Christine Laurent

Esprit de clocher

Christine Laurent Rédactrice en chef du Vif/L'Express

Ridicule, tout simplement ridicule, cette passe d’armes entre le socialiste Paul Magnette et le libéral Charles Michel mardi dernier ! De la pantomime, des balivernes, des enfantillages !

On croyait le ministre des Entreprises publiques plus fin, plus inspiré. En qualifiant le 1er Mai organisé par le MR de « pacotille pour notables à Jodoigne », il a perdu une occasion de se taire. Effet de manches ? N’a-t-il pas pu résister à la tentation de jouer les Mélenchon (le talent en moins), la présidentielle de 2012 en France creusant un clivage gauche-droite que l’élu carolo, dans un mirage, a cru voir hanter subitement notre débat politique actuel ? Et que dire de la riposte du président du MR, si faible, pas drôle ? Un duo-complice (sans le faire exprès ?) dans le registre des petites phrases qui frappent, des « mots doux » censés tuer pour marquer les esprits ? Ils n’ont même pas fait mouche, c’est dire !

Pourquoi exciter la division, alors que le socialiste François Hollande lui-même a souhaité que ce 1er Mai soit bien « la fête de tous ceux qui travaillent ou voudraient travailler » ? Mais l’occasion était trop belle pour le PS d’occuper une fenêtre médiatique à la veille des élections sociales en multipliant les cautions et garanties à l’égard de la FGTB. Fallait-il pour autant caricaturer l’autre alors que par ailleurs la ministre socialiste, Laurette Onkelinx, multiplie les avances à l’égard des PME, « fer de la relance économique », et dont on devait sans doute compter pas mal de représentants au meeting libéral ? A l’heure où de toutes parts on ne jure que par l’absolue nécessité de conclure un pacte de prospérité, la multiplication des ostracismes fait tache, non ?

Nul doute que, dès mercredi matin, tous, libéraux, socialistes, sociaux-chrétiens et humanistes se retrouvaient autour d’une même table pour tenter de trouver des solutions à la situation financière désastreuse dans laquelle la Belgique s’englue. Le FDF Bernard Clerfayt n’a-t-il pas agité la sonnette d’alarme en début de semaine, il y aurait un trou de 1,5 milliard supplémentaire dans le budget de 2013 ? Pas étonnant, tant les dispositions adoptées à la hâte par le gouvernement papillon sont floues ou surestimées, comme nous l’avons démontré à plusieurs reprises. Rares sont celles, en effet, qui tiennent la route. Et que dire, alors, de ce que l’on nous mijote pour 2014 ou 2015 avec toute cette valse de milliards à économiser ?

Ni rigueur absolue, ni laxisme, notre pays doit trouver un équilibre subtil. Qui passe sans doute par les vertus de l’affrontement, mais aussi de la concertation. Surtout dans un système à la proportionnelle et au sein d’une coalition qui se veut d’union nationale ou presque.

Les temps changent. Nous sommes au XXIe siècle, de grâce ! Un véritable bouleversement « civilisationnel » est en route. Il passe par l’arrivée de nouvelles cultures jeunes, hédonistes, individualistes, alternatives. Ce qui crée inévitablement, dans nos populations vieillissantes, un agrégat de menaces et de peurs attisées par la crise. Ce sont des discours qui proposent des réponses à toutes ces préoccupations que nous attendons, y compris le 1er Mai. Tournés vers l’avenir et non pas basés sur des concepts et des caricatures dépassés, sclérosés. Le rôle des politiques n’est-il pas de chercher le bien commun aussi pour demain et non à la petite semaine ? Mais pour espérer l’atteindre un jour, ils devront inévitablement abandonner leur « cher » esprit de clocher.

CHRISTINE LAURENT

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