans avoir été concertée, sa rencontre programmée avec le ministre Marcourt sur ce sujet n’intervenant que demain/vendredi seulement.

« Le ministre annonce officiellement avoir consulté les acteurs de terrain en mettant à l’heure actuelle officieusement de côté la FEF, ce syndicat qui représente pourtant les étudiants de trois facultés de médecine (UNamur, UCL et ULB). Alors de qui M. Marcourt se moque-t-il quand il vante la transparence de sa procédure de concertation? « , peste la FEF dans un communiqué où M. Marcourt est qualifié de « petit joueur ».

Pour la FEF, avec cette « procédure scandaleuse », le ministre se moque à la fois de l’organisation étudiante mais également des députés de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui mènent actuellement une série d’auditions sur ce même sujet. L’organisation demande en conclusion le report d’une quelconque décision dans ce dossier tant qu’elle n’aura pas été consultée « en bonne et due forme ».

« Marcourt ne prend pas le bon chemin », selon le MR

Le MR a critiqué jeudi soir la volonté du ministre de l’Enseignement supérieur Jean-Claude Marcourt d’organiser un filtre aux études de médecine à l’issue de la première année d’étude, estimant que cette solution allait « faire perdre un an d’étude aux étudiants ».

« Nous sommes contents que le ministre Marcourt prenne enfin des dispositions, mais selon nous, ce n’est pas le bon chemin », a réagi la cheffe de groupe MR au Parlement de la Fédération, Françoise Bertieaux. Selon l’opposition réformatrice, pareille solution va amener nombre d’étudiants, à savoir ceux qui réussiront leur première année mais pas le concours, à perdre une année d’études « Cette solution est porteuse d’injustices et peu motivantes pour les étudiants », juge Mme Bertieaux. « Si, pour régler ces injustices il fait des passe-droits, ce n’est pas équitable ». Pour le MR, la solution de bon sens est et reste l’instauration d’un véritable examen d’entrée avant le début de la première année, avec une année de propédeutique pour ceux qui échoueraient. « Mais le ministre Marcourt s’est tellement enfermé ces derniers mois dans son refus d’un examen d’entrée qu’il ne peut plus à présent faire marche arrière… »

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