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Elio Di Rupo ne jure qu’en français

Le président du PS se frotte au néerlandais en vue d’une éventuelle entrée au 16 rue de La Loi. Le Premier ministrable a boudé l’exercice en tant que député fédéral : Di Rupo n’a juré d’observer la Constitution qu’en français. 29 élus francophones sur 62 ont fait mieux en y ajoutant le néerlandais et/ou l’allemand.

Ils sont à pied d’oeuvre, n’attendent plus qu’un gouvernement fédéral pour se mettre réellement au boulot. Les 150 députés fédéraux issus du scrutin du 13 juin ont accompli leurs premiers pas à la Chambre de manière solennelle, par la prestation du serment constitutionnel. C’est un moment qui peut être fort dans le parcours d’un représentant de la Nation. Chaque élu du peuple (belge ?) choisit d’ailleurs de le marquer avec plus moins d’intensité. En exprimant son engagement à observer la Constitution, la Loi fondamentale de la Belgique, dans une, deux, voire les trois langues nationales : français, néerlandais, allemand. L’épreuve linguistique n’a rien d’insurmontable : elle tient en une seule phrase.

L’exception PS : en français seulement, sauf Delizée

L’occasion peut être belle pour préparer une entrée au 16 rue de La Loi, se forger une stature de futur Premier ministre de tous les Belges. Elio Di Rupo ne l’a pas saisie : le député fédéral n’a pas emboîté le pas au Premier ministrable qui s’est mis consciencieusement à la pratique du néerlandais. L’hémicycle parlementaire a eu droit de la part du député PS à un « Je jure d’observer la Constitution. » Punt aan de lijn. Pas comme cet éternel premier de classe de Didier Reynders. Le président du MR a de nouveau sorti le grand jeu en déclinant la formule dans les trois langues nationales. Respect.

Le président du PS pourra toujours objecter avoir de la suite dans les idées : l’élu socialiste montois de 2007 s’en était déjà tenu au seul usage du français. Moins convaincant, il pourrait aussi invoquer une quelconque discipline de groupe : sur les 26 députés PS, seul le namurois Jean-Marc Delizée a relevé le défi dans les trois langues nationales : « je l’ai fait comme je le sentais, par esprit d’ouverture, en y ajoutant cette fois l’allemand », explique l’élu. Elio Di Rupo pourrait enfin choisir de « balancer » d’autres élèves tout aussi peu zélés que lui. Comme cet ex-Premier ministre CD&V, Yves Leterme, chantre du fédéralisme de coopération, mais qui n’a (re)trouvé que l’accent flamand pour jurer d’observer la Constitution belge.

Il faut dire qu’au CD&V, comme à la N-VA d’ailleurs (tiens tiens…), au Vlaams Belang et comme ce diable de Jean-Marie Dedecker bien seul à porter les couleurs de son parti, on a le mérite de la clarté : comme un seul homme, tous n’ont juré qu’en néerlandais. Ce qui laisse peu d’exceptions au nord du pays, essentiellement logées dans le groupe Open VLD : près de la moitié de leurs élus ont pris la peine d’ajouter le français (le bruxellois Vanhengel), voire aussi l’allemand, à leur prestation de serment. Surprenant tout de même de ne pas y compter ce belgicain d’Herman De Croo ou le président sortant de la Chambre, Patrick Dewael, qui en sont restés au néerlandais…

Joli contraste côté francophone : le PS y a fait plutôt tache. Au MR, Didier Reynders est loin de se distinguer parmi les siens : 12 de ses 18 élus ont aussi mis un point d’honneur à égrener la formule en néerlandais et/ou en allemand. Et qui a dit que le FDF était rabique sur le plan linguistique ? Damien Thiery, bourgmestre non-nommé de Linkebeek, s’est révélé pour la cause parfait bilingue français-néerlandais. De même que sa collègue en périphérie bruxelloise, la bourgmestre CDH de Rhode Saint-Genèse, Myriam Delacroix-Rolin. Il est vrai que Joëlle Milquet en tête, le groupe CDH a majoritairement fait preuve de bi-, voire de trilinguisme (6 élus dur 8). Y compris un certain Benoît Lutgen, député-éclair avant de redevenir ministre régional wallon.

Enfin, il y a le casting parfait. Du travail de pro, avec les félicitations du jury : le groupe Ecolo-Groen !, uni comme les doigts de la main, qui a juré d’observer la Constitution, au minimum en français et néerlandais, mais de préférence aussi en allemand (5 élus Ecolo sur 8 ont réussi la passe de trois). Soldons les comptes : 77 députés flamands sur 88 qui ne jurent d’observer la Constitution qu’en néerlandais, et 33 élus francophones sur 62 qui se limitent au même exercice en français. C’est beau, un Parlement fédéral….

PIERRE HAVAUX

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