© Frédéric Pauwels

Espace P… réclame la fin de « l’hypocrisie belge » sur la prostitution

Le Vif

Espace P… fête ses 25 ans. Créée en 1988, cette association vient en aide aux travailleurs du sexe. À l’occasion de cet anniversaire, l’ASBL constate une disparition de la prostitution visible au profit de formes de prostitution privée, et plaide pour une meilleure adéquation entre les réalités de terrain et les textes législatifs.

Née de l’initiative de médecins, Espace P… a ouvert ses premières antennes à Liège et Bruxelles. L’association est désormais également présente à Charleroi, Mons, Namur et Arlon. À l’occasion de ses 25 ans, elle est revenue jeudi sur les évolutions rencontrées dans le milieu de la prostitution au fil des ans.

Si chaque ville est confrontée à des problématiques particulières, toutes les antennes tirent le même constat: sous l’impulsion de décisions politiques, la prostitution visible, dans des salons ou derrière des vitrines, diminue drastiquement au profit d’une prostitution dans des lieux privés. Bruxelles-Ville, Schaerbeek et Saint-Josse-ten-Noode ont voté des règlements plus stricts concernant la prostitution de rue. À Liège, les dernières vitrines du quartier Cathédrale Nord ont été fermées en 2009, tandis que le « quartier chaud » de Charleroi a été déplacé sous le ring. À Namur et Mons également, des « bars à champagne » ont dû fermer à cause de règlements communaux.

« C’est un mouvement national non coordonné », estime Quentin Deltour, coordinateur d’Espace P… Liège. « Chaque bourgmestre légifère à sa façon. Nous voudrions une réglementation qui définisse une fois pour toutes les droits et les devoirs des prostituées », ajoute Charles Disneur, président de l’ASBL.

L’association a rédigé un manifeste. Elle demande notamment que l’embauche des prostituées soit dépénalisé et contrôlé, que de réels droits soient accordés aux indépendants, qu’il soit possible de co-exploiter un lieu de prostitution sans que cela ne soit assimilé à du proxénétisme, ou encore que le client ne soit pas pénalisé.

Espace P… Liège se montre critique par rapport aux projets d’Eros Center

À l’occasion de ses 25 ans d’existence, l’ASBL Espace P… Liège est revenue lundi sur l’état de la prostitution en région liégeoise, depuis la fermeture des dernières vitrines du quartier Cathédrale Nord en 2009 et les projets d’Eros Center.

Selon Quentin Deltour, coordinateur d’Espace P… Liège, ces fermetures n’ont pas fait disparaître la prostitution de rue qui touche généralement les filles les plus précaires. « La prostitution de rue reste dans la rue, et toujours dans le même quartier. Elle a même augmenté », affirme-t-il.

Certaines prostituées ont déménagé vers Seraing, faisant augmenter la pression immobilière sur les salons de la rue Marnix. Beaucoup d’entre elles ont choisi de se prostituer dans des lieux privés ou à domicile, tandis que quelques-unes ont abandonné leur métier. « Elles sont devenues des allocataires sociales. Ce qui n’est pas nécessairement une bonne chose, car elles aimaient leur travail », poursuit Quentin Deltour.

La fermeture des salons a également entraîné une hausse importante de la fréquentation de la permanence informelle organisée quotidiennement par Espace P… « De 3 ou 4 personnes par jour, nous en recevons aujourd’hui jusqu’à une vingtaine. » Quentin Deltour souligne par ailleurs que la fin des vitrines a eu des répercussions négatives sur le chiffre d’affaires de certains commerçants du quartier.

Il regrette que le projet d’Eros Center ne soit pas près d’aboutir à Liège. Quant au projet sérésien, il se montre mesuré. « Cela peut être une bonne chose pour certaines, mais le problème est que toutes les vitrines seront fermées. Or nous réclamons une variation dans les choix des lieux de prostitution. »

Espace P.. Liège estime qu’environ 400 prostitués exercent chaque jour sur le territoire liégeois.

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