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Ecolo : les élections, la peur au ventre

Olivier Mouton
Olivier Mouton Journaliste

Pris en tenailles entre l’irritation des autres partis et la déception des environnementalistes, Ecolo tente d’empêcher le retour des fantômes du passé. Mais de la crise autour du photovoltaïque au test en cours sur la taxe kilométrique, les pièges sont nombreux…

Les temps sont durs pour Ecolo. Tandis que le PS dégringole dans les sondages malgré la popularité d’Elio Di Rupo, les Verts stagnent dangereusement autour des 11% en Wallonie et chutent sous les 10% à Bruxelles. C’est désormais la gauche radicale qui profite des déçus du socialisme. « La progression du PTB est l’expression de la colère des citoyens face au tout va bien du Premier ministre qui est un déni des réalités », gronde Emily Hoyos, coprésidente du parti. Peut-être. Mais contrairement à 2009, quand l’air du temps était à la lutte contre le réchauffement climatique, Ecolo n’attire plus les mécontents. Comme si l’usure du pouvoir – depuis dix ans à Bruxelles et cinq ans en Wallonie – n’épargnait pas une formation politique qui accumule les déboires depuis un an.

« La campagne électorale ne sera pas de tout repos pour eux en raison d’une succession de dossiers difficiles : la crise du photovoltaïque en Wallonie, le dossier éolien et aujourd’hui, la taxe kilométrique », analyse Pascal Delwit, politologue à l’ULB. Ecolo est forcé de slalomer entre les intentions malveillantes de partenaires politiques irrités et les pressions impatientes des associations environnementalistes. « Les Verts sont gouvernés par la peur », résume Christophe Schoune, secrétaire général d’Inter-Environnement Wallonie. Un responsable fédéral du CDH, au mano à mano permanent avec Ecolo, fustige : « Ce parti ne semble plus en capacité d’assumer sa priorité politique. Gouverner la peur au ventre, c’est la pire des choses. Et c’est très difficile à gérer pour les partenaires qui ne savent plus à quoi s’en tenir… »

Le fantôme des écotaxes

Les dossiers environnementaux délicats collent aux dirigeants écologistes comme les sparadraps au doigt du capitaine Haddock. Dernier avatar ? La taxe kilométrique. Le dossier a été le fruit d’un accord politique signé en 2011 liant une bonne dizaine de ministres des trois Régions du pays, mais il est pourtant devenu une bombe en période préélectorale pour les écologistes. « Je suis radicalement contre », lance Paul Magnette, président du PS. « Il faudra me passer sur le corps », enchaîne Benoît Lutgen, son homologue du CDH. Surtout, une pétition en ligne a rassemblé en dix jours quelque 170 000 signatures pour s’y opposer. Après quelque hésitation, Ecolo a repris le refrain du refus. La polémique initiée par le secrétaire d’Etat bruxellois et Groen à la Mobilité risque de causer des dégâts : « Le timing de Bruno De Lille est terrible pour les écologistes francophones, analyse le politologue Pascal Delwit. Cela l’arrange peut-être pour séduire son électorat, les cyclistes flamands du centre de Bruxelles, mais ce sera très difficile à gérer pour Ecolo, même s’il dit ne pas en vouloir maintenant et qu’il n’est pas responsable de cette proposition. Quand on parle d’éco-fiscalité, on rappelle inévitablement le souvenir des écotaxes. »

Ecotaxes : le mot est lâché. Négociées par Ecolo au début des années 1990 en échange de leur soutien à la quatrième réforme de l’Etat, elles ont été traînées comme un boulet par le parti durant de longues années. « Les écotaxes ? J’étais encore à l’école quand cette discussion a eu lieu, glisse Emily Hoyos. Ecolo s’est rendu un très mauvais service à l’époque parce que la fiscalité verte doit être encourageante et pas décourageante. On a fait alors l’inverse de ce qu’il fallait faire : la transition énergétique, il faut la financer en taxant les revenus spéculatifs des traders, pas les comportements des Belges. C’est un grand malentendu, qui n’est plus dans le programme d’Ecolo. »

Chez les environnementalistes, on le regrette. Christophe Schoune, secrétaire général d’Inter-Environnement Wallonie, fustige la « reculade » des partis sur la taxe kilométrique, singulièrement celle d’Ecolo, et parle de « couardise ». « L’éco-fiscalité restera indispensable pour régler les questions environnementales et financer la transition énergétique qui demandera des milliards et des milliards d’investissements, indique-t-il. C’est un déni de la réalité. Il n’y a plus aucun discours volontariste de la part d’Ecolo et nous le déplorons. »

L’intégralité du dossier dans Le Vif/L’Express de cette semaine.

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